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14272 janvier 2015 – Il y a exactement un an, le 2 janvier 2014, nous mettions en ligne un texte sur l’importance considérable de l’année 2014, chargée du poids symbolique énorme de l’année 1914 dont elle marquait le centenaire. A cette occasion, nous exposions une réflexion fondée sur le constat de la puissance de ce symbole (le centenaire, à la mesure de la puissance de cet événement de la Grande Guerre). Notre interrogation et notre hypothèse s’appuyaient et s’appuient plus que jamais sur notre conception de la Grande Guerre.
Les diverses interprétations des analyses de complaisance dont les différences de détails ne sont là que pour faire croire à la pluralité de l’analyse-Système, s’appuient sur une unicité de jugement concernant l’absurdité et l’absence de sens du conflit. Dit d’une façon un peu abrupte, comme la chose le mérite, la Grande Guerre serait une sorte d’“événement stupide”, une sorte d’absurdité relevant d’un passé obscurantiste, antimoderne, où le dérangement des passions et des aveuglements l’avaient emporté sur le rangement impeccable qu’offre notre modernité qui doit rester triomphante dans la perception qu’on en a, – même si c’est de la plus sordide et subversive des manières.
A cela, nous répliquons dans le texte référencé : «On sait que cette appréciation de la Grande Guerre n’est pas du tout notre conception. Au contraire, pour nous la Grande Guerre est bien plus significative dans son horreur et son carnage que 1939-1945, et cela singulièrement pour notre Grande Crise actuelle; la Grande Guerre, c’est une catastrophe hors de tout classement intéressé de l’idéologie, et qui a ainsi absolument un sens extrêmement puissant. Notre aveuglement systématique est de ne pas voir ce sens et de ne retenir que la catastrophe; comme si le fait d’être “une catastrophe hors de tout classement intéressé de l’idéologie”, dans notre époque, impliquait une absence de sens, – jugement bien dans l’esprit moderniste évidemment, avec l’habitude qui est aussi une nécessité de la tournure de cet esprit de la manipulation par le biais de l’idéologisation. Au contraire, la catastrophe de 14-18 dévoile pleinement et logiquement le sens catastrophique de la modernité, elle dévoile le Système, dans sa logique dd&e. On observe que c’est à partir de 14-18 ou autour de 14-18 que se développent les principaux attributs de la Grande Crise qui s’exprime aujourd’hui sans aucun frein: le capitalisme néo puis hyperlibéral, déjà “vibrant” dans les années 1920 comme effet direct de la Grande Guerre, l’américanisation du monde par le commerce et la “réclame” (la communication dans ses premières manifestations dans son rôle de vecteur direct de l’“économie de force” [selon Arnaud Dandieu et Robert Aron] de type expansionniste globalisant), la perversion de l’art mise en route vers son accomplissement d’une perversion totale et totalitaire de la situation actuelle dite de l’“art contemporain”, l’explosion du cinématographe et de la communication de l’idéologie de l’“Entertainment” comme outil créateur de virtualisme et ainsi de suite ... (Sans parler de toutes les avancées technologiques, – le progrès certes, qui est la cause fondamentale de la monstruosité de la Grande Guerre, – qui, à partir d’elle, va prendre une ampleur formidable.)»
… C’est-à-dire que nous faisions et faisons de la Grande Guerre l’événement précurseur de notre Grande Crise actuelle, “notre miroir” en un sens, une étape fondamentale dans notre hypothèse du “déchaînement de la Matière” qui s’est faite à la jointure des XVIIIème et XIXème siècles, et dont notre Grande Crise actuelle est le résultat final. «Dans la dynamique de cette séquence historique, qui est identifiée comme le moteur fondamental conduisant à la crise actuelle, la Grande Guerre de 1914-1918 occupe une place centrale, à la fois comme un pivot de la dynamique en question et comme une “réplique sismique en amont” de notre crise, annonciatrice de cette crise. Il s’agit d’une approche [...] de la Grande Guerre qui vaut essentiellement par l’identification des causes souterraines cachées, d’une très grande puissance, courant depuis le début du XIXème siècle (d’ailleurs se poursuivant après la Grande Guerre). Dans cette conception qui ne fait qu’une part très réduite à la politique, la Grande Guerre est une événement majeur de civilisation caractérisée pas une catastrophe technologique engendrant des destructions et des pertes épouvantables. Il ne s’agit en aucun cas d’un accident et d’une aberration, mais bien d’une poussée paroxystique d’une civilisation en crise, que nous retrouvons dans notre époque présente, sous d’autres formes.»
Symbole pour symbole, puisque nous faisions de 2014-1914 un événement symbolique (le centenaire), il nous fallait déterminer, toujours sous une forme symbolique, ce que nous attendions de cette année 2014 par rapport à la puissance du centenaire qu’elle marquait. Il s’agissait de l’hypothèse selon laquelle 2014 apporterait quelque chose d’essentiel qui renverrait à 1914 pour son importance (“notre miroir”). Nous ne pouvions énoncer cette attente que sous une forme symbolique, puisqu’il s’agissait là du sens même de notre analyse et de notre réflexion. Ainsi énoncions-nous cette hypothèse, qui se résumait sous la forme d’une attente d’une unification symbolique des divers événements, de ce foisonnement crisique (ce foisonnement de crises) que nous connaissions depuis au moins l’automne 2008 (la crise de l’effondrement financier). Bien entendu, si cette hypothèse était rencontrée, il y aurait nécessairement un rangement qui se ferait, même et nécessairement sous la forme d’une sorte différente de désordre, pour finalement “opérationnaliser” l’événement symbolique et lui donner son sens opérationnel qui confirmerait que le symbole est effectivement ce que l’on en perçoit et ce que l’on en devine… C’est ce passage du même texte du 2 janvier 2014, d’il y a exactement un an, que nous reproduisons ici, pour bien expliciter notre hypothèse.
«C’est ici l’effet [du symbole du centenaire]
»Encore n’est-ce là qu’un aspect de la chose, – qui est en fait une hypothèse psychologique de notre part. Un autre aspect apparaît, plus important encore, qui est la création de l’unité sublime et si grande métahistoriquement d’une référence si féconde ; il s’agit donc d’une unité de l’objet de la pensée par la perception psychologique indirecte ; il s’agit donc de cette évolution commune nécessairement vertueuse des esprits vers l’unité, allant en sens contraire de la déstructuration et de la dissolution. De cette façon, on pourrait concevoir que la référence 1914/Grande Guerre, d’ailleurs promise à se prolonger pour notre psychologie avec la logique du fait centenaire selon une perspective jusqu’en 2018, contribuerait peut-être décisivement à la réalisation d’une unification, puis de l’unité de la perception de la crise actuelle. En ce sens, 1914 répercuté par 2014 pourrait être effectivement une sorte de miroir qui nous serait tendu, où nous pourrions identifier notre crise et sa signification au travers de la perception, consciente ou inconsciente, de ce que fut réellement (selon notre conception) la Grande Guerre. A travers cette référence, nos psychologies seraient conduites à accepter d’une démarche commune le fait de la Grande Crise actuelle effectivement comme le fait de la crise d’effondrement du Système.
»[… A] propos propos de cette “grande ombre” de 14-18 à un siècle de distance, qui concerne un rappel constant pour 2014 mais aussi jusqu’en 2018, nous faisons l’hypothèse d’un poids secret qui va désormais peser sur nos psychologies, et un poids évidemment dans le sens que nous disons qui est celui de la Grande Guerre perçue comme “un événement majeur de civilisation caractérisée pas une catastrophe technologique… […] une poussée paroxystique d’une civilisation en crise, que nous retrouvons dans notre époque présente, sous d’autres formes.” Ce poids constitue une pression collective qui n’a besoin d’aucune identification officielle, d’aucune catégorisation courante, qui est l’effet d’une de ces forces extrahumaines auxquelles nous faisons souvent référence, influençant et changeant les psychologies dans le sens de l’acquiescement et de la compréhension de notre situation, de l’identification de cette Grande Crise, enfin de la nécessité vitale, quasiment de survie de cette crise d’effondrement du Système.»
Ainsi s’exprime d’elle-même, exactement un an plus tard, la question que posait l’hypothèse envisagée dans cette analyse, mais exprimée ici d’une façon événementielle et opérationnelle, puisque 2014 est accompli. Cet événement contribuant peut-être décisivement, et même sans aucun doute décisivement à «la réalisation d’une unification, puis de l’unité de la perception de la crise actuelle» a-t-il eu lieu ? Notre réponse est évidemment positive, et elle nous paraît être décisivement positive. Bien entendu, il s’agit de la crise ukrainienne qui a pris, tout au long de l’année depuis les 21-22 février 2014 une ampleur extraordinaire, qui dépasse toutes les autres crises, qui s’est en fait transmutée presqu’instantanément en une crise haute unifiant et intégrant toutes les autres crises.
Notre propre perception témoigne de la rapidité d’amplification de cette crise. Dans notre texte d’il y a un an, où nous exprimions cet espoir de voir surgir cette crise d’unification et d’intégration, nous ne pensions pas une seconde à la crise ukrainienne qui semblait entrée dans une phase amorphe sinon de déclin et de dissolution après l’éclat du 19 novembre 2013 et les troubles des quelques semaines qui suivirent. Quelques semaines après notre texte du 2 janvier 2014, nous n’avions plus que cela (la crise ukrainienne) à l’esprit. Le 24 mars 2014, nous posions la question de savoir si la crise ukrainienne n’était pas “la crise haute ultime”, – et poser la question déjà, c’était déjà y répondre bien entendu. Cette séquence, qui montre la contraction du temps et l’accélération de l’Histoire laissant le chroniqueur impuissant à émettre des hypothèses opérationnelles, justifiait notre méthodologie de recourir à une analyse des symboles de l’histoire-en-cours pour tenter de deviner ce que nous réserve dans les événements la vérité métahistorique qui se tient et s’active désormais au-dessus de ce que nous nommons également “l’histoire-tout-court”.
… Par conséquent, la crise ukrainienne devenue crise haute, et peut-être “crise haute ultime”, – c’est-à-dire, devenue la crise même d’effondrement du Système, – dominera l’année 2015 comme elle l’a fait en 2014. Il est assuré que l’acteur principal en sera les USA, parce que seuls les USA suivent complètement et sans la moindre restriction, et surtout sans la moindre hésitation de doute, et nous dirions même sans la capacité ni la volonté de lui imposer la moindre restriction, la politique-Système.
Les USA sont aujourd’hui complètement sous l’empire du Système, et ils n’ont, dans leur politique même, dans leur psychologie, dans leurs élites et dans leurs dirigeants politiques, plus rien qui puisse les faire s’échapper du Système si seulement cela était envisagé. La crise des USA, – car il y a crise, multiforme et colossale, indéfinissable, universelle enfin, – leur crise est donc de facto le cœur de la crise du Système, comme elle est de facto le moteur de la crise ukrainienne. Bref, la crise des USA est la crise du Système comme les USA sont le cœur et le moteur du Système, tout cela sans la moindre conscience de la chose et donc sans le moindre espoir d’une réaction contre cette situation...
Aussi s’impose aussitôt, pour avancer encore plus vers l’énigme de l’effondrement du Système, la question de savoir de quels événements va être faite la politique des USA en 2015, elle dont l’orientation ne dissimule aucun mystère puisqu’il s’agit précisément de la politique du Système. Quels vont être les événements déstabilisants et déstructurants que déclenchera cette politique, précisément dans la crise ukrainienne, aussi bien en Ukraine même que, dans ce cadre, dans ses rapports avec la Russie, puis dans ses rapports d’autres acteur, – l’UE, la Chine, les BRICS, etc., – dans d’autres crises, “crises collatérales” si l’on veut, – liées à la cris ukrainienne, directement ou indirectement (la crise du dollar, la crise du prix du pétrole, etc.) ? On comprend qu’en se saisissant des USA et de l’énigme de son destin autodestructeur, l’on se saisit de l’énigme du Système, conduit par sa surpuissance vers son autodestruction. On comprend également qu’agiter des interrogations sur le détail des événements qui iront tous dans le même sens en 2015, poursuivant et multipliant 2014 dans ce sens, n’a justement aucun sens ni aucun intérêt ; on ne prévoit pas l’imprévisible, on ne peut que s’attendre et être prêt à tout dès lors qu’on connaît l’orientation générale de la dynamique en marche, qu’on reconnaît que l’analyse symbolique de 2014 vaut également pour 2015.
Le thème de la crise générale, – qu’elle soit considérée ou pas comme celle du Système, qu’elle soit observée d’un œil sombre ou d’un œil émoustillé, – ce thème est partout. Il s’agit de l’affirmation de la surpuissance de la politique-Système, alias politique des USA, avec l’affirmation par les antiSystème de la crise profonde des USA, correspondant trait pour trait mais selon une forme exactement inversée à l’affirmation grotesque du redressement des USA par des commentateurs-Système qui ont toujours nié que les USA fussent en crise (alors, se redresser de quoi ?). Cette dynamique de surpuissance est partout dans les commentaires après l’affrontement du mois de décembre 2014 dont on comprend après tout qu’il aurait dû avoir la tête de Poutine. Aussi choisissons-nous de nous arrêter à un sentiment désormais général, qui est le nôtre depuis longtemps et qui représente un aspect “opérationnel” confirmant que nous sommes effectivement dans la phase terminale de l’effondrement du Système : la conviction générale que les USA, désormais, ne s’arrêteront plus. Nous citons deux textes de provenance très différente, mis en ligne le même jour par le Saker-USA... Tous deux, ils montrent, selon notre appréciation, que, quel que soit le sujet concret “opérationnel” choisi, on en revient toujours, consciemment ou pas, au problème central, le seul qui compte.
• Après trente années passées à la Banque Mondiale, Peter Koenig est devenue un analyste en économie et en géopolitique indépendant et évidemment dissident/antiSystème. Le 29 décembre 2014, Koenig écrit un article où il met en garde l’Europe contre le terrain dangereux où va l’entraîner l’Amérique, – rien de moins que le Troisième Guerre mondiale. Pour notre compte, une phrase ressort de son analyse, que nous soulignons de gras... “Une bête en train de mourir ne connaît nulle pitié. Elle préfère détruire l’univers et elle-même que laisser des survivants derrière elle”.
«It looks like the economic and propaganda war is being won by Russia. On the political western front things are crumbling too. Hungary’s government, a member of the EU and of NATO, has just declared an alliance with Russia against Washington. Turkey, once a contender to enter the EU, is disgusted with Europe and in instead aiming at membership in the SCO (Shanghai Cooperation Organization). Turkey is a strategic key NATO member. Will others follow suit, as more and more are seeing the emperor’s nakedness and malignancy? The veils are falling. Gradually. So-called allies of the empire are wary since long. Afraid of ‘sanctions’ or worse, of a possible take-over by the merciless killing machine, they have nodded and played along. But, as they see the implosion of the beast, they increasingly dare jumping ship.
»Europe – be aware! The center of the next war might again be Europe. A dying beast knows no mercy. It rather destroys the universe and itself than leaving survivors behind. – Unless it’s poisonous and killing tentacles can be paralyzed – terminally, by economic isolation; by abandoning the dollar; by making this worthless currency irrelevant and obsolete. For good...»
• L’économiste et polémiste russe Mikhail Khazine préfère prendre le même problème d’un autre point de vue, qui est celui d’une “direction US” qui a perdu tout sens, toute direction justement, irrésistiblement entraînée par la surpuissance que produit le Système dont elle est la prisonnière. Ainsi décrit-il, le 29 décembre 2014, comment et pourquoi “l’Amérique ne peut pas s’arrêter” («Why America Can't Stop»). L’analyse est différente de celle de Koenig et s’attache à la question spécifique des frontières au nom de laquelle la question de la Crimée est épigée en crise majeure, mais le constat final revient au même ; là (Koenig), c’était “la bête” qui était décrite, ici (Khazine) c’est l’emprisonnement où “la bête” tient les dirigeants-Système US qui prétendent la conduire qui est observé ... Là encore, la phrase qui nous paraît bien plus importante que tous les attendus de l’analyse est soulignée de gras (“Ils continueront à pousser jusqu’à ce que toute la structure s’effondre sur eux à cause de leurs actes. De ce point de vue, il est déraisonnable d’attendre qu’ils suppriment les sanctions ou qu’ils nous permettent [nous, les Russes] d’agit de façon indépendante. Peut-être seraient-ils heureux de le faire mais ils sont prisonniers de leur propre système..”).
«That can be defined as: sudden moves that can be interpreted as a game changer which in turn might alter the very rules that the United States has introduced in the decade of 2000 and such moves are not allowed. For example, you cannot just change borders. Possibly, if the United States could turn the clock back, then they might have left the Pandora's box safely closed and would not have amputated Kosovo from Serbia, but what's done is done, besides that all happened during prosperous 90s. But to permit the phenomenon of Crimea (or anything similar) is just impermissible. Because if we allow to change borders on a regional level, then entire Eastern Europe, the Middle East and many other areas will turn into serious war theaters.
»Essentially we are the ones who understand that this is unavoidable, but American elites will never come to grips with that (and that's why our economic theory is something they would never agree with), this why they will do whatever it takes to postpone their own end, they'll drag it until the whole structure collapses upon them on its own. In that sense, it is implausible to expect that they would remove sanctions or that they will somehow agree to us acting independently. Perhaps they would be happy to but they are prisoners of their own system...»
... Vers la mi-décembre, donc, Washington crut qu’il tenait le bon bout. Ces gens sont à la fois prisonniers du Système et endoctrinés par le Système (voir la Perception Management, le 31 décembre 2004) ; ils se rient des bulles où ils croient avoir enfermé les autres, qui sont comme autant de bulles de leur propre narrative qui serait une bande dessinée. («Putin’s Bubble Bursts» titrait triomphalement, le 19 décembre 2014 dans le New York Times l’héroïque Prix Nobel Paul Krugman, auquel nous nous intéressions l’année dernière, le 31 décembre 2014. Alors, exit Poutine, pour cause de regime change ? Non, Poutine est toujours là et Krugman s’est retiré dans sa bulle, comme l’Empereur se retirait sous sa tente...)
Commentant l’événement d’un Poutine désormais balayé selon la narrative, l’impérial Obama a parlé de sa propre “strategic patience” qui lui aurait permis de venir à bout de son adversaire, lui-même (BHO) s’estimant être le génie que tout le monde croyait distinguer en Poutine, quelques mois plus tôt. (Voir l’interview que BHO a accordée à la radio NPR, présenté et joliment commenté par The Washington’s blog, le 31 décembre 2014.) Puis, après avoir conclu que les diverses actions de l’exceptionnelle Amérique, notamment la sienne en Libye et en Syrie, avaient amélioré la situation du monde («wherever we have been involved over the last several years, I think the outcome has been better because of American leadership»), l’Empereur s’est retiré sur son green plutôt que sous sa tente, car le golf sied à merveille à sa “strategic patience”.
Les étranges et grotesques commentaires d’un Krugman et d’un Obama, ces sous-fifres du Système chargés du commentaire de l’étape, semblent considérablement décalés par rapport à la vérité de la situation apparue au terme de ce mois de décembre de cette année 2014. C’est le rôle des amuseurs publics d’ainsi nous présenter de la façon la plus pompeuse possible telle ou telle étape pour entretenir l’illusion du contrôle de la course. Il reste que l’“option nucléaire” déclenchée au début du mois contre la Russie, la First Strike économique et monétaire, n’a pas donné l’Hiroshima espéré. Là-dessus, il faut préciser avec force qu’il s’agit d’un constat qui n’est décisif en rien, pour aucune des deux parties en présence ; il suffit à fixer le fait que le mois de décembre 2014 et sa First Strike nucléaire et financière ne sera retenu dans la chronique des événements contemporains que comme une étape de plus dans la course de l’incessante poussée antirusse du Système.
Ainsi en revenons-nous au principal, pour tirer comme leçon de cette péripétie que tout se passe bien dans cet axe fondamental de crise, que rien n’arrêtera la poussée furieuse des USA parce que rien n’est plus capable d’arrêter la dynamique du Système, que l’axe fondamental de crise qu’est l’Ukraine et le reste est bien le champ d’action privilégiée, enfin unifié comme nous en faisons l’hypothèse il y a un an, de notre Grande Crise Général, donc de la crise d’effondrement du Système. Entendons-nous bien : si nous parlions plus haut d’“étapes” et de “course”, c’est pour la facilité de l’image. Il doit bien être accepté qu’il n’y a pas une “course” comme l’on parlerait d’une compétition d’où un vainqueur émergerait à son terme. Il n’y a une “course” que dans le sens d’une trajectoire où se déploie cette surpuissance du Système inarrêtable et inévitable («Why America Can't Stop»), et la trajectoire n’est une “course” dans son autre sens que dans la mesure où la surpuissance produit de plus en plus l’autodestruction et donc qu’à un moment donné de cet événement inouï l’autodestruction prendra le pas sur la surpuissance, – et là, oui, comme dans une “course” cycliste, distancera irrémédiablement la surpuissance.
C’est cela qui nous intéresse et rien d’autre. C’est en cela que 2015 doit nécessairement poursuivre 2014, puisqu’il est désormais avéré que l’espoir (oui, il s’agit bien d’un espoir, et du seul espoir possible) que nous émettions sous forme d’hypothèse s’est effectivement concrétisé en une crise unificatrice et intégratrice à partir de l’événement de Kiev des 21-22 février 2014.
“Espoir, et [...] seul espoir possible”, écrivons-nous. Nous sommes arrivés au point où il n’est plus question de s’attarder aux détails des événements, – ou, plutôt, aux détails de l’Événement (la chose mérite à cet instant, pour ce propos, une majuscule). Nous avons nommé cela “la Grande Guerre Postmoderne” (le 26 décembre 2014), pour saluer bien entendu cette circonstance du centenaire qui influence et oriente notre réflexion. Mais cette similitude analogique de “Grande Guerre” porte bien entendu sur le sens de l’Événement, et nullement sur une quelconque compétition au sens courant d’une compétition entre deux adversaires. Symboliquement, la Grande Guerre Postmoderne poursuit la Grande Guerre première du nom dans le sens où «la catastrophe de 14-18 dévoile pleinement et logiquement le sens catastrophique de la modernité, elle dévoile le Système, dans sa logique dd&e» ; nous attendons donc, – et c’est là qu’est notre espoir, – qu’après que “le sens catastrophique de la modernité et du Système” ait été dévoilé il y a un siècle, il soit aujourd’hui poussé à son accomplissement décisif de la surpuissance transmutée en autodestruction par la Grande Guerre Postmoderne.
Pour cette raison effectivement, – et peut-on en trouver une meilleure ?, – «America Can't Stop». Il n’est pas assuré que 2015 suffira à l’affaire mais il est assuré que l’on continuera à traiter cette affaire, en quatrième vitesse ... Bienvenue à 2015 après 2014 : l’évidence calendaire, elle aussi, est bienvenue.
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