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1052Nous pensons que cette livraison du 25 octobre 2009 de dde.crisis(disponible pour l'achat au numéro sur edde.eu) devrait s’avérer intéressante dans le développement qu’elle offre de l’appréciation des armes et des armements dans l’Histoire, depuis cette grande rupture que nous avons identifié comme un tournant de la civilisation, voire une rupture vers une “deuxième civilisation occidentale”. (Des références à cela renvoient à notre future publication, La grâce de l’Histoire.)
Nous pensons que les armes jouent un rôle fondamental dans cette “deuxième civilisation occidentale”, non seulement un rôle d’outil mais un rôle d’inspirateur qui sert l’“idéal de puissance” caractérisant la période et dont nous vivons aujourd’hui la crise terminale. Nous accordons évidemment une place importante au rôle moderne des armes, et notamment au phénomène remarquable du renversement de l’arme, dans certaines situations, d’un rôle déstructurant caractérisant l’“idéal de puissance”, à un rôle brusquement structurant. C’est, par exemple, l’interprétation que nous faisons de la force de frappe nucléaire française, telle que conçue par de Gaulle… Voici le sommaire de cette rubrique de defensa consacré au sujet, dans ce numéro de dde.crisis. (Cette rubrique de defensa est naturellement complétée par la rubrique Perspectives.)
La rupture des armes. • Introduction du sujet: la question de l’armement dans notre époque, mais aussi dans une perspective historique, et même métahistorique. (Page 2) • Exemple d’application récente du cas structurant des armements: les relations en cours d’élaboration, sans qu’on en sache encore le résultat, entre la France d’une part, le Brésil et la Russie d’autre part. (Page 2) • Au travers de ces exemples, définition et explication, dans ces circonstances historiques et politiques précis, du caractère structurant des armements. (Page 3) • Ces acteurs modernistes ainsi définis doivent être placés, pour développer notre propos, dans une perspective historique, et même métahistorique. (Page 4)
Le fracas métahistorique des armes. • De la “guerre déstructurante” inventée par la Révolution française à l’armement déstructurant moderne qui complète ce nouveau type de guerre en lui donnant son caractère principal. (Page 4) • Après le paroxysme de la Grande Guerre (Verdun), la Deuxième Guerre imposa la mystique de l’armement industriel et la Guerre froide en pérennisa la dictature absolue. (Page 5) • La Guerre froide a mis en place un système de complète domination de l’armement sur les politiques, les psychologies et les pensées elles-mêmes: triomphe du diktat de la matière sur l’esprit. (Page 6) • Seule exception de la Guerre froide, le “miracle français”: avec la même “quincaillerie”, l’arme nucléaire développée durant la IVème République et élevée au rang de fonction souveraine par de Gaulle a permis le rétablissement des plus hautes valeurs politiques: légitimité et souveraineté. (Page 7) • L’après-Guerre froide a vu un déchaînement anglo-saxon de l’armement (exportations et le reste), signe d’un système et d’un esprit complètement infectés par la matière, avec notamment comme cible prioritaire dans ce domaine: l’armement français, perçu désormais comme facteur de combat contre les forces déstructurantes. (Page 8) • La G4G, qui triomphe à partir de 9/11 et transcende largement le seul domaine de l’opérationnel militaire, a porté un rude coup à l’armement utilisé comme force déstructurante. (Page 8) • L’armement est aujourd’hui un acteur du drame métahistorique qui se joue avec la crise, et il peut tenir un rôle structurant fondamental. (Page 9)
Exceptionnellement – nous pensons que nos abonnés à dde.crisis ne nous en voudrons pas – nous publions l’éditorial de ce numéro, qui décrit précisément le contenu de la rubrique que nous signalons.
«La métahistoire des armes
»Effectivement, avec ce numéro, nous poursuivons l’impulsion que nous donnait l’actualité dans le précédent numéro, en une réflexion fondamentale sur les armements – du «poids des armes» à «La métahistoire des armes». Le phénomène le mérite; et, par “phénomène”, nous n’entendons pas désigner “les armes” selon le sens trivial du mot, mais bien ce qui est apparu de complètement nouveau, de bouleversant en vérité, dans le domaine des armes à partir de la Révolution française.
»Ce que nous voulons observer, c’est l’évolution et le rôle des armes dans une période de l’Histoire si complètement marquée par une rupture fondamentale. Nous sommes amenés à considérer en effet qu’à partir de la Révolution française, et des événements parallèles qui l’accompagnent, c’est une véritable “deuxième civilisation occidentale” qui a commencé. Notre thèse est que les armements tiennent une place considérable, centrale, fondamentale, dans cette rupture. C’est pourquoi nous donnons à cette interprétation un sens métahistorique.
»Le fait le plus remarquable est, bien entendu, cette démarche intellectuelle, d’abord intuitive d’ailleurs, de donner à la matière brute (“les armes”) une dimension qui est presque du domaine du spirituel (la métahistoire). Notre conception est, effectivement, que ce ne sont pas les idées qui marquent depuis la Révolution française l’évolution historique, mais que les armes et la brutalité, le caractère déstructurant qu’elles introduisent font en réalité l’Histoire. Les idées, elles, s’introduisent dans le chaos et le vide créés par l’action déstructurante des armes.
»De ce point de vue, on peut avoir une appréciation complètement différente de la période depuis les deux derniers siècles. On peut encore mieux comprendre les événements actuels, c’est-à-dire d’une façon beaucoup plus satisfaisante pour l’esprit. Plus encore, on peut mieux appréhender un phénomène qui se manifeste à nouveau aujourd’hui, qui s’était déjà manifesté lors de la grande période gaullienne de la France (les années 1960), où les armes qu’on définit d’une façon générale comme radicalement déstructurantes, deviennent soudain, dans certaines mains et selon un certain esprit, un phénomène complètement structurant.
»On le comprend, les armes en tant que “quincaillerie” ne nous intéressent pas plus que les armes “instruments de mort” (c’est-à-dire considérées comme les seules causes, d’une seule catégorie économique [les “marchands de canon”, disons], des calamités guerrières qui nous frappent). Au contraire, nous considérons “les armes” comme le caractère fondamental de cette “deuxième civilisation occidentale”, aussi bien comme le moteur des idées, comme la fatalité du scientisme et du mécanisme, comme l’inspiration d’une politique réduite au nihilisme et au culte de l’“idéal de la puissance” selon l’expression forgée par le philosophe de l’histoire Guglielmo Ferrero.»
Mis en ligne le 26 octobre 2009 à 05H22