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1348Enfourchant une fois de plus notre cheval de bataille, nous proposons à nouveau l’idée que les événements financiers et économiques, s’ils sont évidemment importants, ne sont pas l’essentiel; ils ne sont que les symptômes du mal. Robert Reich a raison de mettre en avant le rôle de la confiance, ou de l’absence de confiance, dans le processus actuel (le 20 février, sur son site, – même si l’on peut discuter la classification de “Mini Depression” qu’il donne à l’événement général):
«When the history of the Mini Depression of 2008-2010 is written by future historians, the word “distrust” will appear again and again.
»Financial stocks are in free fall because no one trusts financials any longer…
[…]
»In this world of economic distrust, it's vitally important that President Obama and his administration maintain credibility on the economy. Raising false expectations would do far more harm than good. In remarks aired this morning on ABC's ‘Good Morning America,’ former president Bill Clinton said he wanted the American people to know that Obama is “confident that we are gonna get out of this and he feels good about the long run. ... I just would like him to end by saying that he is hopeful and completely convinced we're gonna come through this.” Clinton's suggestion is understandable but misguided. Happy talk at this point in time is so incongruous with what most Americans (and others around the world) know and are experiencing that it could undermine Obama's credibility.
»The truth is that no one has any idea how long this crisis will last or exactly how to reverse it. Anyone who says differently cannot be trusted. And because restoring trust is so central to mending the economy, our leaders must be extremely careful not to indulge right now in the audacity of hope.»
Parmi les très nombreuses réactions des lecteurs de cette analyse de Robert Reich, et en général des réactions intéressantes, nous en citons deux qui nous paraissent significatives parce qu’elles illustrent deux tendances de plus en plus affirmées. Elles élargissent le problème à des périodes événementielles hors du cadre de cette crise (dans le cas cité, à la période GW Bush), et elles tendent effectivement à hausser et à élargir la substance de la crise vers le domaine politique. Ces observations renvoient, en les prolongeant et en les précisant, aux observations de Reich lui-même, dont le propos est bien de conseiller une “dramatisation” de la crise en écartant toute spéculation d’amélioration, par conséquent, in fine, de lui donner des dimensions universelles pour l’identifier plus précisément, et espérer la contrôler. Il s’agit bien d’une démarche qui tend à passer de la seule crise financière et économique, même systémique, même globale, etc., vers une conception plus large qui implique au terme de la logique le constat d’une “crise de civilisation”.
D’un premier lecteur dit ‘Anonymous’:
«You are 100% correct, Dr. Reich. The last thing we need now is for our President to sugar coat things or otherwise lie through his teeth about the severity of the problems we face. Obama always tempers his reality-based observations about the economy by telling Americans that we will get through this. That is enough. We know that we've been through worse and that, someday, we will come out the other end of this. Those who are unhappy with the way he talks about the economy are probably having a hard time facing the reality of the situation, themselves. It frankly troubles me that "they" believe that denial is optimal. If President Obama took the advice of Clinton and others, I tell ya, he wouldn't just lose credibility in my eyes, he would completely devastate me.
»It may sound odd, but I think that one thing that could give us all a boost of trust would be for the Justice Department and Congress to immediately begin Bush-era investigations. The past 8 years have been so psychically damaging to the country that I believe it would help us to see that our government does believe in the rule of law, and does stand for truth and justice. Everywhere we look, we see fraud, corruption, and no accountability. We need to know that our Congress and administration takes this seriously and doesn't expect us to collectively normalize such criminality. Expecting us to go along with it is nothing short of a hope and trust killer.»
• D’un second lecteur dit également ‘Anonymous’. (Le même? Heaven only knows):
«The financial distrust is a coda to the social distrust that has seen American workers working more than ever for the same or less - for decades, while financiers soar and dominate. Until THAT problem is addressed, consumption will shrink. There is a political problem under this financial mess.
»And in terms of that political problem, globalization and free trade is one of the prime culprits. So I don't see that these will continue as before. They need to die to be reborn in a different, more equitable and environmental, form.»
Dans ces diverses démarches, qui, toutes s’adressent d’une façon ou l’autre au président Obama, on sent bien s'exercer sur lui une pression grandissante dont le résultat pourrait être, s'il y réagissait, qu’il fasse effectivement sortir la crise du cadre où elle se trouve encore aujourd’hui, et où lui-même la tient enfermée, soit en renforçant le climat de “dramatisation”, soit en envisageant des actions plus concrètes hors du cadre économique. On a déjà vu cette sorte d’exhortation chez un Martin Wolf, il y a une dizaine de jours. Ces diverses interventions ne font que traduire la force des événements en cours.
Cette pression sur Obama n’a aucune raison de s’apaiser, puisque ses causes principales vont se poursuivre et s’amplifier. Elle implique de plus en plus nettement une sorte d’“appel à la sédition” indirect, implicite, involontaire, etc., lancé au président, “sédition” à la fois contre le système mais, plus encore, “sédition” comme seule voie de créer une catharsis pouvant éventuellement faire exploser le cadre de la crise et permettant une attaque contre la crise en rétablissant une cohésion psychologique (la confiance). Cette évolution, qui se comprend, ce jugement de la nécessité de la “dramatisation” de la crise, qui se justifie, portent en eux leurs propres contradictions quant aux résultats. Elles peuvent effectivement conduire à une sorte d’explosion libératrices (catharsis), – mais libératrice de quoi? Comment ne pas concevoir que cette libération explosive attaque évidemment le système lui-même, et devenant ainsi explosivement déstructurante? C’est l’hypothèse “American Gorbatchev”, mais envisagée alors que le système de l’américanisme est en phase terminale (voir Soros, comparant la situation actuelle du système à la phase de l’effondrement de l’URSS), – comme si Gorbatchev était intervenu en URSS après deux-trois ans de “gorbatchévisme”. (Dans ce cas et poursuivant l'analogie, c’est Bush qui aurait le premier déclenché cette vague de “grobatchévisme” aux USA en nourrissant, par d’autres voies que Gorbatchev, la déstabilisation qui s’est effectuée depuis le 15 septembre 2008.) Tout se passe comme si nous étions en train de constater un passage d’une phase de déstabilisation (qui est la véritable phase du “gorbatchévisme”, de 1985 à 1988) à la phase de déstructuration (1989-1991), mais tout cela à une vitesse extraordinaire, qui se compterait en trimestres ou en mois plus qu'en années. Plus la situation va devenir pressante pour une action extra-ordinaire d’Obama, plus les conditions vont devenir idéales pour que cette action devienne directement le moteur d’une accélération de la déstructuration du système; Obama risquerait moins, en cas d’action extra-ordinaire, de devenir un “American Gorbatchev” qu’un “American super-Gorbatchev”, agissant dans un sens gorbatchévien en phase terminale…
…Qui s’en étonnerait? Ils sont toujours les “super” de quelque chose.
Mis en ligne le 24 février 2009 à 16H47
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