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837Les points divers de désaccord au sommet de l’OTAN à Lisbonne, aujourd’hui et demain, ne manquent pas. Vous y décompterez la question de la position de la Turquie vis-à-vis des anti-missiles, et vis-à-vis de l’Ouest en général ; la question des anti-missiles, justement, avec en toile de fond bariolée celle des suspicions russes sur les anti-missiles, celle, plus générale, des rapports de l’OTAN et de la Russie, tout cela, sur fond encore plus bariolé d’accord START-II cahotant ; la question absolument récurrente de l’Afghanistan, qui sert de chronique dépressive de l’Alliance depuis quelques années… Ajoutons-y la nouvelle querelle franco-allemande sur le nucléaire, qui ne manque de sel dans la confusion extraordinaire qui la caractérise, qui concerne transversalement plusieurs sujets, – les armes nucléaires US en Europe, les rapports avec les USA et la Russie, le réseau anti-missiles et ainsi de suite.
Les Allemands (ainsi que la Belgique et la Hollande) ne veulent plus d’armes nucléaires tactiques US sur leur sol. Il y a quelques mois, on disait, selon des interprétations européennes des points de vue en vogue au Pentagone : “les Américains ont dit 'pas question, ces armes resteront où elles sont’” (bonjour, la souveraineté)… Au fait, s’agissait-il bien des Américains, comme on dit, “as a whole” ? Si on lit bien Julian Borger, en général bien informé, dans le Guardian du 16 novembre 2010, on est en droit de se demander si l’absence de la mention du retrait de ces armes américaines (ou américanistes, c’est-à-dire du système de l’américanisme) dans le communiqué du sommet de Lisbonne de demain tel qu'il est annoncé après de rudes négociations, n’est pas un revers terrible infligé aux ambitions de dénucléarisation de… Barack Obama, président des USA, – qui a tous les pouvoirs sur les armes nucléaires US, et qui s’infligerait ainsi à lui-même un terrible revers sur son rêve de dénucléarisation
Dans le même article du Guardian, Julian Borger développe cette version qu’il nous présente des armes nucléaires US que la Maison-Blanche aurait voulu rapatrier, et dont la rapatriement aurait été bloqué par les... Français. Résumons pour faire compliqué ce qui, in illo tempore, était encore assez simple : les Allemands veulent donc que les armes nucléaires US s’en aillent, et les Français s’y seraient opposé, contre le vœu des… Américains, qui soutenaient les Allemands.
«In the latest draft of Nato's “new strategic concept”, seen by the Guardian, nuclear weapons remain at the core of Nato doctrine, and an attempt to withdraw an estimated 200 American B-61 nuclear bombs from Europe, a legacy of the cold war, is not mentioned.
»Germany, the Netherlands and Belgium – who all have B-61 bombs on their soil – had pushed to have the tactical weapons removed, with the encouragement of supporters of disarmament in the Obama camp including the US ambassador to Nato, Ivo Daalder.
»However, in a victory for France, which led a rearguard action against diluting nuclear deterrence in Nato doctrine, the draft strategic concept states that the weapons would only be removed as a trade-off with Moscow. “In any future reductions, our aim should be to seek Russian agreement to increase transparency on its nuclear weapons in Europe and relocate these weapons away from the territory of Nato members,” the draft states. “Any further steps must take into account the disparity with the greater Russian stockpile of short-range nuclear weapons.”»
Bien, nous sommes toujours à Lisbonne, au sommet de l'OTAN, et bien qu’il semble s’agir des armes nucléaires tactiques US, il semblerait plutôt s’agir, si l’on fouille un peu, “des armes nucléaires en Europe”, dont les Allemands voudraient être quittes et dont les Français observent avec horreur qu’une telle expression implique certes les armes US tactiques en Allemagne et ailleurs, mais pourraient aussi impliquer les armes nucléaires françaises… Les Français se retrouvent, toujours avec horreur, dans leur situation de 1986-1987 où ils se battaient, d’ailleurs avec le soutien de Margaret Thatcher (et cette fois, Cameron les soutiendra-t-il ?) contre les projets divers d’“option zéro” du couple Reagan-Gorbatchev. Jusqu’au bout, jusqu’au traité d’élimination des armes nucléaires de théâtre (décembre 1987), portant sur les Pershing et les GLCM US, et les SS-20 soviétiques, les Français craignirent, avec toujours cette même horreur mais cette fois non dissimulée, une tentative russo-américaniste pour y inclure les armes nucléaires françaises et britanniques.
Disons qu’aujourd’hui, la situation est a little bit plus confuse car, là-dessus, se greffent l’imbroglio des anti-missiles à laquelle plus personne ne comprend vraiment grand’chose et, pour couronner le tout, l’imbroglio de START-II, à propos duquel le Washington Post nous dit, le 18 novembre 20190, que les Russes «are mystified» par la situation à Washington à ce propos.
Dans tous les cas, nous affirme le même Guardian, mais cette fois dans ses éditions du 18 novembre 2010, ça chauffe entre Français et Allemands, à l’origine avec des Allemands dans la posture anti-américaniste de vouloir le retrait des armes US, mais soutenus par les Américains, contre les Français, dans une posture super-pro-américaniste, mais contre le souhait des Américains, pour sauvegarder la force de dissuasion nucléaire française, – et désormais, sur un autre terrain qui est celui du système anti-missiles que les USA veulent imposer à l’OTAN, – vu par les Allemands comme un moyen d’accélérer la dénucléarisation, vu par les Français comme un complément d’une importance marginale du fait nucléaire (dont le français), qui doit rester central à la sécurité européenne... A moins d’évoquer l’hypothèse salvatrice du “complot” à au moins cinq branches et autant de sous-branches par branche, nous dirions qu’une chatte éprouverait quelques difficultés à retrouver ses petits chatons nucléaires.
Mais enfin, citons, citons, – il en restera bien quelque chose où Dieu reconnaîtra les siens, enfin peut-être…
«Germany and France are at odds over how strongly Nato should push nuclear disarmament, casting a cloud over an alliance summit tomorrow in Lisbon being billed as the most important since 2002.
»With Berlin and Paris locked in dispute over arms control, nuclear deterrence, and plans to cover Europe with a missile shield against ballistic rocket attack, Chancellor Angela Merkel and President Nicolas Sarkozy are expected to meet on the fringes of the Lisbon meeting to try to hammer out a last-minute formula and rescue the summit from failure. […]
»Rasmussen was in contact today by telephone with Sarkozy and Merkel, seeking to bridge the differences. Officials in Brussels said the French and German leaders would need to meet privately in Lisbon to find a compromise. Obama could be called on to act as mediator in the dispute.
»The row centres on the missile shield which is to be agreed at the summit. In what was seen as an olive branch to Moscow last year, Obama ditched the Bush administration's plans for missile defence, with radars and missile interceptors based in Poland and the Czech Republic.
»Instead the summit is to agree on a more modest system, upgrading “theatre missile Defence” aimed at protecting troops and military installations into a “phased adaptive system” eventually shielding European populations and territories from, say, Iranian missile attacks. Nato wants Russia to take part in the new system.
»France, however, is highly sceptical of the merits of missile defence, while the Germans see it as a way of lessening reliance on nuclear weapons. The French are also dismissive of Obama's vision of a nuclear-free world, laid out last year in Prague, while the Germans view it enthusiastically as the trigger for a new age of arms reduction and non-proliferation.The wording of the new blueprint describes both the nuclear deterrent and missile defence as “core éléments” of Nato defence strategy.»
Mis en ligne le 19 novembre 2010 à 15H46