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1562Le système sol-air russe S-300 a une longue histoire, particulièrement le chapitre écrit en connexion avec l’Iran ; lequel s’est interrompu en 2010, lorsqu’une importante commande de S-300 passée en 2007 par l’Iran fut annulée par Medvedev, entraînant une plainte de l’Iran devant des instances juridiques internationales ; lequel semblerait être rouvert depuis le 20 janvier 2015, lors de la visite du ministre de la défense russe Choïgou à Teheran, avec possible livraison non plus du S-300 mais du S-400 aux capacités très supérieures...
DEBKAFiles avait annoncé cette possibilité dès le 21 janvier 2015 (article complet accessible le même 21 janvier 2015 sur Missile-Threat.com). Hier, Sputnik.News (Tass) annonçait que la Russie avait offert l’Anteï-2500 à l’Iran, – une version modernisée du S-300, lequel n’est plus en production. La nouvelle a été largement reprise, notamment par le Guardian du 24 février 2015. Finalement, Sputnik.News annonce le 24 février 2014 que cela pourrait bien être le S-400, devant le “probable refus“ des Iraniens de l’offre-Anteï-2500...
«Selon une source au sein du système russe de coopération militaro-technique, il est probable que la partie iranienne refusera d'acheter des Anteï-2500. Dans ce cas, la Russie pourrait proposer à l'Iran des systèmes ultramodernes S-400, a fait savoir l'interlocuteur du quotidien. Une source diplomatique iranienne a pour sa part confirmé au journal [Kommersant] que cette question avait été évoquée le 20 janvier dernier lors des négociations entre les ministres de la Défense des deux pays, Sergueï Choïgou et Hossein Dehghan.»
Le Guardian, même s’il n’en était pas encore au S-400 (à plus forte raison s’il s’agit du S-400), ressort l’habituelle argumentation développée à propos de ces missiles depuis qu’il est question d’une vente, avec la variante israélienne de l’attaque décisive contre l’Iran : «If the sale goes ahead, the missiles are likely to represent a significant defence against any future air strikes aimed at Iran’s nuclear facilities, and so could in theory diminish pressure on Iran to come to an agreement in nuclear negotiations. Conversely, if the talks fail, a missile deal could raise pressure from Israel and from US hawks for military action before the delivery of the Russian weapons makes air strikes riskier and less effective... Israel’s prime minister, Binyamin Netanyahu, is due to deliver an address to the US Congress next week in which he is expected to urge the administration to take a tougher line against Iran.»
Les pressions diverses qu’on peut déjà sentir à l’annonce de cette possibilité de vente, sur fond d’une coopération militaire entre l’Iran et la Russie relancée par Choïgou, font penser que si les perspectives (S-400 et le reste) se précisent cette affaire constituera un brûlot intéressant dans les relations multilatérales entre la Russie, l’Iran, les USA et Israël (au moins).
• La Russie se place, cette fois, dans une perspective nouvelle, notamment par rapport à Israël qui ne manquera pas, comme il l’a fait en 2012, de demander de surseoir à une possible livraison. Elle ne se place pas dans le cadre du jeu multilatéral autour de l’accord sur le nucléaire iranien et sur les craintes apocalyptiques d’un Iran nucléaire qu’agite périodiquement Netanyahou, mais dans le cadre bilatéral (avec l'Iran) qui a été nécessairement ouvert, et notamment dans ce domaine de la coopération militaire, par la politique US/bloc BAO contre la Russie dans la crise ukrainienne.
• Pour la Russie, la vente possible, comme nombre d’autres tractations en cours, entre dans sa nouvelle stratégie vers l’Est et le Sud-Est, tournant le dos au bloc BAO qui est entré dans une logique d’affrontement avec la Russie. Du point de vue russe, les livraisons d’armements avancés (dont le S-400) entreraient dans une logique de rapprochement avec l’Iran passant également par une demande d’adhésion de l’Iran à l’Organisation de Coopération de Shanghai, peut-être officielle dès le sommet de l’OCS cet été. Le S-400, déjà vendu à la Chine, peut devenir une sorte d'armement standard de l'OCS par le biaisée ses membres, contre les menaces les plus avancées faites par les USA et ses acolytes.
• L’Iran renforcerait éventuellement, avec de tels équipements, sa position dans les tractations nucléaires et l’éventuel accord qui en sortirait, ou dans la situation si aucun accord ne sortait de ces tractations. Dans tous les cas, ce pays accentuerait, s’il ne le fait déjà, son tournant similaire à celui de la Russie par rapport au rapprochement avec le bloc BAO (les USA) que son actuelle présidence envisageait dans le cadre de négociations nucléaires réussies. De nouveaux rapports avec la Russie, dans le domaine d’une entente stratégique fondamentale, conduiraient effectivement l’Iran vers une position hors-Système correspondant au courant que la Russie veut susciter et entretenir dans le cadre de la nouvelle situation de tension.
• Il est fort possible que les Russes aient songé à “fuiter” ces diverses révélations quant aux offres faites à l’Iran (ventes possibles d’Anteï-2500, sinon ventes possibles de S-400), quelques jours avant la visite terriblement controversée à Washington de Netanyahou, avec discours devant les Chambres réunies en Congrès, sans rendre visite au président Obama et même contre la volonté du président. Il serait peut-être prudent, en effet, de s’attendre à ce que Netanyahou inclue dans son discours une allusion précise à ces bruits de ventes d’armes russes avancées à l’Iran, pour plaider pour de nouvelles menaces d’attaque contre l’Iran. Netanyahou poursuivrait de cette façon sa dialectique paranoïaque vis-à-vis de l’Iran, entretiendrait son fond de commerce électoral à quelques jours des élections, et surtout, surtout, jouerait un très mauvais tour à Obama qu’il hait avec un entrain roboratif en rendant beaucoup plus difficile un accord avec l’Iran et en rendant encore plus difficiles ses rapports (ceux d’Obama) avec le Congrès.
• Il est également possible, dans le cadre de ce discours de Netanyahou, et s’il est question des S-400 (de toutes les façons, il en sera question en coulisses), que divers parlementaires US se saisissent de l’affaire pour mettre en accusation la Russie et réclamer d’une voix encore plus haute et plus angoissée que de coutume la livraison d’armes à l’Ukraine. La perdant, dans ce cas également, serait encore Obama qui voudrait bien actuellement ne pas se trouver forcé à se prononcer sur la livraison d’armes à l’Ukraine, dont il sait que cela pourrait devenir un sujet de rupture avec ses “amis” européens type-Hollande/Merkel.
• Le sujet de l’armement US pour l’Ukraine n’est d’ailleurs nullement au frigidaire actuellement. Au contraire, il est en pleine activité, à Abou Dhabi, où se tient un salon des armements terrestres (International Defense Exposition and Conference, ou IDEX). Des Américains officiels, du Pentagone et de l’industrie de défense US, ont rencontré hier soir des officiels ukrainiens et devaient rencontrer aujourd'hui sans doute Porochenko himself, en balade dans les pays du Golfe ... Defense.one rapportait, le 23 février 2015, quelques éléments de cet intéressant épisode, notamment à partir des déclarations du sous-secrétaire à la défense pour les acquisitions Frank Kendall. Ces rencontres avec différents représentants du complexe militaro-industriel (US) semblent clairement signifier, pour qui connaît la musique de cette sorte de processus, que la machine (US) est en marche pour constituer un package important d’armements (US) pour l’Ukraine, ce qui devrait grandement contribuer à aggraver considérablement la situation, et éventuellement compromettre Minsk2.
«Ukrainian President Petro Poroshenko is expected to meet with U.S. defense companies Tuesday during a major arms exhibition here even though the American government has not cleared the firms to sell Kiev lethal weapons.
»Frank Kendall, the Pentagon’s acquisition executive is scheduled to meet with a Ukrainian delegation Monday evening, however Poroshenko is not expected to be there. Kendall, in an interview, said he will be bringing a message of support from the United States. “I expect the conversation will be about their needs,” Kendall told Defense One a few hours before the meeting. “We’re limited at this point in time in terms of what we’re able to provide them, but where we can be supportive, we want to be.” [...] As undersecretary of defense for acquisition, Kendall does not negotiate Defense Department policy with allies. “I’ll be … primarily in listening mode trying to understand what their needs are,” Kendall said.»
Mis en ligne le 24 février 2015 à 14H36
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