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1272Un vent de grande interrogation, pour le moins, de panique diraient les pessimistes professionnels et mauvaises langues, commence à envelopper le programme JSF. Il est manifeste aujourd’hui qu’il existe une démarche officielle de mise en question du programme, notamment au travers du choix de remettre l’essentiel de l’autorité de l’évaluation de son état à des organismes qui ne dépendent pas de sa bureaucratie (JPO, ou JSF Program Office), essentiellement à l’équipe JET. Diverses appréciations circulent dans la presse, principalement sur le Net, concernant des hypothèses sur l’avenir du programme. Nous reviendrons sans aucun doute sur le cas, mais l’on doit d’ores et déjà signaler plusieurs interventions.
• La question classique soulevée au moment de la crise financière l’est désormais pour le JSF : “Too big to fail?”, – comme nous-mêmes l’avions soulevée directement à l’époque, effectivement à propos du JSF (voir notre F&C du 25 septembre 2009). (Nous ajouterions “too big to fall?”, – mais soit.) La question fatidique a été posée sur le site Plane Talking au très légendaire ingénieur Clarence “Kelly” Johnson, créateur de quelques-uns des plus fameux avions de Lockheed (le P-80, le F-104, le U-2, le SR-71). Les réponses de Johnson, le 6 août 2009, sont très ambiguës et assez peu optimistes. Le principe “Too big to fail?” implique une intervention du trésor public pour empêcher le bénéficiaire (une institution financière, essentiellement) de chuter, par tous les moyens financiers possibles (transferts d’argent). Le concept est acceptable parce que les établissements financiers sont des producteurs d’argent, et qu’un afflux d’argent peut effectivement relancer la “production” d’argent. Ce n’est pas le cas du JSF, qui est seulement consommateur d’argent et producteur d’autre chose que de l’argent. L’afflux d’argent pour appliquer le principe “Too big to fail?” peut, au contraire, accélérer l’enchaînement dans les voies erronées et renforcer la production d’un produit erroné. «Herein lies the dilemma. Any application of the ‘Too Big to Fail’ ethos to the JSF Program would be intended to spin out the time till few, if any, alternate options remain; would be totally disconnected from reality and common sense, and would produce an even bigger mistake.»
• Pourtant, il semble bien qu’il s’agisse de la thérapie “Too big to fail?” , c’est-à-dire la “thérapie du dollar”, comme l’écrit le Daily Digest d’Air Force Magazine ce 7 août 2009, qui soit envisagée, d’après les déclarations du porte-parole du Pentagone le 5 août 2009. Le Daily Digest écrit:
«The Office of the Secretary of Defense is closely watching the progress of the F-35 stealth fighter program and is reserving the option of making additional funding adjustments should the F-35 joint estimating team, along with other Pentagon overseers, determine that the aircraft’s development is faltering, Pentagon spokesman Geoff Morrell said Wednesday.
»Already OSD has pumped extra billions into the program as part of Defense Secretary’s Robert Gates’ drive to solidify the F-35 as the tactical fighter of the future and bolster the aircraft’s test phase to avoid delays. Morrell said “the JET is in the process of doing more evaluations.” Its initial look last year predicted a two-year slip, something that the F-35 program office has disputed.
»Morrell said the JET’s new findings are expected soon. “If it is that they anticipate delays still, we have the ability to fund even more money to the test phase to buy back time and avoid delays essentially,” he said, reiterating that Gates has placed “enormous priority” on the success of the F-35 and will be “very, very much on top of that program as it goes forward.”»
• Donc, il s’agirait d’accélérer à tout prix le programme JSF pour rattraper le retard annoncé par l'équipe JET (avec d’autres faiblesses), que tout le monde semble désormais s’accorder à reconnaître. Comment l’accélérer? En mettant plus d’argent? Nous tombons dans le cas de figure détaillé par Johnson. Comment croire que plus d’argent éviterait nécessairement les problèmes techniques qui sont cause des retards, si cela ne les aggraverait pas au contraire?
On peut rappeler ces déclarations du député John Murtha, qui préside la puissante commission d’appropriation des forces armées à la Chambre (le 25 juin 2009, sur le Daily Digest de l’Air Force Association). (Le rappel est intéressant, notamment l'observation de Murtha que le F-35 semble se diriger vers les mêmes problèmes d'intégration de l'électronique que ceux qu'a connus le F-22, – un calvaire en perspective.)
«The F-35 is likely to have more growing pains, and as a result, Congress may slow the program down, according to Rep. John Murtha (D-Pa.), head of the House Appropriations defense subcommittee. Murtha on Wednesday told defense reporters in Washington, D.C., “I’m for the F-35; I’m for a big buy in the F-35, but I’m not necessarily for buying it this year, if it’s not ready.” He said the F-35 may be heading for a stall-out for technical reasons—he didn’t say what they might be—and if so, Congress may apply the brakes. “We haven’t decided it’s quite as bad” as the F-22’s avionics problems near the end of its development, “but it looks like it’s going in that direction.” He added that, even though the F-35 is a priority for the Administration, “we may not fund it at the level they would like.”»
• L’atmosphère autour du JSF est si sombre qu’on peut mentionner, comme cerise sur le gâteau, une interview de Tom Burbage, vice-président de Lockheed Martin, par Associated Press, le 5 août 2009. Lockheed Martin commence à lâcher du lest. Burbage y apparaît en position de suspect, sinon d'accusé, qui tente de prouver sa bonne foi, notamment en acceptant de prendre en compte, par les réponses qu’il fait, les constats du rapport JET. Burbage a récemment rencontré les dirigeants du Pentagone. Il est manifeste qu’il s’est entendu signifier que, désormais, c’est l’équipe JET qui mène la danse. Cette équipe doit visiter Fort Worth en septembre, et Burbage la recevra avec un tapis rouge, – sans savoir si l’argument est assez convaincant.
«The last JET report estimated that development would cost an additional $5 billion and take two more years to complete than estimated by the Pentagon's F-35 Joint Program Office (JPO). The panel is working on an updated report and will visit Lockheed's Fort Worth facility next month. The report said program estimates were too optimistic in four areas, including manufacturing schedule, software coding, engineering staff reductions, and the pace of flight tests.
»Burbage said Lockheed was able to demonstrate progress in the first three areas, but it would take until mid-2010 to be able to demonstrate better flight test productivity. “I think they would agree that we're seeing progress in three of the four areas, and I'm hopeful that the [Joint Estimating Team] will recognize that,” he said.»
Mis en ligne le 7 août 2009 à 17H48