Et si Gates restait en place?

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L’USAF se trouve brutalement placée devant une perspective cauchemardesque pour elle, après cet article du Sunday Times, effectivement publié hier. L’article avance qu’une idée d’Obama serait, dans l’hypothèse où il serait élu 44ème président des Etats-Unis, de demander à Robert Gates de rester à la tête du Pentagone. Il s’agirait évidemment, de la part du candidat, de montrer à la fois son esprit d’ouverture (vers les républicains, dont Gates est issu) et son souci de la sécurité nationale alors que la réputation de Gates est de plus en plus établie à Washiongton («Obama’s top foreign policy and national security advisers are pressing the case for keeping Robert Gates at the Pentagon after he won widespread praise for his performance. The move would be in keeping with Obama’s desire to appoint a cabinet of all the talents.»)

Quelques extraits de l’article:

«Richard Danzig, an adviser to Obama on national security and a former navy secretary, said: “My personal position is Gates is a very good secretary of defence and would be an even better one in an Obama administration.”[…] Ivo Daalder of the Brookings Institution in Washington, a foreign policy adviser to Obama, said: “Robert Gates is one of the best defence secretaries we have had in a long time and it makes a lot of sense to keep him.”

(…)

»Gates recently said Obama and John McCain, his Republican rival, were likely to take a “sensible approach” to Iraq because “the next president would suffer the greatest consequences if we do get the endgame wrong”. Retaining Gates would give Obama “cover” for adjusting his policy if necessary, while reassuring Republicans that withdrawing from Iraq would not imperil national security.

»Gates showed he was comfortable working with Democrats when he appointed John Hamre, a former senior official under Bill Clinton, to serve as chairman of the influential Defence Policy Board last year. He also appointed William Perry, a former defence secretary who is advising Obama, to the board.

»Gates has said he finds it “inconceivable” that he would stay on but Obama’s advisers believe he would respond to the call. “This is a man who believes in service,” Daalder said.

»James Carafano, a defence expert at the conservative Heritage Foundation in Washington, said Obama would be making a “smart move” if he asked Gates to carry on. “He has clearly adopted a mainstream course on national security that would be acceptable to either McCain or Obama.”»

Ces avis divers en faveur de la formule de le reconduire au Pentagone montre combien Gates est devenu, à Washington, une “personnalité consensuelle”. Il est vrai que, dans l’administration Bush, il tranche par son calme, sa mesure et son sérieux. Succédant à Rumsfeld et à sa gestion controversée, il a bénéficié du contraste qu’il a installé. Il semble manifeste que ce choix aurait le soutien d’une grande partie de l’establishment de sécurité nationale de Washington.

L’article envisage cette nomination essentiellement, si pas exclusivement du point de vue de la situation en Irak, qui reste la question brûlante par excellence. Mais il a d’autres implications, qui sont à terme plus importantes.

• La première, la plus immédiate, est qu’il rencontrerait le vœu de la direction militaire, qui s’est exprimé au moins à deux reprises, par la voix du président du JCS, l’amiral Mullen, pour presser le pouvoir politique pour une transition rapide et ferme entre les deux administrations. («Specifically, Mullen said he hopes that the change in politically appointed leaders will unfold at a wartime pace, rather than at a “peacetime” one. “I think it's important for us to get as many principals in positions as rapidly as possible in a time of war,” he said.») Le choix de Gates comblerait à cet égard les vœux des militaires, d’autant qu’un homme comme Mullen est parfaitement à l’aise avec Gates.

• La seconde, la plus importante, est que Gates apparaîtrait, avec une nouvelle nomination, comme l’homme qui veut réformer le Pentagone. Cette “ambition” lui est venue à cause des circonstances, notamment à cause de son affrontement avec l’USAF, y compris sur l’affaire du KC-45. Désormais, Gates passe pour un réformiste “dur”, qui a pris comme cible principale l’USAF. Ce dernier point, qui a été mis à son crédit, peut également apparaître comme un handicap, parce que le problème de l’USAF est un problème parmi d’autres de la crise du Pentagone, et que se concentrer sur ce dossier, où déjà des passions et des tensions extrêmes se manifestent, renforce les autres armes, qui rencontrent, elles aussi, de graves situations de crise. Cela et accroîtrait artificiellement les affrontements au coeur du Pentagone. Une confirmation de Gates pourrait avoir comme premier effet d’aggraver la crise de l’USAF, qui attend (et espère) évidemment son départ.

• Un travers de cette nomination, conséquence du point précédent, est que Gates, déjà engagé dans la bataille contre la bureaucratie du Pentagone (de l’USAF), est déjà perçu comme ayant des positions spécifiques. Il n’apparaîtra pas, bien entendu, comme un arbitre nouveau venu décidé à prendre l’entièreté du problème du Pentagone en compte. Il n’aura pas, pour lui, le choc d’une nomination nouvelle annoncée pour traiter en profondeur la crise du Pentagone.


Mis en ligne le 30 juin 2008 à 05h27