Folies pakistanaises

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L’Afghanistan étant devenu une “grande stratégie” dans la pensée américaniste, et ayant vu son théâtre s’étendre d’une façon absolument affirmée au Pakistan (concept dit “AfPak”, introduit par l’administration Obama), les ennuis vont avec. Ils deviennent considérables, avec le facteur nucléaire qui entre en jeu, et toutes les spéculations qu'on imagine. Cette aggravation des conceptions semble effectivement accompagner nécessairement la spéculation stratégique ainsi alimentée. Le résultat général d’une politique dont le but implicite fondamental était l’apaisement des conflits, jusqu’à un désengagement, aboutit pour l’instant à une aggravation manifeste et la menace d'une perte de contrôle.

Le site WSWS.org s’interroge, ce 5 mai 2009, sur les intentions des planificateurs US et sur les perspectives de leur politique. («The US political and military establishment and the American media have been mounting an increasingly shrill campaign to bully Islamabad into fully complying with US diktats in what Washington has redefined as the AfPak war theater.») Commentant un article du New York Times de David Sanger, du 4 mai, WSWS.org écrit:

«The article […] claims, notwithstanding Obama’s statement of last week affirming confidence in the Pakistani military’s control of the country’s nuclear arsenal, that there is a real and growing threat that Taliban or Al Qaeda operatives could snatch a Pakistani nuclear weapon or infiltrate its nuclear facilities.»,

En quelques semaines, la perception américaniste de la situation pakistanaise est devenue horrible. La situation est décrite comme si tendue que les rumeurs proposent désormais l’hypothèse d’un retour d’une dictature militaire, sous contrôle US, avec pour consigne de mobiliser le Pakistan contre les talibans, Al Qaïda & compagnie. On se réfère notamment à John Bolton, – c’est dire jusqu’où vont les références pour s’attacher à un des plus toqués parmi les plus anciens compagnons de route de GW, – qui s’affère à décrire cette hypothèse. RAW Story nous rapportait cela, le 1er mai 2009, à la suite d’un article du même Bolton dans le Wall Street Journal.

«Perennial Neoconservative gadfly John Bolton, who has often been accused of making exaggerated claims about Middle Eastern threats, is now suggesting that a military coup in Pakistan may be the only viable response to the growing power of the Taliban.

»In an op-ed for Saturday’s Wall Street Journal, Bolton writes, “To prevent catastrophe will require considerable American effort and unquestionably provoke resistance from many Pakistanis, often for widely differing reasons. We must strengthen pro-American elements in Pakistan’s military so they can purge dangerous Islamicists from their ranks; roll back Taliban advances; and, together with our increased efforts in Afghanistan, decisively defeat the militants on either side of the border. This may mean stifling some of our democratic squeamishness and acquiescing in a Pakistani military takeover, if the civilian government melts before radical pressures. So be it.”»

Il y a donc une aggravation conceptuelle, – la pire de toutes pour les cerveaux américanistes, – de la situation au Pakistan, vue de Washington. Les stratèges US tournent en rond pour résoudre cette quadrature du cercle qu’est la situation pakistanaise, lorsqu'elle est directement connectée à la situation afghane elle-même embourbée dans l’impasse qu’on sait. Ils tournent en rond depuis des années, suggérant toutes les situations possibles comme autant de solutions, les provoquant pour constater qu’elles mènent toujours à la même impasse, sans consentir jamais ni même imaginer d’en tirer la leçon, pour ne pas parler de la capacité à le faire.

On sait bien que la seule issue est le retrait et l’abandon de l’absurde politique expansionniste qui mène les pensées stratégiques américanistes (et occidentales, car celle des Européens, les Français en premier, ne valent guère mieux). On sait également que plus la situation empire, plus cette issue est difficilement applicable tant un retrait prendrait l’allure d’un désastre. Que dire de plus, sinon qu’ils ont les pièges et les impasses qu’ils méritent? Pour le reste, on observera que cette évolution pakistanaise qui prend un si vilain tour pourrait rapidement commencer à phagocyter la politique extérieure du brillant président Obama. Si Obama veut continuer à être “brillant”, il devrait envisager de prendre l’une ou l’autre décision audacieuse, qui ne pourrait être que dans le sens de la dynamique de contraction de sa politique extérieure qui s’est déjà manifestée sur d’autres théâtres. Obama approche du point où la suite de son mandat risquerait d’être compromis par l’embourbement dans les guerres héritées de son prédécesseur s’il ne trouve pas la volonté d’une telle décision, de cet aggiornamento nécessaire.


Mis en ligne le 5 mai 2009 à 13H15