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1288Le temps des rumeurs sur des grands projets réformistes, voire révolutionnaires, a commencé, à deux jours de l’élection présidentielle US. Jim Lobe, sur Inter Press Service ce 2 novembre, annonce l’apparition d’un courant général, d’une “nouvelle pensée” à Washington pour parvenir à un règlement général des conflits de ce que l’administration Bush a nommé la “Great War On Terror” (GWOT). Lobe présente ce courant comme représentant in fine un consensus dans l’establishment, c’est- à-dire comme devant exercer son influence quel que soit l’élu. Lobe parle d’un “transition team” proposant un tel schéma, comme d’un ensemble qui n’est effectivement lié à aucun des deux candidats. Il s’agirait de tenter de régler les principaux conflits et crises en cours (Afghanistan, Irak, Iran, conflit israélo-palestinien) pour permettre un repli général des USA (et des autres puissances qui lui sont associées) et une concentration sur les grands problèmes intérieurs et les crises systémiques en cours.
«A series of interlocking ‘grand bargains’ backed by the relevant regional players as well as major global powers – aimed at pacifying Afghanistan; integrating Iran into a new regional security structure; promoting reconciliation in Iraq; and launching a credible process to negotiate a comprehensive peace between Israel and the Arab world – must offer a very tempting, if extremely challenging, prospect to any new resident at 1600 Pennsylvania Avenue.
»Restoring stability to the Greater Middle East and reducing its on-the-ground troop presence would not only greatly reduce the 15 billion dollars a month Washington spends on military operations in Iraq and Afghanistan, the stress on the U.S. military, and the unprecedented hostility toward among the world's more than one billion Muslims. It would also permit the new president to focus on tackling the global financial crisis and the deteriorating economic situation at home, including key issues such as health care and the declining middle class, that the public believes, as made clear by this election campaign, have been too long neglected.
»While no senior policymaker has yet used the phrase ‘grand bargain‘, the notion that the problems faced by Washington in the Greater Middle East -- and thus, implicitly, the solutions, too – are deeply inter-connected. Gen. David Petraeus, who Friday formally took the reins of U.S. Central Command (Centcom) which covers the entire region and Central Asia and who is certain to have a major say in future strategy, clearly understands this as well as anyone. “Where Central Command can help is in looking at this overall challenge as a region, and helping regionally by looking not just at Afghanistan, but also of course Pakistan, at the Stans, Iran and even some of the other countries in the greater region that have been long involved, such as the Kingdom of Saudi Arabia and some of the Gulf states, and even leaders in Lebanon,” he told the New York Times in a September interview.
»In one indication of his thinking, Petraeus reportedly requested permission last week to meet with Syrian President Bashar al-Assad, the subject of a three-year-old diplomatic boycott by the Bush administration, only to be turned down by the White House.»
C’est une idée générale qui est logique, surtout depuis la crise financière enchaînant sur une crise économique; Lobe la qualifie également de “nouvelle pensée” (“new thinking”). Andrew Bacevitch, sur TomDispatch.com le 30 octobre, fait des observations dans le même sens, en constatant notamment que GWOT est une sorte de fiction stratégique qui implique des engagements ruineux, sans réel résultat sinon les tensions imposées aux USA. «A week ago, I had a long conversation with a four-star U.S. military officer who, until his recent retirement, had played a central role in directing the global war on terror. I asked him: what exactly is the strategy that guides the Bush administration's conduct of this war? His dismaying, if not exactly surprising, answer: there is none.»
Devant ce vide, Bacevitch en vient évidemment à la recommandation que le changement d’administration implique nécessairement de repenser de fond en comble la “stratégie” (la non-stratégie) US dans le monde. Sa conclusion va dans le sens des indications que donne Jim Lobe.
«Yet the existing strategic vacuum is also an opportunity. When it comes to national security at least, the agenda of the next administration all but sets itself. There is no need to waste time arguing about which issues demand priority action. […] To each and every one of these questions, the Bush administration devised answers that turned out to be dead wrong. The next administration needs to do better. The place to begin is with the candid recognition that the Global War on Terror has effectively ceased to exist. When it comes to national security strategy, we need to start over from scratch.»
Il est incontestable que la crise financière a activé un courant d’une “nouvelle pensée” à Washington. (Lobe remarque tout de même que cette “nouvelle pensée” existait avec le Irak Study Group, ou ISG, qui tenta sans succès en 2006 d’imposer une solution négociée à l’engagement en Irak, jusqu’au désengagement US.) Cette “nouvelle pensée” est effectivement basée sur un constat d’échec général de toute la “stratégie” (la non-stratégie) US depuis le 11 septembre 2001. Renverser tout ce courant, toute cette orientation, est un vaste projet et un vaste programme, dont l’évidence tombe par ailleurs sous le sens d’une simple analyse de bon sens. Il faut voir comment cette “nouvelle pensée” peut être mise en action, comment elle peut arriver à s’imposer comme une stratégie, d’autant qu’il s’agira d’une stratégie de retraite, à laquelle les adversaires des USA ne se prêteront pas nécessairement et qui ne sera pas sans provoquer des remous à Washington. Dans tous les cas, il s’agit d’une indication de plus que nous sommes dans des temps révolutionnaires et que ces temps s’ouvrent immédiatement, dès l’élection du 4 novembre, dès la “transition” qui n’en serait pas vraiment une, qui serait en réalité une prise immédiate du pouvoir par la nouvelle équipe devant la dégradation de la situation intérieure et la nécessité d’un retrait rapide de certains engagements extérieurs coûteux. Constatons donc l’existence de ce courant d’une “nouvelle pensée” prônant le désengagement US et observons ce que seront ses premières manifestations dans les semaines qui viennent.
Mis en ligne le 3 novembre 2008 à 07H09
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