L’absence de Poutine à Auschwitz : un cas passionnel

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L’absence de Poutine à Auschwitz : un cas passionnel

La question de la non-participation du président russe Poutine aux cérémonies du 70ème anniversaire de la libération du camp d’extermination d’Auschwitz par l’armée Rouge (l’armée russe) devient un cas polémique et passionnel qui peut avoir un effet de communication important. On a vu (le 20 janvier 2015) les ramifications très ambigües de cette affaire, avec ses effets de communication et aussi politiques, et d’autre part la position ferme qu’a pris la présidence russe contre les habituelles manœuvres du bloc BAO.

Il n’en reste pas moins que cette commémoration est chargée d’histoire et d’une intense émotion pour des catégories de personnes peu intéressées par les questions politiques actuelles, et qu’à cet égard l’absence du représentant suprême du pays dont l’armée libéra Auschwitz constitue pour nombre d’entre elles une circonstance malheureuse, sinon scandaleuse. Ainsi en est-il de l’article que publie un écrivain juif lituanien, qui se dit pourtant antipoutinien mais qui juge inacceptable l’absence d’invitation personnelle au président russe. Après avoir signalé un article d’il y a quelques mois (le 27 octobre 2014) du New York Times apportant des révélations sur l’utilisation de milliers de nazis par la CIA pendant la Guerre froide et s’être étonné de l’absence de réactions de diverses organisations juives, dont celles de Tchécoslovaquie qui approuvent la non-invitation de Poutine à Auschwitz, Pinchos Fridberg exprime sa colère du fait de cette non-invitation. (Russia Insiuder reprend, le 21 janvier 2015, le texte original [en russe] sous traduction anglaise.)

«I am a citizen of democratic Lithuania. This gives me the right not only to have, but also openly to express an opinion different from the official opinion. Auschwitz was liberated by the Red Army. My father was a private in that army from December 1941 until the last day of the war. He was wounded in combat three times while fighting on the front lines.

»I adduce here photocopies of two documents, miraculously preserved in my family’s archives. My father died in 1992. But if he were still alive today and learned that the country whose forces liberated Auschwitz will not participate in the commemorative events in 2015, I think he would be offended.

»“Putin must be invited to Auschwitz.” That is the title of a recent article by Efraim Zuroff, who is called “the last Nazi hunter.” Another recent publication is called “Boris Nemtsov: We cannot celebrate the liberation of Auschwitz without Putin”. Nemtsov can hardly be suspected of backing Putin. I agree with Zuroff. I agree with Nemtsov...»

On se trouve là, une fois de plus depuis qu’a éclaté la crise ukrainienne, devant les difficultés du bloc BAO de maintenir la position symbolique sacralisée de l’Holocauste et la dénonciation absolue du nazisme avec toutes les conséquences que cela suppose alors que cette crise ukrainienne place ce camp aux côtés de forces idéologiques et paramilitaires d’obédience néo-nazie. Les Russes, eux, conservent leur position qu’a parfaitement décrite Israël Shamir dans l’article cité ci-dessus, et qui s’appuie sur le rôle essentiel de l’Armée Rouge pendant la Deuxième Guerre mondiale. Ces conflits fondés sur la communication et le symbolisme permettent des interférences personnelles du type de celle de Pinchos Fridberg qui peuvent finir par gravement interférer sur les lignes politiques suivies. (On a déjà eu un autre exemple de cette sorte, concernant la situation ukrainienne, le 8 décembre 2015.)


Mis en ligne le 21 janvier 2015 à 17H52