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219126 janvier 2015 – Il s’agit de se saisir d’un texte pour y distinguer ce qui nous semble être une nouvelle situation de la France, – de la France officielle, de la France de ses élites-Système, – depuis 1/7 (la crise-Charlie)… Dans tous les cas et dit un peu différemment pour mieux fixer notre jugement, un texte où nous distinguons certainement “ce qui nous semble être la nouvelle situation où la France, essentiellement ses élites-Système, croit se trouver depuis 1/7”. Il s’agit là d’un jugement portant sur la psychologie, c’est-à-dire la perception inconsciente, à partir d’un texte qui a éveillé en nous cette démarche et qui nous paraît, nous-mêmes jugeant d’une façon intuitive, si représentatif d’une tendance qui englobe la psychologie pour alimenter plutôt l’affectivisme que le jugement. C’est de notre part une démarche effectivement intuitive et qualitative, nullement scientifique et quantitative ; nous attache bien plus le symbolisme des attitudes, des émotions et des jugements, que l’information, – dérisoire et mille fois rabâchée en lieux communs, – que l’événement prétendrait nous apporter.
(Quand nous considérons le monde que nous a donné la science et sa démarche scientifique et quantitative, nous nous jugeons justifié de suivre la voie alternative de l’intuition et du qualitatif. Nous ne pensons pas atteindre à l’objectivité, qui est le faux-nez des méthodologies scientifiques et postmodernes, notamment parce que nous n’y tenons pas une seconde puisque faux-nez il y a, et donc tromperie et manipulation de la “vérité de situation” au profit du renforcement d’une méthode faussaire. Nous cherchons et nous pensons approcher sinon atteindre une “vérité de situation” de la situation envisagée, qui est le but de la démarche intuitive et qualitative.)
Ce préambule fait comprendre que, comme il est dit dans le chapeau de présentation, il n'y a dans cette rapide enquête, comme on dit, nothing personal, – ni contre l’auteur, ni contre le journal (quoi que nous pensions par ailleurs de l’un et de l’autre, – et nous pensons certainement…). Même si, par notre enquête, nous suggérons ou laissons entendre quoi que ce soit au sujet du destin du “journal de référence” impliqué, c’est presque en termes techniques que nous faisons cette démarche, sans porter de jugement “moral” (certes pas), par conséquent sans porter la moindre condamnation ni proposer la moindre rédemption ; il s’agirait d’un constat implicite et si ce constat conduit l’esprit à des jugements sévères, c’est que l’évidence y invite. Nous aimerions que le lecteur nous lise comme si nous proposions une appréciation libérée de tout souci partisan par les caractères de l’intuition et le souci de l’appréciation qualitative, un peu avec le regard d’un ethnologue qui le serait à la façon du Lévi-Strauss que nous citions dans notre Chronique du 19 courant… du 19 octobre 2013. On sait que dans ce texte, nous citions Lévi-Strauss posant, sans démonstration scientifique, par ce que nous jugeons être une appréciation intuitive et qualitative, un jugement d’une tranquille mais extrême sévérité sur l’état de notre société, – l’ethnologue qui retourne contre le berceau de sa discipline pour étudier les autres, l’usage sélectif de cette discipline. Il juge le “juge scientifique” des autres que notre société met en avant, pour conclure que ce juge-là (nous-mêmes, sociétés du bloc BAO) est infiniment pire que les autres…
Voici le texte. Il est d’actualité et porte sur un événement jugé important dans l’absolu, qui est dérisoire et trompeur pour nous fournir un jugement de l’état du monde au contraire de sa prétention, mais qui est décisif pour juger de l’état de celui qui est juge. Il s’agit de la réunion de Davos, rapportée par un texte plus d’“atmosphère”, de “climat” que du contenu même des activités. Il est paru dans Le Monde daté du 24 janvier 2015 et concerne, d’une façon anecdotique mais néanmoins précisée l’accueil fait aux Français à Davos. Le titre indique l’intention et resserre l’objet de nos constats, comme s’il était écrit par un soupir de soulagement plus que par une plume : «Après deux ans de “French bashing”, l'image de la France redorée à Davos», signé par Cédric Pietralunga.
(Dès ces premiers mots apparaît la tromperie, certainement involontaire comme la plupart des constats que nous voulons faire. Le constat “deux ans de ‘French bashing’” relève d’un jugement postmoderne renvoyant à la référence du big Now [voir le 29 janvier 2014], parce que, depuis que Davos existe, le French bashing a été un des caractères de toutes les réunions, étant donné qu’il s’agit d’un facteur psychologique structurel entraînant un jugement structurel de cette sorte de réunions absolument déterminée par l’hyper-libéralisme et l’anglo-saxonnisme. Nous nous rappelons un économiste anglo-saxon faisant en 1996 un bilan des grandes tendances économiques en cours avec l’aide illustrée d’une carte où la France n’existait pas, fondue dans un espace économique européen flasque et glauque, où seuls l’Allemagne et le Royaume-Uni étaient signalées. De même, cette réunion (Davos) accouche-t-elle tous les 2-3 ans, selon ce que le discours-Système français en attend, de divers articles extasiés et également français nous annonçant la fin du French bashing... Bon, reconnaissons pourtant que les événements justifient cette fois qu’on s’arrête plus longuement au phénomène)
Nous donnons des extraits suivis du texte qui nous paraissent les plus significatifs de ce que nous voulons montrer.
«Quel changement de ton ! Oublié, ou presque, le “French bashing”, qui prévalait il y a encore quelques mois. À l’instar de la cote de popularité de François Hollande, qui remonte en France – elle part de très bas – l’image de la France se redresse, elle aussi, auprès des grands décideurs mondiaux. “Il y a encore beaucoup d’incompréhensions et parfois d’agressivité sur des sujets comme le droit du travail ou la fiscalité, mais ce n’est plus le ‘French bashing’ de ces deux dernières années”, assure un patron tricolore habitué de la station alpine.
»Bien sûr, il y a l’“effet Charlie”, qui génère une empathie pour tout ce qui est tricolore. “C’est fou, chacun des interlocuteurs que je rencontre commence par un speech de 5 minutes pour dire combien il est solidaire” après les attentats à Paris, qui ont fait 20 morts au total, raconte un autre PDG. Mais, assurent la plupart des dirigeants tricolores croisés à Davos, il y a également le début d’un changement de perception sur l’Hexagone. L’adoption du pacte de responsabilité, la mise en place du CICE et plus récemment la loi Macron sont autant d’éléments vus positivement par les chefs d’entreprise étrangers présents dans la station suisse. “Ils ne connaissent pas nécessairement tout le détail, mais ils ont le sentiment que la France est en train de bouger et cela les intéresse”, rapporte un consultant français. Mieux, certains dirigeants étrangers, et non des moindres, n’hésitent plus à dire publiquement tout le bien qu’ils pensent de l’Hexagone.
»“Vous avez parmi les meilleures start-up du monde, c’est impressionnant, explique par exemple John Chambers, le PDG de l’américain Cisco. La France est en train de prendre le mouvement, c’est un pays où il faut investir et nous allons le faire.” La démonstration tricolore au CES de Las Vegas, début janvier, a notamment impressionné la planète “high-tech” : la délégation française était la deuxième plus importante du grand rendez-vous de l’électronique grand public, avec 70 entreprises représentées.”
Suit la description d’un déjeuner du président-poire, inévitablement présent à Davos car il importait de ne pas rater l’occasion, avec vingt patrons du type très globalisé (Jack Ma [Alibaba], Guo Ping [Huawei], Paul Bulcke [Nestlé], Bader Al Sa’ad, le responsable du fonds souverain du Koweït [KIA], etc.). Suivent quelque blabla ministériel puis cette conclusion de la personnalité stéréotypée sinon archétypée pour ce cas, du directeur, de nationalité française, d’une entreprise de consultance financière anglo-saxonne (mariage rêvé, avec la dot mythique des deux origines, réalisant ce qu’il faut continuer à considérer comme l’American Dream, sinon le Globalized Dream ou même le System Dream de cette sorte de personnages et du sentiment dominant des élites-Systèmes plutôt parisiennes que française)…
«“La France a une carte à jouer”, confirme Pierre Nanterme, le patron tricolore du cabinet anglo-saxon Accenture, lui aussi ravi du changement de ton perçu à Davos. “Le monde n’a jamais été aussi complexe. Or, les Français sont parmi les meilleurs pour gérer la complexité, grâce à notre enseignement des mathématiques. C’est pour cela que nos multinationales s’en sortent très bien, parce que nous avons parmi les meilleurs dirigeants”, poursuit M. Nanterme, avant de lancer : “Ce monde est fait pour les Français !”»
Le constat est alors vite dressé à la lecture de ces quelques lignes, si l’on admet comme une évidence que chaque jour trouve démontré le fait que les pensées des élites-Système, des dirigeants politiques à la presse-Système en passant par le Corporate Power,
se trouvent dirigées selon les mêmes modes automatisés de raisonnement, utilisant comme matériels les mêmes constructions symboliques qui évitent de trop s’attarder à l’intelligence des situations. Le constat, c’est le «Bien sûr, il y a l’“effet Charlie”…», qui prend une place considérable dans notre commentaire ; le développement logique, c’est que 1/7, ou la crise-Charlie avec son fameux “esprit du 11 janvier”, a résonné dans le monde globalisé et le monde anglo-saxon de la City à Wall Street et au Financial Times, comme le ticket d’entrée d’une France définitivement, – “définitivement pour l’instant”, disons, – acquise au Système, dans le rangement agréé du Système. L’attentat a dressé le cadre de la “menace terroriste” qui est la formule universelle de pression depuis 9/11, pour affirmer sans nécessité ni de preuve, ni de démonstration, que la France avait décisivement rejoint le groupe de l’orthodoxie complète de l’hyperlibéralisme et de l’anglo-saxonisme. On dira que c’est déjà fait puisque bloc BAO il y a et que la France s’y trouve en bonne place ; mais le Système, spécifiquement ses employés anglo-saxons, a sans cesse besoin de preuves renouvelées de la bonne volonté française, hyperlibérale, atlantiste, etc., de cette bonne volonté qui se transcrit en comportements et attitudes d’enthousiasme et de jubilation bien français. (A la formule de l’ancien chef des services de renseignement extérieur soviétique Leonid Chebarchine, «L’Ouest n’attend qu’une chose de la Russie: que la Russie n’existe plus», répondrait cette formule pour la France : “Le Système n’attend qu’une chose de la France: que la France ne soit plus la France”.)
Pour le Système, 7/1 et la façon dont s’est manifestée la réaction de la France sont quantitativement, bruyamment, irrésistiblement le signe que la France est entrée dans la logique 9/11. On ne s’intéresse ici, dans le chef du Système, ni aux nuances, ni aux inflexions, ni aux tensions psychologiques et à leurs orientations diverses, mais au mouvement quantitatif de “ce qui fait masse” et au volume sonore de la narrative qui accompagne la chose (sans même s’attarder une seconde à son contenu). Ainsi est retrouvée la logique universelle du Système et est-il acté que la France s’y trouve attachée et entraînée. Cette logique est d’abord le déchaînement du Système (duplication à sa façon du “déchaînement de la Matière”), de Enron aux banquiers de Wall Street, du shale gas qui détruit les sous-sols au profit des spéculateurs aux OGM, de Google au nivellement globalisé par l’humanité robotisée, de la NSA qui surveille tout le monde comme chez elle à la CIA qui doit être comme chez elle à Paris. C’est cela à quoi acquiesce la France à Davos, et nullement l’inversion bienheureuse de la courbe du chômage et la “liberté d’expression” dressée contre la barbarie. 1/7 revu par Davos, c’est ce qui permet de tout faire avaler, couleuvre après couleuvre, à la “douce France”.
Nous notions dès le 9 janvier 2015 : «A cette émotion [de l’attaque 1/7] devait correspondre une riposte psychologique puissante de la direction politique à cette attaque. Cela fut fait sur le thème de l’“unité nationale”, le rassemblement de la nation, etc. Cette riposte psychologique est compréhensible quoique de l’ordre du symbolique. Mais elle est aussi dans un champ contradictoire mortel, à la lumière des propos de Wismann... Si la société est “atomisée”, si les références structurantes sont désintégrées, comment espérer qu’un appel à la référence structurante qu’est la nation puisse avoir le moindre effet, non seulement opérationnel, mais psychologique?»
Quiproquos comme d’habitude, dialogues réduits aux monologues en action... Les Français ont manifesté pour la liberté de penser, pour l’unité nationale, pour l’affirmation identitaire française “pour tous”, et ils vont se retrouver avec un aller-simple pour le grand traité transatlantique TTIP (notamment mais faisons-en un symbole). On y ajoutera le domaine des relations avec la Russie où le Système réclame une férocité absolue jusqu’à la destruction même de la Russie (voir le 22 janvier 2015), alors que la France voudrait retrouver une certaine entente de coopération On n’est pas au bout de quiproquos, et le brave Hollande retrouvera vite, à la lumière de la déception populaire, ses courbes de sondage d’avant 1/7... C’est qu’il y a, dans ces “retrouvailles” étranges entre la France et le Système globalisé, un élément psychologique faussaire qui ménage de terribles désappointements et de très graves désenchantements. (Chaque génération d’enthousiasmes globalisé et pro-américanisé a connu cette sorte d’avatars mais il se trouve que, cette fois, les enjeux sont extrêmement importants pour tous les acteurs.)
C’est ici que nous voulons passer au second enseignement que nous tirons de ce seul texte, dans la mesure où il rend parfaitement compte d’un “climat” de Davos. A l’aspect politique de cette climatologie, nous passons à un aspect beaucoup plus psychologique de la même climatologie, beaucoup plus symbolique, beaucoup plus insaisissable et gros de formidables réactions négatives par désappointement et autres …
Faisons une analogie pour comprendre ce qu’est Davos et, au-delà, de quoi est faite la fascination magique qui se dégage du rapport que font nombre de ceux qui y vont comme observateurs, dont notre auteur du Monde si plein de fougue et d’enthousiasme à peine contenus… Nous proposons expliquons cela par une analogie que nous nommons l’analogie de l’Apalachin meeting.
Le 14 novembre 1957, l’événement connu sous le nom d’Appalachin meeting se tint dans le lieu-dit Appalachin, au sud de New York, dans la propriété d’un boss de la Cosa Nostra, Joseph “Joe the Barber” Barbara. La réunion, – le “séminaire”, si l’on veut, – réunit plus d’une centaine de dirigeants et cadre de Cosa Nostra, – surnom officiel de l’énorme structure du crime organisé italo-américaine héritée de la Mafia italienne, établie comme telle en 1930 par Charles Lucky Luciano et qui subsiste aujourd’hui selon des formes adaptées aux mœurs postmodernes. En langue native, appalachin signifie “lieu d’où vient le messager”, ce qui correspondrait parfaitement à Davos. La différence tient aux circonstances : il n’y eut qu’un seul Appalachin meeting interrompu par l’intervention du FBI, parce que J. Edgar Hoover, qui avait jusqu’alors ignoré volontairement l’existence de cette structure colossale, ne pouvait plus rester dans cet état de déni. (A peu près la moitié des participants furent arrêtés, les autres réussissant à fuir ; ils furent condamnés, mais diluèrent leurs peines diverses en allant en appel, ou bien en obtenant de courtes peines de prison, dans des établissements pénitenciarisés disons, tenus par leur organisation et d’où ils pouvaient continuer leurs activités). Au contraire, l’Apalachin meeting de Davos se tient chaque année, sans interruption, sous la protection de tous les organes de sécurité… L’analogie inversée vaut parfaitement à cet égard.
Mais, outre l’intervention du FBI, l’Apalachin meeting avait été marqué par des présences diverses, avec des problèmes divers à régler, le tout représentant une sorte de réunion “globalisée” du crime organisée à l’échelle des USA. Un grand absent, dont la présence symbolique et inspiratrice continuait à peser sur tous, c’était celle de leur parrain “spirituel” à tous, – sorte de capo di tutti capi d’honneur, – Charles Lucky Luciano exilé en Italie par arrangement avec les autorités US. L’absence de Luciano pesant pourtant comme une présence symbolique donnant tout son sens à Cosa Nostra représentait si l’on veut le symbole de l’American Dream du crime organisé réalisé dans toute sa diversité. De même, et voilà l’analogie justifié, c’est l’American Dream du Corporate Power globalisé qui est la référence symbolique qui donne tout son sens et sa puissance symbolique à Davos. Et l’American Dream, certes, c’est le Système…
Ce que nous voulons signifier par là, et que l’on ressent dans le texte mentionné, c’est que Davos représente d’abord, et particulièrement pour les Français, une sorte de représentation de l’American Dream – dans la version modernisée certes, devenue plus justement Globalized Dream ou System Dream, – mais se référant toujours à l’American Dream que la France fut la première à réaliser, dès 1776 dans les salons parisiens (voir La Grâce de l’Histoire, Tome I, Deuxième Partie, «Le “rêve américain” et vice-versa»). C’est une incursion hors du vrai monde (pourtant déjà lourdement marqué par les narrative dans tous les sens) suivant le vertige français de 1/7. (Cela justifie de façon tout à fait convenable notre titre sur l’“im-Monde, référence étant faite alors à la véritable étymologie du mot “immonde” : immundus, littéralement “hors du monde”, avec mundus dans le sens de “monde”, ou “bon arrangement du monde”, le préfixe im- signifiant “hors de...”.)
Les Français partis en expédition à Davos ont donc tout oublié, retombant décisivement dans les rets de l’American Dream, – devenu Globalized Dream ou System Dream, mais qu’importe le vin ou qu’importe le rêve pourvu qu’on ait l’ivresse. Ils ont tout oublié, des 1% détenant la moitié de la richesse du monde en laissant les miettes aux 99% restant, du monstrueux système bancaire qui étrangle le monde, de ce système déchaîné qui détruit l’équilibre et la beauté du monde, de cette course folle à l’autodestruction catastrophique, tout cela dont Davos est à la fois l’illustration, le foyer et la perspective, – et tout cela pour le prix d’une ivresse pour “leur” American Dream, version postmoderne devenue Globalized Dream ou System Dream.
Ce ne sont pas des mauvaises personnes qui se sont rendues à Davos, notamment dans le chef des Français à qui l’on fit un triomphe, et ces personnes enivrées de ne plus être l’objet de la lapidation internationale et anglo-saxonne du French bashing. Ce sont des personnes à la psychologie fatiguée, épuisée, à la mesure de cette torsion qu’ils imposent à eux-mêmes et à leurs concitoyens depuis tant d’années pour faire correspondre la France à ce modèle globalisée qui promet le bonheur postmoderne et l’“éternel présent”. Leur faute n’est même pas le péché irrémédiable propre à la religion chrétienne, mais celui, beaucoup plus nuancé et très humain, et très actuel, marqué par la faiblesse, la défaillance, et bien entendu l’inversion qui transforme la perception, que proposent les néoplatoniciens de Plotin, – c’est-à-dire “faute” plutôt que “péché”. «II semble donc que la faute selon Plotin soit moins révolte et défi que vertige et lassitude. Elle est inversion ou aversion par défaillance, non par malice proprement dite. Elle est insuffisance noétique beaucoup plus que refus éthique. En cela elle diffère du péché selon le christianisme. Ce péché est en effet une sorte d’infini privatif et d’absolu négatif. Il est d’abord péché de l’esprit; le péché de l’ange précède et provoque celui de l’homme. Sous les formules semblables dont usent parfois néoplatoniciens et chrétiens se révèle sur ce point capital un bon désaccord.» (Jean Trouillard, dans «L’impeccabilité de l’esprit, selon Plotin», Revue de l’histoire des religions, 1953.)
“Bienvenus à bord” a-t-on dit aux Français arrivant à Davos, président-poire en tête. Ils étaient fascinés, ravis comme on est enchanté par un sortilège, ivres de cette vanité conformiste de celui qui se découvre classé si bon élève que le prof l’inviter à se mettre sur un des premiers rangs de la classe, au moins pour le cours de laïcisme globalisé. Ils n’espéraient plus cette sorte d’accueil, de Valls à Fabius en passant par Hollande, les provinciaux soudain transportés aux sports d’hiver luxueux de la grande station suisse. Diable, il faut avouer que c’est impressionnant d’être hissé de cette façon, avec les honneurs, à bord du Titanic qui fonce majestueusement et avec une certitude toute britannique sur les flots merveilleusement transatlantiques. Bien entendu, il n’est pas question qu’ils aient leur mot à dire pour changer de cap et d’ailleurs l’idée ne leur en viendrait pas une seconde : le Titanic tient à son iceberg, comme nous apprend l’histoire maritime et navale des entreprises de la modernité.
C’est dire si nous entendrons parler à nouveau de la France, une fois Davos digéré à la sauce 1/7 et l’ensemble revenu aux crises courantes... A très bientôt, par conséquent.
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