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1122Faut-il appeler cela la “bataille de Sirte” ? Dans tous les cas les combats y font rage et les “rebelles” ne cessent de lancer des “offensives finales” successives. Jason Ditz, de Antiwar.com, résume le propos, le 7 octobre 2011, à partir de divers textes, dont celui du Guardian du 7 octobre 2011.
«In comments today, Libyan rebel commanders announced that they have launched their “final assault” on Moammar Gadhafi’s hometown of Sirte. If this story sounds familiar it is because this is at least the third “final assault” on the city announced in the past few weeks. The commanders once again expressed confidence in their chances, announcing “today we will finish.” By the evening, however, it was clear that once again this was not the case, as the invading rebels were met with fierce resistance.»
La veille, le 6 octobre 2011, le même Jason Ditz décrivait certaines des “performances” des “rebelles” frustrés de leurs échecs de Sirte, contre des villages voisins. («The attacks on Moammar Gadhafi’s hometown of Sirte haven’t gone particularly well, but the nearby village of Abu Hadi was captured pretty quickly. So while Misrata’s rebels are still waiting to conquer Sirte, they’re taking out their frustrations on Abu Hadi instead. Reports have fighters hurling grenades into abandoned homes, looting anything of value, shooting animals and burning buildings.») Scènes tristement habituelles dans cette sorte de conflit, bien loin de l’image d’Epinal dont le bloc BAO, particulièrement la France, s’est satisfait à propos de cette guerre évidemment “juste”, avant de clore le chapitre par les mots “victoire en Libye” (et de se tourner, pour la France, vers l’importante campagne présidentielle qui semble désormais résumer, pour les “élites” françaises, l’essentiel de la crise du monde)…
Derrière ces affrontements qui se poursuivent, à Sirte et dans d’autres points de cette région occidentale de la Libye, c’est toute la situation de la crise-conflit dans ce pays qu’il convient de survoler, avec un examen dans un sens extrêmement pessimiste. Des informations venues de source européenne institutionnelles, non directement parties au conflit mais fortement impliquées dans ce qu’on nomme curieusement “reconstruction” (l’Europe institutionnelle est fortement engagée à cet égard en Libye) donnent des indications extrêmement préoccupantes de la situation dans le pays. Le mot clef, qui est souvent répété et qui résume les craintes générales, c’est “irakisation” : le pays, la Libye, va-t-il sombrer dans un processus d’“irakisation”, comme ce fut le cas en Irak en 2003-2006 ?
La situation intérieure, du point de vue politique, entre les différentes tendances “rebelles”, est extrêmement fluide et incertaine. L’un des thèmes favoris de la propagande BAO (franco-britannique et otanienne) était qu’une fois la résistance des kadhafistes vaincue, voire Kadhafi neutralisé d’une façon ou d’une autre, la situation politique se stabiliserait et le processus de “reconstruction” se mettrait en route. Selon les sources citées, c’est exactement le contraire qu’on risque de connaître : les combats maintenant encore une certaine unité opérationnelle de façade, on pourrait craindre des affrontements internes très violents lorsqu’ils seront terminés. Ainsi le colonel Kadhafi reste-t-il utile à son pays puisque sa résistance semble être le facteur qui empêche encore de sombrer définitivement dans le chaos... Les divisions se manifestent de façons diverses, y compris à l’intérieur des différentes factions. Par exemple, si certaines autorités du CNT, des ministres et leurs proches essentiellement, sont à Tripoli, une partie importante de leurs bureaucraties, avec d’autres dirigeants, est restée à Benghazi. L’on y distingue la formation subreptice d’un véritable centre de pouvoir concurrent, avec la possibilité d’éventuellement créer à Benghazi un pouvoir formel concurrent du CNT lui-même.
Bien entendu, il y a les autres factions en action, qui jouent chacun leur jeu avec des interférences des divers pays du bloc BAO (nous allions dire “les diverses factions” du bloc BAO). La politique US reste à cet égard toujours aussi profondément mystérieuse, les USA entretenant des contacts actifs avec les islamistes, les “Frères musulmans” du domaine, lesquels sont vue avec la plus intense suspicion par la faction convenable du CNT et leurs alliés anglo-français (et germanopratins, certes). Les USA entretiennent en général des relations suivies avec les divers “Frères musulmans” et autres islamistes non moins divers des pays “libérés” du “printemps arabe”, et, sans doute, des autres. (Vieille tradition, dont il ne faut pas s’effrayer jusqu’à s’y référer pour suggérer la construction d’un vaste complot qui finirait par nous emporter. Les USA ont toujours joué, surtout avec les islamistes, et cela étant d’ailleurs la cause initiale de la première guerre en Afghanistan en 1979 et de la création d’al Qaïda, triple et quadruple jeu, voire même un jeu pentagonal [nous voulant dire : selon la figure géométrique du polygone à cinq côtés]). A cet aspect de confusion typiquement américaniste ajouté aux normes libyennes, on ajoutera un autre aspect du même type qui est la recherche effrénée, avec interférences diverses de type US, aussi bien du viol de la souveraineté que de la corruption tous azimuts, pour certaines armes du régime Kadhafi dont on craint la prolifération, particulièrement les missiles sol-air portables. (Les gros bras du Pentagone se sont emparés de l’affaire, dont le général Carter Ham, qui dirige African Command, confirmant la chose lors d’une conférence au CSIS, le 4 octobre 2011 : «Africa Command chief Gen. Carter Ham said his organization picked up "worrying indicators" that some of the unaccounted for Libyan stockpiles of Grinch SA-24 and SA-7 shoulder-fired rockets are already gone, Ham said today at the Center for Strategic and International Studies.»)
“Irakisation” ? Quoi qu’il en soit, la Libye suit une évolution impeccable pour la conduite vers ce qu’on nomme en langage stratégique postmoderniste “a failed state”. On observera que, si l’expression signifie “un Etat en faillite”, elle implique, dans son emploi courant qu’on évite le passage coûteux par la catastrophe économique et financière, comme c’est la coutume dans les pays faillis du bloc BAO.
Mis en ligne le 8 octobre 2011 à 11H48