Le 2012 de Justin Raimondo et Ron Paul

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Parmi les prévisions pour 2012, celles de Justin Raimondo, chroniqueur toujours intéressant et d’une opinion placée à la confluence de tensions caractérisant notre crise générale. Dans son texte du 28 décembre 2011 (sur Antiwar.com), Justin fait sept prédiction majeures, qu’il note par probabilités en termes de pourcentage. Deux probabilités sont pratiquement considérées comme acquises par Raimondo, classées dans la zone des plus de 90%. La plus forte probabilité (99%) est “hors-concours” : “La détérioration des relations des USA avec la Russie” n’est pas une prédiction, parce que “c’est d’ores et déjà une réalité”, et sa poursuite est d’une façon générale considérée comme une évidence. Aussi est-ce à la seconde “prédiction” que nous nous intéresserons, en la tenant comme la “prédiction” en tant que telle la plus probable selon Raimondo.

Il s’agit du destin de Ron Paul, et Justin Raimondo note sa “prédiction” à 95%. Il s’agit de l’affirmation que Ron Paul ne sera pas désigné comme candidat républicain, dans l’hypothèse où son parcours dans les primaires l’y conduirait pourtant. Pour Raimondo, une candidature indépendante de Ron Paul est alors inéluctable.

«The only antiwar presidential candidate will be continuously smeared, demonized, and eventually driven out of the GOP by the party Establishment – If Ron Paul even comes close to winning Iowa, he will have everything but the kitchen sink thrown at him by a grand alliance of neocons, Obama cultists, and Beltway fake-“libertarians.” First they’ll blame the weather, then they’ll blame the “fanaticism” of Paul’s army of volunteers, and finally they’ll blame the voters, who are supposedly so poisoned by “resentment” that they must be declared officially mad. Delegates won fair and square will encounter “problems” with their credentials. Gloria Borger will team up with a famous psychic to divine who really authored the infamous newsletters, and fresh non-scandals will be unearthed by enterprising “journalists.” In the end, a coalition of neocons and Romneyites will issue an encyclical, excommunicating Paul and his supporters from the Republican party – and opening the way for a third party bid that will threaten to put the GOP nominee in third in November. Probability: 95%.»

Si l’on retient avec insistance cette “prédiction”, c’est pour plusieurs raisons, qui méritent d’être détaillées.

• Raimondo est un proche de Ron Paul. Il l’est politiquement, mais aussi personnellement. Ron Paul est souvent dans les colonnes d’Antiwar.com, comme contributeur. On ignore si Raimondo fait ainsi une “prédiction” personnelle pure ou bien s’il y glisse quelques informations objectives recueillies auprès de Paul ou de l’entourage immédiat de Paul. Nous aurions tendance à envisager le deuxième terme de l’alternative, surtout dans le sens où le camp Ron Paul laisserait nettement penser que le candidat est de plus en plus déterminé à tenter une candidature indépendante s’il rencontre des difficultés du côté républicain. Ce dernier point est de plus en plus perceptible, parallèlement à la radicalisation de facto anti-establishment républicain du candidat.

• Dans ce cas le pronostic de Raimondo est raisonnable, lorsqu’il affirme qu’avec une candidature indépendante de Ron Paul, le seul événement considéré comme “probable”, sinon acquis, serait la relégation du parti républicain à la troisième place. Du coup, l’enjeu quasiment assuré d’une candidature indépendante de Ron Paul ne serait plus, comme on le dit souvent du côté des caciques républicain, de “faire gagner” Obama, mais plutôt de menacer d’installer une situation politique totalement inédite. Une troisième place pour le candidat républicain orthodoxe constituerait en soi, quel que soit le résultat de l’élection, un formidable séisme politique aux USA. Le “parti unique” du Système (démocrate-républicain) se trouverait scindé en deux, avec un parti “indépendant” acquérant des dimensions nationales considérables sans la moindre représentation parlementaire. (A moins, bien entendu, qu'un important parti indépendant puisse s'organiser et présenter des candidats pour les élections législatives en même temps que les présidentielles, – mais c'est extrêmement improbable et cela ne porterait encore que sur une représentation très partielle des Chambres, à cause de l'extension très limitée du renouvellement pour cette année.) Aux USA, pour une population qui se trouve dans un état d’exacerbation extrême, cette situation constituerait un cas potentiel d’insurrection, selon les circonstances dont on sait qu’elles ne tendent pas à décourager cette sorte de développement.

• Dans tous les cas, si Paul devait se lancer dans une candidature indépendante dans le cours de la campagne, on trouverait d’ores et déjà une situation propice à des troubles civils graves dès le cours de cette campagne. C’est le cas général, que nous signalons souvent, où une candidature Ron Paul, avant même d’arriver au terme de sa campagne, constituerait un motif de trouble qui pourrait interférer gravement, sinon décisivement, sur le processus électoral, cela pouvant conduire à une situation de désordre ou à des mesures autoritaires de l’administration en place, elles-mêmes génératrices potentielles de désordre.

• Bien entendu, des spéculations ont déjà cours sur cette hypothèse de “Paul candidat indépendant” et sur ses chances de victoires. Nous signalons ici une analyse du 22 décembre 2011, de James Jaeger, de The DailyBell.com. (Un site libertarien britannique, partisan d’un marché libre intégral, résolument pro-Ron Paul et anti-establishment anglo-saxon, qui développe en général une approche politique et théorique très sérieuse, et qui est largement lu.) Jaeger estime que Paul a de très sérieuses, de très fortes chances de gagner, en cas de triangulaire” présidentielle. (A noter que Ron Paul a toujours remarqué qu’il lui paraissait plus facile, pour son compte, de vaincre Obama avec lui-même comme candidat républicain, que de se faire désigner comme candidat républicain. Ce jugement vaut aussi bien pour une candidature indépendante, que Paul n’a pas (encore) officiellement envisagée, notamment en fonction de l’exceptionnelle médiocrité des candidats républicains, – un très grand cru, indeed.) Appréciation centrale et comptabilisée de Jaeger :

«But here's the joker: Ron Paul does not even need the GOP to win the general election. If he were to walk away for a third party, he would take at least 12% of the Republican vote with him. He would also take another 15% from the Independents and at least 11% from the Democrats. This would give him 38% – enough of the vote to win the Presidency in a three-man race.»


Mis en ligne le 29 décembre 2011 à 07H36