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1716Revenons un peu en arrière… Le 30 juin 2012, le site DEBKAFiles donnait un large écho à un article de la revue Aviation Week & Space Technology (AW&ST), dont on connaît la réputation de très haute technicité et de professionnalisme avérée. (Toutes ces vertus soumises tout de même, nous ne pouvons l’oublier, au filtre-Système d’orientation de la pensée.) DEBKAFiles modifiait un article déjà en ligne (sur une attaque saoudienne contre la Syrie prévue ce même 30 juin 2012, – oups) en le “chapeautant” de l’information d’AW&ST sur le plan d’attaque US en préparation…
«The new Aviation Week reports: “Evidence is mounting that the US defense community and the Obama administration view 2013 as the likely window for a bombing attack on Iran’s nuclear and missile facilities. It could be earlier, timed to use the chaos of the Syrian government’s fall to disguise such an attack…” According to the journal, “Iran’s intransigence over shutting down its uranium-enrichment program will not buy it much more time… The tools for such an attack are all operational” and the US is coming around to suspect that Iran has already conducted its first nuclear test in North Korea…»
AW&ST avait publié effectivement le 25 juin 2012 (accès payant) un long article à des “plans d’attaque” de l’Iran. Diverses considérations politiques, techniques, etc., étaient envisagées, sans grande originalité bien que truffées de promesses de l’emploi d’armes exceptionnellement efficaces. Trois “vétérans de la planification de l’USAF”, selon la terminologie adoptée dans l’article, donnaient leur avis sur la forme de l’attaque, qui apparaissait dans l’article comme le pivot de la réflexion, et reflétant par des canaux indirects la situation et l’appréciation de l’USAF à ce point de la prospective d’une attaque, dont la planification était donnée comme fixée. On notait particulièrement ce passage où l’un des experts donne des précisions sur les modalités de l’attaque, qu’on envisage idéalement pour 2013, – ou bien avant, si le “chaos syrien” le permet (comme précisé par DEBKAFiles).
«“We would employ a totally stealthy force of F-22s, B-2s and Jassms [Joint air-to-surface standoff missiles] that are launched from F-15Es and [Block 40] F-16s,” says the third planning veteran. “We would give Iran advanced warning that we will damage and likely destroy its nuclear facilities. It is not an act of war against Iran, the Iranian people or Islam. It is a pre-emptive attack solely against the nuclear facilities and the military targets protecting them. We will take extraordinary measures to protect against collateral damages.”»
Ce qui fait prendre au sérieux ces précisions, c’est le mélange surréaliste de précisions techniques de destruction extrêmement efficace, ou annoncée comme telle, et le message extraordinaire du point de vue de la communication selon lequel cette attaque n’est pas un acte de guerre, ni une attaque contre l’Iran, contre le peuple iranien, contre les musulmans, etc., – bref, une attaque qui n’est pas une attaque, qui est simplement une sorte de colis postal un peu explosif, – voilà tout... Le deuxième point (l’humanité exceptionnelle et le caractère hors-souveraineté du pays attaqué) est en effet caractéristique de la méthode Obama, qui est de faire des guerres et des agressions pires qu’à l’époque Bush, en développant une dialectique de communication humanitaire extraordinairement lénifiante et suivant une narrative aux dimensions absolument considérable, de facture complètement hollywoodienne (sans doute pour remercier Hollywood de ces soutiens financiers pro-Obama)… Ce serait donc une attaque-qui-n’est-pas-une-attaque.
…Là-dessus ont note autre chose, bien entendu : ce serait une attaque “entièrement stealth” (furtive, selon le nom des technologies furtives), avec B-2 et F-22, les deux seuls avions de combat entièrement stealth de l'USAF, en attendant le mirifique JSF (F-35). On se rappelle alors que des F-22 ont été effectivement déployés dans la zone (voir le 2 mai 2012). Mais on se rappelle aussi que le F-22 n’est pas au mieux de sa forme. Ainsi en venons-nous à la nouvelle du jour, qui éclaire l’ensemble des plans de l’USAF et de l’enthousiasme de DEBKAFiles d’une lumière bien différente. Il s’agit de l’annonce qu’un nouvel incident grave s’est produit avec un F-22, à cause de cette “crise de l’alimentation en oxygène” qui justifie des interdictions de vol successives du F-22 et, plus récemment, des autorisations de mission dans des conditions extrêmement restrictives. Cela réduit brusquement à rien l’annonce désormais prématurée, faite il y a trois semaines, selon laquelle l’USAF avait déterminé la cause de ses problèmes d’alimentation en oxygène, et qu’une procédure nouvelle avait été aussitôt mise en place pour les éviter ; manifestement, la procédure n’a pas suffi. (On notera que cette affaire d’alimentation en oxygène est si importante qu’elle touche aujourd’hui l’U.S. Navy, qui emploie le même système d’alimentation pour son F-18. Comme cela est annoncé ce 10 juillet 2012, l’U.S. Navy est en train de prendre des mesures importantes pour donner à ses pilotes des moyens d’alarme au cas où le système d’alimentation en oxygène donnerait des signes de faiblesse. Néanmoins, le F-22 reste un cas en pointe, les F-18 ayant jusqu’ici évité des incidents graves, et, surtout, n’ayant à aucun moment été handicapé en tant que flotte d’avions de combat opérationnelle, par cette affaire. Au contraire, le F-22 est directement touché, essentiellement à cause de sa structure de “système de systèmes” qui rend l’ensemble de l’appareil beaucoup plus vulnérable à une défaillance d’un de ses composants.)
Donc, à propos de ce nouvel incident grave concernant le F-22, Danger Room écrit, ce 10 juillet 2012 :
«The Air Force swears it’s working like mad to figure out why its premiere stealth fighter, the F-22 Raptor, is choking its pilots. They better: Just on Friday, another Raptor pilot experienced shortness of breath while flying his aircraft over Hawaii. Luckily, he landed safely. But the hypoxia mystery — which the Air Force plans to spend much of the year inspecting — continues: This was the 23rd unexplained “hypoxic incident” since the Raptor was introduced in 2005.»
Bien entendu, cela signifie que le F-22 Raptor est plus que jamais soumis à la plus extrême surveillance, et à des conditions draconiennes de limitation de vol. C’est alors que surgit le problème stratégique : comment concevoir une offensive stratégique basée essentiellement sur les deux modèles tout-stealth de l’USAF, les 20 B-2 et les 184 F-22 disponibles, alors que l’un des deux éléments est soumis à de telles restrictions de vol ? Or, l’emploi des avions tout-stealth n’est pas un simple “caprice technologique”, disons une pulsion moderniste accessoire qui pourrait aisément passer au second rang avec la décision d’utiliser des avions de la génération précédente (F-15, F-16, etc.), – lesquels ne sont présents dans le scénario que comme lanceurs, à distance, du missile air-sol JAASM, devenu l’arme guidée principale de l’USAF pour ses attaques. Au contraire, il s’agit d’une planification délibérée, fondée sur la croyance (largement illusoire) de l’impunité de la formule stealth au repérage radar, – donc à la défense anti-aérienne, poursuit le raisonnement… En effet, à la base de cette attitude qui renvoie à l’obsession idéologique de l’USAF pour la technologie furtive, il y a la préoccupation opérationnelle, qu’on pourrait transcrire psychologiquement par l’appréciation d’une peur presque panique d’être confronté à des défense anti-aériennes largement approvisionnées et contrôlées par les Russes. L’USAF ne doute pas, en effet, que les Russes seraient indirectement présents, par leur participation majoritaire à la défense anti-aérienne, dans le cas d’une attaque de l’Iran. Nous sommes persuadés que le même le même raisonnement prévaut, en cas d’intervention décidée par le pouvoir politique, pour la Syrie, qui est l’objet des mêmes craintes paniques de la part des chefs militaires US (voir le 8 mars 2012 et le 8 mars 2012). Cela implique, à notre sens, que les mêmes conditions de planification et de programmation seraient choisies pour une attaque contre la Syrie, – malgré le fait, largement démontré, que la soi-disant invulnérabilité de la formuler de la technologie furtive est extrêmement contestable, et largement battue en brèche par certaines dispositions techniques spécifiques...
On comprend, dans ces cas qui se réduisent à ce besoin obsessionnel de la technologie furtive, que le problème du F-22 est un facteur fondamental pour les plans de guerre US. Le F-22 tient une place centrale dans ces plans. Comment envisager son emploi dans les conditions qu’on connaît ? Comment envisager une attaque tout-stealth sans le F-22 ? Comment envisager une attaque qui se ferait en dehors des normes magiques de la technologie furtive ? Autant de questions intéressantes.
Mis en ligne le 12 juillet 2012 à 11H18
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