Le “Pearl Harbor” de la CIA: des conséquences systémiques…

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L’attaque menée contre le camp Chapman de la CIA, en Afghanistan, à la frontière du Pakistan (voir notre Bloc-Notes du 2 janvier 2010), est décidément appréciée comme un terrible coup porté à l’activité de l’Agence, en Afghanistan certes, mais peut-être avec d’autres prolongements. Un article du Times du 3 janvier 2010 donne certaines indications de cette gravité, en citant notamment l’ancien officier de la CIA Michael Scheuer: «Eight years into the war, the agency is still desperately short of personnel who speak the language or are knowledgeable about the region. “It’s a devastating blow,” said Michael Scheuer, a former agent and head of Alec Station. “We lost an agent with 14 years’ experience in Afghanistan.”»

@PAYANT Ces remarques sont une indication très parcellaire parmi d’autres d’un malaise profond qui affecte la CIA, mais aussi les réseaux de renseignement US en général, d’autres agences et services. Une hypothèse, ou, pour certains, une information bien réelle venue de sources de la CIA, est que l’homme qui a commis cet attentat était un collaborateur de la CIA d’une très grande importance, qui s’est avéré par conséquent être un agent double déterminé à commettre l’attentat. (Sa très grande importance serait justement la cause de la facilité avec laquelle il a pénétré dans la base de la CIA et s’est réuni avec d’autres officiers de l’Agence.) Les mêmes sources citées, qui rejoignent le jugement de Scheuer, estiment que ce très grave incident met en cause la stratégie générale de recrutement du renseignement US dans les pays où se déroule la Grande Guerre contre la Terreur. De ce point de vue, ce jugement peut très bien affecter l’évaluation qui est faite de la situation du Yémen, où les USA envisageraient d’intervenir.

En effet, la situation du renseignement US a actuellement un aspect très paradoxal, par rapport à la description que nous en faisions dans notre texte du 2 janvier 2010. Alors que le renseignement US est effectivement très fractionné, très divisé en 16 agences et services concurrents, il existe par ailleurs une consigne générale de coopération forcée sur certains aspects de la lutte contre-terrorisme. Cette coopération forcée s’effectue, comme le qualificatif l’indique, dans des conditions “forcées” qui ne sont pas les meilleures conditions du monde. Elles établissent des liens dans les méthodes de recrutement qui sont souvent présentées d’une façon contre-productive, hors de leur contexte, avec des références mal précisées. Si l’échec de la CIA enregistré au Camp Chapman se confirme comme un très grave revers des méthodes de recrutement de la CIA, il peut conduire à des conséquences graves dans les autres services, qui peuvent s’estimer confrontés à ces mêmes erreurs. Le soupçon confirmant les méthodologies de l’action du renseignement, s’il se répand à tout le réseau des agences et services de renseignement, constituerait une crise grave dans l’action opérationnelle anti-terroriste du renseignement US en général, au moment où il est question d’une nouvelle intervention plus ou moins importante (au Yémen). Comme les résultats généraux ne sont jusqu'ici pas très enthousiasmants, l'avenir n'est pas particulièrement rose.


Mis en ligne le 4 janvier 2009 à 16H20