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1913Pour illustrer semble-t-il notre article du 14 octobre 2014, nous présentons plusieurs situations exemplaires illustrant le climat de la Russie sous l’influence de cette “dimension spirituelle” dont nous parlons dans le texte cité. Ces situations sont très diverses et touchent différentes activités, et souvent des activités développées selon des modèles-Système. On a alors des situations singulières où l’application de procédures ressortant d’activités-Système courantes produit des situations d’influence et des courants psychologiques collectifs chargés de sentiments patriotique, de volonté de rétablir les puissantes racines culturelles russes, d’opposition au bloc BAO au nom de la patrie russe, etc., c’est-à-dire au bout du compte d’un ensemble formant une dynamiques spécifiquement antiSystème.
• L’anniversaire de Poutine (62 ans) a été fêté par un déferlement d’achat de vêtements dans les magasins à la mode à Moscou, précisément des T-Shirt à l’effigie du président russe, et hostiles aux sanctions du bloc BAO. Le succès de ces ventes de promotion a été extraordinaire autant que leur organisation, signifiant que le monde en général hostile aux valeurs qui sont ici référencées en question (le patriotisme et tout ce qui a rapport à lui), que ce soit la mode, le prêt-à-porter, le corporate power qui est derrière, a réussi cette opération en épousant justement des thèmes absolument contraires à ceux que prône le Système, et rencontrant complètement le sentiment du public. C’est un aspect remarquable quand on connaît le nivellement transnational, le conformisme-Système pseudo-progressiste autour des mêmes thèmes sociétaux et déstructurants de ces activités, – dont la mantra anti-poutinienne est la plus remarquable aujourd’hui, – et ces activités faisant partie de la partie du monde de la communication le plus asservi au Système. Qu’il s’en soit devenu complètement étranger comme on l’a vu à Moscou témoigne de la puissance du courant patriotique auquel nous nous référons.
Le court reportage de Reuters, retransmis le 7 octobre 2014 par le Washington Post, est surtout accompagné de nombreuses images montrant l’affluence des acheteurs, mais également des photos classiques de ce genre de reportages de jeunes et ravissants mannequins présentant les T-Shirt poutiniens, c’est-à-dire une représentation d’un patriotisme russe nécessairement de type néo-conservateur traditionnaliste. Cela forme un contraste saisissant avec les mêmes habitudes du même monde dans le bloc BAO où ce qui est montré dans les mêmes démonstrations est complètement anti-poutinien, ce même monde du bloc BAO avec lequel pourtant la partie moscovite a des liens de connivence depuis vingt ans... Mais le cas est justement celui où la pression culturelle pour le patriotisme, le conservatisme culturel, est la plus forte, et par conséquent la rupture est totale.
«On Monday evening, Russians lined up in the upscale GUM shopping mall on Red Square to purchase the latest threads of national pride: sweatshirts and other garments featuring the likeness of Russia’s president, Vladimir Putin, sporting military and hockey gear, hugging puppies and leopards, and warning that the former KGB intelligence officer is presently reading your thoughts. The sale was timed to coincide with Putin’s 62nd birthday, which fell Tuesday. But it is hardly the latest display of Russian pride – or anger toward the United States – to hit the garment rack since relations between Russia and the West began to sour over the Ukraine crisis.
»Two weeks ago, a pair of women launched a campaign calling on Russians to trade in shirts displaying Western insignias and slogans in exchange for more “patriotic” clothing, bearing some fairly ungloved anti-Western messages. Backed by some large corporations – including a major Moscow airport – the “Fashionable Answer – No to Sanctions!” campaign posted advertisements, held public gatherings for the shirt swaps and claimed it successfully swapped 30,000 “patriotic” T-shirts for Western T-shirts in just one week. That’s 30,000 fewer shirts on the streets of Russia with Western flag or product symbols; they are now replaced by shirts bearing messages such as: “Topol [as in Topol missiles] isn’t afraid of sanctions,” “Sanctions? Don’t make my Iskander [as in Iskander missiles] laugh,” and “We have our fun without your Coca Cola.”»
• Le 9 octobre 2014, Damir Marinovic présente, sur le site Inside Russia, une école privée qui rétablit les traditions du Lycée Impérial tsariste. Cette école est financée par le jeune (39 ans) oligarque Konstantin Malofeev. Elle reçoit en général les enfants des élites moscovites, y compris de familles d’oligarques...
«Here is an interesting insight into how Russian society is changing. St. Basil School, outside of Moscow, is trying to revive the traditions of the Tsarist Imperial Lyceum where famous writers and statesmen such as Alexander Pushkin were educated. The founder of the school, Konstantin Malofeev, a successful Russian businessman, explains the school's values:
»“The Gymnasium's pupils are taught to be good Christians and patriots. I think if they are taught to be patriots and if they have faith in God, they will do much more for the future of Russia, as opposed to children whose only goal is to achieve good exam result. Building people with strong characters and a good upbringing is much more important than education and this is what our school is all about”.»
• C’est le même Konstantin Malofeev qui est le financier à la base de la construction de deux parcs à thèmes historiques et traditionnalistes, à Moscou et à Yalta, en collaboration avec Philippe de Villiers, selon le modèle de son parc à thème de Vendée. Malofeev représente un type d’oligarque extrêmement inhabituel, comme on en trouve quelques-uns en Russie. Ayant construit une fortune respectable dans les pratiques les plus extrêmes (finance) du Système, il a orienté le plus clair de ses activités dans une action générale de rénovation des valeurs traditionnelles russes où il “investit” des sommes conséquentes. (On trouvera dans l’article que lui consacre Wikipédia diverses indications à ce sujet.) Il semble qu’on puisse tenir Malofeev comme l’un des principaux financiers du mouvement anti-Kiev du Donbass. En ce sens, Malofeev tient un rôle activiste semblable dans la forme à celui que tiennent certains milliardaires US, mais inverti dans le sens : les rapports relatifs des uns et des autres font évidemment que l’action de Malofeev est nécessairement antiSystème, tandis que les autres sont de purs soutiens du Système.
C’est à nouveau Damir Marinovic, toujours sur Russia Inside, qui présente la cérémonie d’accueil de Villiers à Moscou, le 14 octobre 2014 (texte de présentation plus DVD). On y voit l’homme politique français, secondé par une ravissante interprète russe du type Scarlett Johansson qui aurait bien tourné, parler essentiellement de la proximité de l’âme française et de l’âme russe, et citer Chateaubriand et Alexandre Dumas, Dostoïevski, Pouchkine, Tolstoï, Tchaïkovski et Rachmaninoff. Bien entendu, de telles évocations font rappeler la proximité d’âme des Français et des Russes, et le rôle fondamental antiSystème que devrait tenir aujourd’hui la France, et qu’elle ne tient pas, entraînée dans les abysses par des élites-Système qui semblent avoir trouvé dans une sorte d’hystérie aux manifestations contenues dans un comportement de notaire de province (notre président-poire, si complètement louisphilippard), cela comme une fatalité maléfique, la formule de l’inversion totalitaire. Lors de sa campagne de promotion et de développement de ses parcs à thèmes, Villiers a rencontré Poutine et a reçu son soutien complet, le président russe considérant cette initiative comme allant complètement dans le sens de sa politique de rénovation culturelle du patriotisme russe.
• Le 14 octobre 2014, le Saker US présente une émission télévisée d’information sur une station télévisée nationale, menée par le fameux présentateur Vladimir Soloviev. Il s’agit d’un document impressionnant pour notre propos et pour notre enquête. La puissance et la détermination des propos de cinq commentateurs politiques de la presse russe, sur le thème de “Nous sommes en guerre avec les USA”, sont particulièrement impressionnantes. Elles montrent un degré de documentation du comportement US, et de conviction face à ce comportement, qui est tout aussi révélateur du climat régnant en Russie que le reste. Effectivement, comme l’observe le Saker, peu importe que ces commentateurs soient d’une opinion favorable à la politique russe actuelle, ce qu’il importe de mettre en évidence c’est la puissance et la qualité du propos par comparaison au discours stéréotypé et pavlovien de nos organes de communication de type presse-Système, dont fort peu sont public et d’État mais dont tous sont absolument engagés dans leur servilité absolument démocratique au service du Système... Présentation du Saker :
«The show in question called “Sunday evening with Vladimir Soloviev” is one of the most watched shows on Russian TV. It airs at prime time, right after the main Sunday evening news. The people invited to this show are typically very well-known public figures and the topics discussed are the hot topics of the day. What I am trying to say here is that this show is a very good reflection of the mood in Russia. I can hear the objection “this is state controlled TV!”. Okay, let’s say it is. But in this case, is it not interesting to see what kind of ideas the state is trying to sell to the general public? Same goes for the “oligarch controlled TV” argument. What are the oligarchs paying for? Finally, if this channel is trying to appeal to the general public, then it shows what the publics wants to hear. In reality, this is a state controlled TV channel, a very “mainstream” and “approved one”, but also a very popular one. The host, Vladimir Soloviev, is a Russian Jew who is very patriotic and who regularly blasts Russian “liberals” (in Russia that means pro-US russophobes) and who makes no secret of his disgust for the Ukie junta.
»Please watch this very mainstream “state approved” discussion and ask yourself the following questions: a) If the Kremlin wanted to backstab Novorussia – would it allow such shows on prime time TV? b) What will happen to Putin if he lets Novorussia be over-run by the Nazi death squads? c) Do you detect any sign of fatigue, fear, demoralization, surrender or weakness which would indicated to you that “the sanctions are biting” and the Russian public opinion getting weary or otherwise willing to negotiate with the Ukraine, the EU or the USA?
«Again, this is very “mainstream”, I could easily have found far more “patriotic” or “anti-Nazi” shows. But I wanted to share with you something very “middle of the road”, the tip of a much bigger iceberg...»
Notre intention, dans ces divers comptes-rendus commentés, est de mettre en évidence à la fois la progression de l’affirmation du courant patriotique russe, à la fois sa parfaite connaissance des enjeux qu’il doit affronter, des buts qu’il doit poursuivre, de la sorte d’obstacle qu’il doit écarter, à la fois la détermination de ce courant. Ce qui est particulièrement remarquable, c’est que ces diverses scènes ne montrent nullement un pays archaïque en situation de protestation dépassée par rapport à un courant irrésistible (de “modernité”, évidemment), mais bien un pays qui a intégré tous les attributs d’activité du Système (moyens de communication économique et sociétal, moyens de communication de l’information et du show-business, moyens d’enrichissement individuel, etc.) et qui se lève contre le Système après voir mesuré les effets de son action, et qui développe une action antiSystème avec les moyens que le Système a mis à sa disposition. (Manœuvre classique du “faire aïkido”.)
On a ainsi le spectacle de l’intégration de la Russie dans une dynamique qui est absolument antiSystème, et qui s’oppose désormais frontalement et ouvertement au bloc BAO et à sa fonction de zélateur, d’adorateur et de porte-flingue du Système. Le temps de l’incertitude et de l’ambiguïté est complètement dépassé et dissipé : à la “haine-Système” antirusse et anti-Poutine s’oppose désormais une détermination et une conviction qui sont fondées sur le patriotisme russe, sur la “dimension spirituelle” dont nous parlons, c’est-à-dire une détermination et une conviction complètement structurées dans une situation principielle propre à la Russie. Encore une fois, il ne s’agit pas d’un affrontement de nations, d’un affrontements d’idéologies, d’un affrontement de cultures, d’un affrontement de sens, même si tous ces caractères sont présents dans la dynamique en cours, mais bien d’un affrontement d’une communauté principielle et spirituelle constituée en antiSystème contre un monstre (le Système) qu’on ne peut identifier avec les seuls caractéristiques terrestres. Sans nul doute, le plus impressionnant dans le phénomène russe actuel, qui a des aspects d’une sorte de “révolution” contrôlée et mesurée par rapport aux normes-Système et contre eux, c’est la conscience totale, à tous les échelons de la société, de l’enjeu de la bataille qui est celui de la détermination de l’orientation du monde, de l’intensité de la bataille qui est celle d’une guerre totale, des moyens de la bataille qui sont les références à l’Histoire, à la spiritualité, aux principes structurants. Face à cela, seul le Système a conscience de tous ces aspects structurants alors qu’il sait parfaitement que son but est de les détruire. Les directions-Système sont totalement conduites par leurs narrative qui n’ont jamais été aussi proliférantes et aussi addictives, c’est-à-dire aussi puissamment trompeuses mais également aussi fragiles dans la validité de leur tromperie, – ce qui indique qu’il y a là des vulnérabilités remarquables dans le chef de la cohésion de ce personnel. Les populations du bloc BAO sont en plein désarroi, étant à la fois les victimes du Système avec une haine instinctive contre lui, et leur complice obligé dans certaines de ses entreprises. Face à la Russie, elles ont les moyens de déterminer par elles-mêmes certaines vérités de situation qui leur permettraient d’adopter un comportement activiste antiSystème aussi déterminant par sa conviction et sa détermination que celui qu’on trouve en Russie.
Pour terminer, on citera Féodor Loukianov, commentateur connu à Moscou mais aussi dans le bloc BAO, commentateur du type “réaliste” et qu’on ne peut soupçonner d’enthousiasmes patriotiques excessifs. On peut même considérer qu’il s’agit d’un commentateur qui n’est pas loin de se situer proches de ceux qui ont jusqu’ici défendu l’intégration de la Russie dans le bloc BAO. Son commentaire du 2 octobre 2014 dans The Moscow Times est absolument sans appel : tout est fini, la rupture est consommée, une époque s’achève et une autre commence par conséquent...
«Current events could be compared to another of Russia's breaking points, 1917 — the point at which the Russian Empire was gone forever and its successor state became an international pariah. Hit by sanctions that fundamentally changed its status in the international system, Soviet Russia was placing its bets on autarchy, or creating a closed and self-sufficient economy. I am in no way suggesting that post-Crimea Russia is analogous to the country that emerged from the flames of the 1917 revolution. I am saying that once the ruling authorities in a country have been deemed unfit by foreign partners, they can never fully repair relations with them... [...]
»Following the end of the Cold War, Russia's dialogue with the West as a whole, but especially with Europe, was based on the assumption that Russia would eventually become part of an extended “Western society,” although both sides had different ideas of how that would happen and Moscow's ultimate role in it. However, they retained the idea of a “strategic partnership,” a relationship that required if not sincere mutual trust, then at least mutual silence to mask lingering suspicions. The application of sanctions has ended all that...
»Today, a single man personifies the entire Russian political system. Western attempts to apply pressure against him have produced very predictable retaliatory measures at both the personal and government levels. And unlike the former presidents of Iraq and Serbia, President Putin has very imposing political and economic tools at his disposal to enact his own retaliatory deterrence measures. In effect, Western sanctions are attempting to oust the very person who alone determines Russia's political course. For Putin, the question is not simply one of winning or losing a tactical position in a game. At stake is his own political survival and, by extension, Russia's future political landscape. With the stakes that high, why would anyone expect him to make serious concessions, especially knowing that he can never restore relations with the West?...»
Mis en ligne le 16 octobre 2014 à 05H25
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