Leur seconde Civil War

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Leur seconde Civil War

C’est un article intéressant de l’économiste libéral-progressiste, ancien secrétaire au travail de Clinton devenu professeur, Robert Reich, sur «We the People, and the New American Civil War». Outre l’article lui-même, l’intérêt porte sur le cheminement de l’article, qu’il est bon de décrire avant d’en venir au contenu lui-même. Publié d’abord sur le site de Reich (RobertReich.org), le 5 novembre 2012, puis sur le site progressiste CommonDreams.org le 6 novembre 2012, il a ensuite été publié le 7 novembre 2012 sur le site iranien PressTV.com. C’est un itinéraire intéressant, si l’on suppose, comme c’est tout à fait probable pour un site de cette importance (PressTV.com), que Reich a donné son accord pour une publication sur le site iranien. Il s’agit bien là d’un texte “à consommation intérieure”, délicat dans sa signification profonde, destiné essentiellement à un public US et qu’un homme de l’intelligentsia comme l’est malgré tout Robert Reich ne devrait pas nécessairement apprécier de voir diffusé sur un site iranien. S’il l’est, c’est qu’il s’agit d’un texte reflétant sans aucun doute des sentiments très profonds et une expérience très pénible de la situation US, que Reich estime devoir faire bénéficier de la plus large publicité possible, – un texte qui figure comme le fameux symbole, ou signal de détresse, lorsque le drapeau américain est hissé à l’envers, le rectangle avec les étoiles étant en bas.

L’appréciation que Robert Reich expose est une vue très critique, sinon tragique, de la situation intérieure des USA. L’intérêt de ce texte est qu’il décrit une “guerre civile” (“La Seconde Guerre Civile américaine”) moins marquée par des événements brutaux, des faits politiques voire militaires identifiables dans le sens de la désunion (comme lors de la Première Guerre Civile, y compris dans les prémisses de ce conflit), que par un climat psychologique et social, voire un climat “de communication” au sens du système de la communication, extrêmement pesant, éprouvant, et marqué par une division presque géographique (entre les fameux États rouges et États bleus attribués respectivement aux républicains et aux démocrates sur les cartes électorales). Ce texte mérite de larges citations, qui montrent comment les sentiments anti-démocrates et anti-républicains ressemblent de plus en plus aux jugements idéologiques, voire raciaux les plus violents…

«The vitriol is worse than I ever recall. Worse than the Palin-induced smarm pf 2008. Worse than the swift-boat lies of 2004. Worse, even, than the anything-goes craziness of 2000 and its ensuing bitterness. It’s almost a civil war. I know families in which close relatives are no longer speaking. A dating service says Democrats won’t even consider going out with Republicans, and vice-versa. My email and twitter feeds contain messages from strangers I wouldn’t share with my granddaughter.

»What’s going on? Yes, we’re divided over issues like the size of government and whether women should have control over their bodies. But these aren’t exactly new debates. We’ve been disagreeing over the size and role of government since Thomas Jefferson squared off with Alexander Hamilton, and over abortion rights since before Roe v. Wade, almost forty years ago. And we’ve had bigger disagreements in the past – over the Vietnam War, civil rights, communist witch hunts – that didn’t rip us apart like this.

»Maybe it’s that we’re more separated now, geographically and online.

»The town where I grew up in the 1950s was a GOP stronghold, but Henry Wallace, FDR’s left-wing vice president, had retired there quite happily. Our political disagreements then and there didn’t get in the way of our friendships. Or even our families — my father voted Republican and my mother was a Democrat. And we all watched Edward R. Murrow deliver the news, and then, later, Walter Cronkite. Both men were the ultimate arbiters of truth.

«But now most of us exist in our own political bubbles, left and right. I live in Berkeley, California – a blue city in a blue state – and rarely stumble across anyone who isn’t a liberal Democrat (the biggest battles here are between the moderate left and the far-left). The TV has hundreds of channels so I can pick what I want to watch and who I want to hear. And everything I read online confirms everything I believe, thanks in part to Google’s convenient algorithms.

»So when Americans get upset about politics these days we tend to stew in our own juices, without benefit of anyone we know well and with whom we disagree — and this makes it almost impossible for us to understand the other side… […]

»Not even this degree of divisiveness would have taken root had America preserved the social solidarity we had two generations ago. The Great Depression and World War II reminded us we were all in it together. We had to depend on each other in order to survive. That sense of mutual dependence transcended our disagreements. My father, a “Rockefeller” Republican, strongly supported civil rights and voting rights, Medicare and Medicaid. I remember him saying “we’re all Americans, aren’t we?”

»To be sure, we endured 9/11, we’ve gone to war in Iraq and Afghanistan, and we suffered the Great Recession. But these did not not bind us as we were bound together in the Great Depression and World War II. The horror of 9/11 did not touch all of us, and the only sacrifice George W. Bush asked was that we kept shopping. Today’s wars are fought by hired guns – young people who are paid to do the work most of the rest of us don’t want our own children to do. And the Great Recession split us rather than connected us; the rich grew richer, the rest of us, poorer and less secure.

»So we come to the end of a bitter election feeling as if we’re two nations rather than one. The challenge – not only for our president and representatives in Washington but for all of us – is to rediscover the public good.»

Pour relever le défi (on dit “relever le challenge”, dans les salons), on souhaite bonne chance à Robert Reich, – et cela dit sans ironie déplacée, mais sans espoir superflu non plus. Ce texte-là en dit plus long, on le comprendra, que mille campagnes électorales à $6 milliards l’unité, que mille discours “promptés”, que mille n’importe quoi pourvu qu’on puisse y appliquer le qualificatif-chewing gum-“démocratie”du temps des aubaines électorales.

Nos lecteurs nous comprendront sans aucun doute lorsqu’ils liront ceci, qu’il s’agit là d’une modeste contribution, mais qui tient lieu pour nous de seul commentaire, c'est-à-dire de non-commentaire, le seul intérêt qu’on puisse accorder, a contrario et par défaut, de cette bouffonnerie insupportable et indescriptible, proche de la nausée pour ses effets, à laquelle nous venons d’assister. (Dito, le tirage au fric de l’“homme le plus puissant du monde.) Le commentaire de Reich met en lumière des choses d’une profondeur et d’une importance qui sont à des années-lumière de ce dont nous n’avons pas dit un seul mot.


Mis en ligne le 7 novembre 2012 à 15H36