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1068La question de la “militarisation des USA”, – que nous allons nommer très rapidement la “‘systémation’ des USA”, – se pose aujourd’hui d’une manière aigue et directe. D’une certaine façon, disons dans l’esprit de la chose, cela est la conséquence directe de l’agitation intérieure qui parcourt le pays, – notamment le mouvement Occupy ; cette nouvelle dynamique s’ajoute à une poussée constante, depuis plusieurs années, pour “militariser les USA” pour agir contre ce que les autorités du Système nomment “terrorisme”.
Il s’agit d’une grande cause, qui a des fondements historiques, qui est officiellement illustrée par un débat actuel au Sénat sur la loi S.1867, dite National Defense Authorization Act, qui donne dans une de ses dispositions des pouvoirs supplémentaires au département de la défense pour intervenir sur le territoire des Etats-Unis. Cette “grande cause” alimente un débat jusqu’alors latent, et en passe de devenir ouvert, sur la décadence accélérée du système de l’américanisme, – certains disent sur sa transformation en un système fasciste, – cette interprétation n’étant pas la nôtre, comme on le verra.
Durant la première phase d’expulsion du mouvement Occupy, portant sur divers “campements”, autour du 15 novembre, les méthodes policières ont été particulièrement et vivement dénoncées pour leur brutalité, mais aussi leur spécificité nouvelle. Il est apparu que les policiers avaient un comportement plus “militaire” que celui courant qu’on rencontre dans les opérations de maintien de l’ordre, dans des conditions de très faible violence.
William Hogeland, du site Alternet.org, a publié le 22 novembre 2011 un article intéressant sur cet aspect de la “militarisation”, avec un arrière-plan historique sur lequel nous reviendrons. Concernant l’incident de Berkeley, dont nous avons rendu compte le 21 novembre 2011, Hogeland écrit…
«The police behavior at U.C. Davis – manifestly not "rogue-cop," a trained, planned exercise – reveals the cool military thinking behind the operation. Pepper-spraying looked surgical, preemptive, even robotic. The strategic directive must have been to conserve police effort and maintain police maneuverability at virtually any cost. Such efficiencies and capabilities would be important in a riot; they're not important when hoping to evict unarmed, seated protesters. It's not as if officers have been resorting to battle gear under otherwise unmanageable pressure or initiating violence only as a last resort. They've been arriving in battle gear. They've been construing noncompliance as potential attack. They've moved preemptively to disable attack where none existed, not just trying to evict but seemingly hoping to inspire fear, to punish and defeat.
»The mood these operations convey is that failure to achieve police objectives must result in something awful for the body politic. In reality, leaving citizens sitting around a park or campus a few more days, even possibly illegally, might be frustrating for police and others; it's hardly the end of the world. Sometimes taking a few deep breaths is the only thing to do. But military training, tactics, and weaponry seem to inspire the idea in civic strategists that failure to achieve an objective is tantamount to fatal defeat by a hostile enemy. Intolerable. Not an option.»
Le même Hogeland observe, d’une façon générale : «We've seen military hardware and tactics used in the Occupy crackdowns. We've seen them in post-9/11 federal funding in the states and municipalities for homeland security. We've seen them in the aptly named “war on drugs.” And anyone who has watched shows like “Cops” has seen – and may by now take for granted – techniques and technologies of military-style police raids on homes, raids that in more upscale neighborhoods might amount to nothing more than knocking on a door and serving a warrant…»
Tout cela ne semble nullement du au simple entraînement des choses, disons à la duplication naturelle des techniques et des comportements. Il semble exister des consignes écrites, et sans doute des formations à mesure, qui dédoublent celles des forces militaires. Un membre du mouvement Occupy a réussi à se procurer un guide d’instruction pour les policiers de New York (NYPD), constitués en unités pour lutter contre les désordres, guide intitulé Disorder Control Unit Guidelines. Toujours sur Alternet.org, le 26 novembre 2011, Julianne Escobedo Shepherd donne notamment ce paragraphe des instructions de comportement, qui paraît être la première et la plus importante. (Julianne Escobedo Shepherd a souligné elle-même les passages qui lui semblent plus significatifs.)
«Your appearance is critical. The impression we make on disorderly and violent groups has a profound effect on the outcome of the incident. Therefore, ensure your uniform and required equipment are neat and in proper working condition. Always have disorder control equipment, including helmet and baton, ready for immediate use. A strong military appearance, with sharp and precise movements, is a force multiplier and a psychological advantage to us.»
On reconnaît les tendances de plus en plus évidentes des forces militaires, et donc de maintien de l’ordre, qui sont complètement spécifiques au bloc BAO : un comportement presque automatisé et de toutes les façons standardisé, cela devenant une réalité irrésistible de la formation, des équipements ressemblant à des cuirasses et dissimulant l’aspect humain, des lunettes noires pour masquer le regard, des mouvements souvent mécaniques, effectivement “coupants et précis”, le refus de la souplesse au profit de la rigidité mécanique… En réalité, un comportement et une apparence, avec l'influence sur la psychologie à mesure, qui tendent à se rapprocher de ceux d’une créature robotisée, indifférente aux conditions humaines extérieures, dont la tâche est d’imposer son propre ordre, sa propre vision du monde, dont la mission offensive est de briser les velléités de spécificités psychologiques et culturelles des individus faisant partie des groupes qu’il s’agit de réduire. Le cop doit effectivement devenir un Robocop.
…Plus encore qu’une “militarisation”, nous parlerions alors d’une sorte de “déshumanisation” systématique de toutes forces représentant, – représentant quoi, d’ailleurs : la loi et l’ordre ? Les intérêts nationaux
On voit donc que cette “militarisation” l’est certes, mais d’une façon simplement chronologique, parce que les militaires ont été les premiers à subir cette transformation. Nous parlerions alors plutôt, et cette fois définitivement pour le sujet, d’une “systémation”, selon un néologisme déjà employé pour désigner une sorte de constitution en système ; le concept se ferait “opérationnellement” selon une “automatisation” des forces de l’ordre du Système, dans les sens le plus larges ; “automatisation” dans les actes, les missions, les comportements, les psychologies, les apparences ; les “forces de l’ordre”, d’abord les militaires mais les policiers et le reste suivant ; tout cela, selon une dynamique, une logique, une mission, une conception directement inspirées par le Système.
Gardons tout de même un instant encore le terme “militarisation” par respect historique temporaire, mais avec les réserves vues ci-dessus qui nous font déboucher sur le terme “systémation” pour aujourd’hui. Il s’agit en effet d’évoquer une dimension historique. Hogeland, cité plus haut, s’en charge en quelques paragraphes. Il nous montre qu’il y a, dès l’origine de la Grande République, un grand débat à propos de cette question. Il concerne finalement la question de savoir quel traitement “appliquer” au peuple…
«James Madison may offer some long-range perspective. During the 1787 Constitutional Convention, arguing for forming a nation instead of retaining the confederation of states, he said that force applied to citizens collectively rather than individually ceases to be law enforcement and becomes war; groups so treated will seize the opportunity to dissolve all compacts by which they might otherwise have been bound. Madison's argued against militarism in favor not of anarchy but of a higher kind of law and order.
»And in 1794, Secretary of State Edmund Randolph, advising President Washington (to no avail) to eschew military adventure against the so-called Whiskey Rebels, and to use prosecutions instead, argued passionately that the real strength of government always lies not in coercion but in the affection of the people. Randolph was facing an actual insurrection, with threat of secession, not a peaceful protest; there were federal crimes involved. Still he advised against a military operation. The loathing of military suppression as a substitute for due process of law, going back to our first administration, runs deep in the American psyche.
»But it's worth remembering that equally strong feelings have always run the other way. Long before events known as the Whiskey Rebellion had risen to any kind of crisis, Alexander Hamilton, Secretary of the Treasury, was urging Washington to bring military force against citizens somewhere in the country; otherwise, Hamilton believed, authority would always be in question. When Washington did so, he ignored habeas corpus and nearly every individual right set out in the new Bill of Rights, federalizing militias to bring overwhelming force to shock and awe innocent citizens of an entire region of the country. In his book Crisis and Command, John Yoo, author of the notorious “torture memo,” has defended the George W. Bush administration's tactics in dealing with suspected terrorists by citing precedent – not wrongly – in Washington's behavior in the 1790s.»
Dans ce débat sur la “militarisation”/“systémation”, on s’aperçoit qu’il s’agit effectivement de la question du “traitement collectif” de la population, entre ceux qui recommandent simplement que cette population soit traitée comme un rassemblement d’individus devant obtempérer aux principes communs de la loi et de l’ordre, et ceux qui jugent que la “force” doit être appliquée d’une façon collective contre les citoyens (la force devenant alors la “militarisation”, selon la définition de Madison : «force applied to citizens collectively rather than individually ceases to be law enforcement and becomes war…»).
Le débat est donc d’une extrême importance, puisqu’il revient à choisir entre la considération des citoyens en tant que tels d’une part, et la considération des citoyens en tant que groupe considéré comme formé ontologiquement, ce qui implique à la limite que l’hostilité d’un seul entraîne une riposte générale contre le groupe. La “militarisation” est donc le terme employé pour considérer la vie publique comme une sorte de “guerre permanente”, latente ou active, entre le pouvoir, qu’on peut alors déjà qualifier de Système, et la population. Lorsque le Système est devenu prédominant et omniprésent comme il l’est aujourd’hui, on peut parler de “systémation”, – ce qui nous fait bien mesurer alors combien le terme “militarisation” est imparfait et trompeur.
L’actualité nous conduit à un élément de ce vaste débat. La disposition contestée de la loi S.1867, ou National Defense Authorization Act, a été conçue et rédigée “en secret” (sans le moindre écho public) par les sénateurs Carl Levin (démocrate) et John McCain (républicain), respectivement président et chef de la minorité de la commission des forces armées du Senat. Le débat a été et reste très vif au Sénat sur cette disposition, notamment entre McCain et l’un de ses principaux opposants, Rand Paul, fils de Ron Paul, sénateur du Kentucky et républicain comme McCain. Rand Paul s’oppose à la loi au nom du respect des droits individuels par le gouvernement, qu’il estime n’être plus garantis selon les dispositions de cette loi (emprisonnement discrétionnaire, détention sans inculpation, sans jugement, etc., selon des cas jugés essentiels pour la sécurité nationale, pour des citoyens US, y compris sur le territoire des USA). McCain riposte par la nécessité de lutter contre l’omniprésence du terrorisme, y compris, bien entendu, et même encore plus qu’ailleurs, sur le territoire des USA.
On trouve sur Antiwar.com notamment, le 29 novembre 2011, un résumé des aspects de cette loi et des diverses positions prises la concernant. L’ACLU, l’association qui défend les droits civiques, s’élève avec vigueur contre la loi : «The Senate is going to vote on whether Congress will give this president—and every future president — the power to order the military to pick up and imprison without charge or trial civilians anywhere in the world. The power is so broad that even U.S. citizens could be swept up by the military and the military could be used far from any battlefield, even within the United States itself.»
C’est là l’expression désormais employée : avec cette loi, les USA deviennent, comme le reste du monde où les forces armées US font ce que l’on sait qu’elles font, un battlefield. Le débat est donc nommé également “Battlefield USA”
Le projet Levin-McCain est loin, très loin de faire l’unanimité, même s’il passe au Sénat. Obama a annoncé qu’il opposerait son veto à cette loi, si elle était votée. Il y a déjà eu des réactions d’organisations de sécurité nationale, qui font partie du Système, qui devraient être et qui sont effectivement engagées dans la dynamique de “systémation”, et qui s’opposent au projet Levin-McCain. C’est le cas du FBI, par exemple. (Selon Allgov.com, du 29 novembre 2011 : «The provision has also drawn the ire of high-ranking officials in the executive branch who see it as a usurpation of power by the military. FBI Director Robert Mueller wrote a letter to members of Congress raising his own concerns and stating that “The legislation ... will inhibit our ability to convince covered arrestees to cooperate immediately, and provide critical intelligence.” President Barack Obama has threatened to veto the bill.»)
Le FBI n’est pas seul à se sentir concurrencé par cet expansionnisme du Pentagone via Levin-McCain. Cela sera, si ce n’est déjà le cas, autre exemple, de la DEA, de l’ATF et des garde-frontières qui interviennent sur la frontière mexicaine avec des drones qui sont normalement utilisés par les forces armées. Nous notions ce fait nouveau, opposant des agences comme la DEA ou l’ATF au Pentagone, le 19 octobre 2011. Enfin, il y a paradoxalement le Pentagone lui-même. Le secrétaire à la défense Leon Panetta se proclame catégoriquement opposé à la loi, qui imposerait des charges supplémentaires à son département, qui est d’ores et déjà en complète banqueroute.
Ces diverses remarques montrent que l’on est loin, à cause des conceptions et des intérêts divergents des centres de pouvoir, d’un mouvement concerté et coordonné pour établir des conditions plus répressives et plus arbitraires de contrôle de la population. Ces mésententes ne peuvent que s’accentuer à mesure que la situation crisique générale se tend et nécessite des mesures coercitives contre la population. Cette tension qui suscite des révoltes populaires concerne également, et même au premier chef lorsque l’on considère la situation budgétaire générale et donc les situations budgétaires spécifique de ces centres de pouvoir, les prérogatives et l’équilibre interne de ces centres de pouvoir, et donc leur concurrence (phénomène de “la discorde chez l’ennemi”). On oublie trop et trop souvent, lorsqu’on juge les USA avec des yeux européens et spécifiquement français, que l’on a affaire à un pays qui n’est pas une nation, à un gouvernement central qui n’est pas un Etat au sens régalien, à une élite extrêmement solidaire pour le maintien du Système mais extrêmement divisée lorsqu’il s’agit pour ses divers composants de maintenir leur propre statut par rapport au Système. Dans un Système en cours d’effondrement et par conséquent de réduction dramatique de ses moyens, règne le “chacun pour soi” de chaque centre de pouvoir voulant conserver ses prérogatives et privilèges.
De cette façon, nous revenons à notre observation de départ, l’affirmation plus forte que jamais de notre opposition à la thèse des USA évoluant vers le fascisme par le biais d’une “militarisation des USA”. Les opérations en cours, notamment contre Occupy, mais également dans d’autres domaines, constituent une tentative de re-“systémation des USA”, c’est-à-dire un retour (on verra plus loin pourquoi “retour”) des USA dans le Système. La loi Levin-McCain, même si elle est dénoncée comme attentatoire aux libertés publiques, n’est pas une tentative de “fascisation” ni même de “militarisation” des USA, mais une tentative du War Party de pérenniser jusque sur le territoire même des USA le statut de “guerre perpétuelle” (contre la Terreur, encore plus que contre le terrorisme, l’abstraction aidant la logique de la chose) qui est le garant de sa position en tant que centre de pouvoir. Le War Party est un centre de pouvoir comme d’autres, composé d’intérêts divers regroupés dans une idéologisation forcenée de son argument pour sa raison d’être. Il tente de pousser son avantage, et l’on voit qu’il se heurte à d’autres centres de pouvoir (le FBI, voire le Pentagone lui-même, qui a dans une certaine mesure partie liée avec le War Party mais qui n’est nullement réduit au War Party).
La réalité historique des USA est que la “systémation des USA” a été très vite accomplie, notamment par la sanction spectaculaire et sanglante de la Guerre de Sécession qui établit par le fer et par le sang la constitution des USA en un système fermé, ce système de l’américanisme qui devint rapidement le cœur du Système général qu’est devenu notre contre-civilisation. Cette “systémation des USA” s’est effectuée par des moyens habiles, soft si l’on veut, par la pédagogie américaniste fondée sur les symboles des USA représentée symboliquement en “nation exceptionnelle”, appuyée sur des narrative diverses à capacité symbolique très forte (l’American Dream), tout cela grâce à l’usage de la formidable toute-puissance du système de la communication. La “systémation des USA” se fit donc essentiellement par la psychologie, dont nous avons étudié déjà les caractères essentiels (inculpabilité et indéfectibilité).
Dans ce cas de ce montage absolument efficace, absolument réussi, cette “systémation” réussie à la lumière de la narrative de la démocratie, les autres instruments de coercition pour cette même “systémation” étaient accessoires, notamment les moyens de force, et ils ne jouèrent jamais un rôle central. C’est pour cette raison que s’est installée la fiction que les forces armées des USA ne pouvaient pas intervenir sur le territoire des USA (non-“militarisation”), achevant le constat général d’une “systémation” réussie sans aucune coercition nécessaire. (La fameuse Posse Comitatus Act de 1876 est souvent présenté comme la loi sanctionnant cette non-“militarisation” des USA, en interdisant l’emploi des forces armées sur le territoire des USA. Comme une simple analyse courante de la chose le montre, – le Wikipédia suffit à cet égard, – c’est une fausse interprétation puisque cette loi est une réglementation des rapports des forces armées fédérales et des Etats de l’Union ; mais le symbole dépasse dans ce cas la vérité de la loi, pour sanctionner cette situation de “non-militarisation” conçue comme le signe du succès de la “systémation” soft.)
L’actuelle poussée que l’on observe d’une réelle coercition par le biais des “forces de l’ordre”, notamment contre Occupy mais dans bien d’autres occurrences, indique donc simplement que les élites prennent conscience de la dé-“systémation” des USA. Ce phénomène est d’ailleurs logique puisqu’il s’agit de la crise finale de l’effondrement du Système, mais cette conclusion est par contre, et fort naturellement, au delà des capacités de compréhension de ces mêmes élites. La réaction est par conséquent, et fort logiquement, d’employer la force, le moyen d’urgence disponible, pour imposer une nouvelle “systémation des USA” (re-“systémation”). Il s’agit simplement d’en revenir au système de l’américanisme quand il marchait, et rien de plus.
Bien entendu, beaucoup est dans la méthode. Il est évident que cette méthode de coercition par la force, par des moyens, jusqu’au comportement et aux accoutrements de ceux qui sont chargés de la besogne, est le contraire de la “pédagogie” initiale, de la “systémation” soft réussie par le biais de la psychologie transformée en une psychologie américaniste spécifique. Il y a toutes les chances, absolument toutes les chances (appuyons sur le mot “chances”), que le résultat inverse soit obtenu.
Un simple cas hypothétique parmi d’autres, cas aisément envisageable, le montre évidemment. Puisque le but n’est pas de changer le Système mais de faire revenir de force une population qui se libère et se révolte contre le Système, le Système doit se poursuivre avec tous ses caractères fondamentaux, notamment certaines de ses lois “libérales” fondamentales. La coercition par la force n’empêche nullement que les Américains continuent à acheter des armes qui restent en vente libre, comme un des droits inaliénables du Système (pardon, de la Constitution), chose soutenue d’ailleurs par l’essentiel de la direction politique, et qu’ils continuent à se regrouper en associations dont certaines sont des milices ; c’est-à-dire qu’au terme de la confrontation qu’implique la coercition, avec l’usage de plus en plus accentuée de la force par le Système, la riposte pourrait finalement en venir aisément à l’usage de ces armes par des groupes organisés, et la protestation en venir à l’insurrection. (C’est une des menaces récentes, paraissant peut-être folklorique sur le moment mais qui pourrait vite acquérir un caractère prémonitoire, du leader noir de The Nation of Islam, Louis Farrakan, annonçant le 27 octobre 2011 l’intervention à venir de milices armées aux USA.)
Dans ce cadre hypothétique, on peut comprendre sans grand effort intellectuel mais en prenant garde d’écarter l’influence psychologique du Système, que les processus de “déshumanisation” des forces de l’ordre, la transformation du cop en Robocop, qui installent une situation d’hostilité systématique, sont la voie la plus sûre pour conduire à la confrontation. Là aussi, la “transversale autodestructrice” règne.
La “militarisation des USA” en cours, qui est en fait une tentative forcée par les évènements de ré-“systémation des USA”, emploie des méthodes effectivement de type policier et militarisé, ou de type fascisant, pour un but qui est totalement étranger à la transformation du système de l’américanisme en un système policier ou militarisé centralisé, ou à un système fasciste, les uns et les autres de type classique. La décentralisation fondamentale des USA, l’absence de véritables structures d’Etat, la faiblesse également fondamentale d’une direction politique qui n’est qu’un instrument de divers centres de pouvoir aux intérêts divergents, interdisent évidemment le centralisme inhérent à un système policier, un système militarisé ou un système fasciste.
Voilà pour le cas lui-même. Pour l’essentiel, qui est la situation générale, il est également évident que la situation que nous avons décrite est une tentative de plus (inconsciente d’elle-même puisqu’inconsciente de l’effondrement) de contrecarrer l’effondrement irrésistible du Système, et nullement un facteur central de l’évolution de la situation. A verser au rayon des tentatives sans lendemain, mais en observant que la chose a tout de même la vertu d’accélérer la marche vers d’autres lendemains, extrêmement proches et qui déchantent absolument.
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