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1557Israël n’est pas un pays comme les autres… Pourtant, il semblerait que si, de plus en plus ; il semblerait même qu’il mène la charge pour signaler qu’il est “un pays comme les autres”, encore plus que les autres, bien en avant des autres dans le cours du processus de dissolution qui les affecte tous. (Parlant “des autres”, certes, on parle de ceux du bloc BAO, de leur désordre, de leur confusion, du caractère incontrôlable et insensé de leur politique conduite par leurs narrative contre la vérité du monde.)
On veut dire par là, – “pays comme les autres”, – que nous étions habitués à Israël comme d’un pays où les préoccupations de sécurité, jusqu’aux emportements messianiques et prophétiques, passaient tout le reste et mobilisaient une population et sa direction autour d’une ardente perspective. Ce constat relève aujourd’hui du cliché, de l’image, si pas d’Épinal, dans tous les cas du type “images de Jerusalem”. Aujourd’hui, Israël est complètement mangé, bouffé, dévoré par ses dynamiques déstructurantes et dissolvantes internes. Qu’il y ait à sa porte une crise de la dimension de la syrienne, et dans sa tête une autre de l’intensité potentielle de l’iranienne, – tout cela n’importe pas parce que le processus interne prend désormais le pas sur le reste, alimenté par les folies de ses narrative extérieures.
Aujourd’hui, Israël est déchiré par lui-même, par des querelles internes, par son désordre intérieur. Cet avant-garde stratégique du Pentagone (du bloc BAO) est en train de devenir l’archétype du modèle de la chute du bloc BAO. Sont touchés tous les domaines de la vie politique et sociale du pays, que ce soit les politiciens, la population et ses mouvements de protestations, la direction politique dont l’autorité est mise en cause directement, en pleine crise syrienne, par son chef d’état-major général…
Shaul Mofaz, nouveau chef du parti israélien Kadima depuis quelques mois, n’a pas froid aux yeux. Il a pris la tête du parti en mars 2012, après des manoeuvres politiciennes internes ressemblant à un coup d’État, pour se débarrasser de Tzipi Livni ; cela, pour aussitôt dénoncer les projets d’attaque de l’Iran de Netanyahou, arguant que l’essentiel était la crise intérieure israélienne.
Là-dessus et en bonne logique, il s’est allié à Netanyahou (voir le 8 mai 2012), entrant dans son gouvernement pour en faire une équipe de grande coalition. Lui-même, Mofaz, on s’en doute, avança aussitôt qu’il n’y avait rien de plus grave que la menace iranienne contre Israël et qu’il était bon de préparer une attaque-surprise.
Il y a une grosse semaine, Mofaz, emportant son Kadima sous le bras, a claqué la porte qu’il avait ouverte deux mois plus tôt et quitté le gouvernement. Il découvre alors que l’attaque contre l’Iran, mais aussi celle contre la Syrie que Netanyahou a suggérée, sont des choses inacceptables, dangereuses et inutiles, qui menacent le destin de nos femmes et de nos enfants… L’argument est imparable.
On imagine bien que PressTV.com, site iranien, fait aussitôt ses gorges chaudes, ce 24 juillet 2012, de l’exposition au grand soleil des divisions du camp israélien.
«“Kadima will not embark on any operational adventures that will risk the future of our sons and daughters, and the future of Israel's citizens,” Mofaz said in a news conference on Monday. The remark comes as the Israeli regime has stepped up its war rhetoric against Syria. Israeli Prime Minister Benjamin Netanyahu said earlier that Tel Aviv will “have to act” to prevent what he called a possible transfer of chemical weapons from Syria to Lebanon.
»Analysts believe Mofaz's opposition also increases the political risks for Netanyahu in his decision-making for a potential military aggression against Iran. This comes as recent opinion polls have also shown that most Israelis would oppose any unilateral strike against Iran.
»In March, Mofaz accused Netanyahu of using the threat of a nuclear Iran “in order to divert attention from the country’s socioeconomic problems.” “It is more than political spin. He wants to present himself as the defender of Israel,” he said. » […] Meanwhile, Former US Ambassador to Tel Aviv Thomas R. Pickering said in March that “the heads of the three Israeli intelligence services do not seem to be recommending any military attack.” “It involves many to many risks and complications and it is unlikely to achieve, in any serious and continuing way, the objective of stopping the Iranian (nuclear energy) program,” he added.»
Il est difficile de ne pas observer que Mofaz “se positionne”, comme l’on dit en termes de tactique politicienne, pour mieux revenir à sa rhétorique initiale de la fin mars, quand il prit la tête du parti, pour clamer que le principal danger qui menace Israël est la situation de crise intérieure grave (voir le 30 mars 2012). Il est vrai qu’il tombe à point, comme si le hasard faisait bien les choses tragiques, ou bien, plus simplement, comme si ceci expliquait cela…
La deuxième immolation par le feu d’un vétéran de l’IDF, les forces armées israéliennes (voir Russia Today, le 23 juillet 2012), rend effectivement dramatique cette situation intérieure israélienne, avec la perspective d’une possible nouvelle poussée d’“indignation” en Israël.
En plus de la situation sociale et économique générale en Israël, le sort des vétérans israéliens des forces armées (ils sont plus de 50.000) est ainsi mis en évidence, comme aussi catastrophique que celui des vétérans US, – décidément, l’Israël de Netanyahou est en tous points conformes à son mentor US…
Un député iranien représentant les juifs irakiens, Siamak Mareh-Sedq, estimait, le 23 juillet 2012, qu’Israël est “au bord de l’implosion” du fait de sa situation intérieure. Il se réfère aux immolations, ces évènements tragiques, mais aussi, bien entendu, à la situation générale israélienne.
Il est vrai, chose qu’on commente moins souvent, que le gouvernement Netanyahou, outre de partir régulièrement en guerre-surprise, est également ultra-libéral. Cela se greffe, en l’alimentant comme on l’imagine, sur un régime de type-mafieux ; là aussi, fidèle duplication de l’American Dream.
Il est vrai que les deux pays dont on parle comme frères jumeaux, Israël et USA, sont très occupés à s’exclamer d’une surprise douloureuse et angoissée à la pensée des armes chimiques syriennes, dont on fait grand cas depuis deux semaines. La chose est devenue brutalement dramatique le 22 juillet, avec un enchaînement rapide des déclarations…
• Ce 22 juillet, effectivement, lorsque le ministre israélien de la défense, le sémillant Ehud Barak, déclarait solennellement et le plus officiellement du monde, qu’il avait donné l’ordre à l’armée de préparer une attaque en Syrie
• Le 23 juillet, le ministère des ministère des affaires étrangères (syrien) déclarait que les armes chimiques ne seraient employées que contre une “agression extérieure” (Antiwar.com, le 24 juillet 2012). Il s’agissait bien d’une affirmation selon laquelle ces armes serviraient en mode défensif, et ne seraient pas employées contre “le peuple syrien”.
• Cela n’apaisa nullement les officines étrangères des pays qui, depuis des mois s’élèvent contre le traitement fait “au peuple syrien” et qui, en l’occurrence, semblent fort peu s’en préoccuper. Encore une fois, il s’agit de la politique obsessionnelle de sécurité d’Israël. Le site DEBKAFiles nous explique obligeamment la chose, le même 23 juillet 2012, après le déclaration du ministère syrien des affaires étrangères et à l’occasion d’un avertissement solennel et personnel de BHO à Assad (le nombre de fois où Assad a été “personnellement” averti nous conduit à la conclusion qu’il lui faudrait plusieurs vies pour être quitte de ses comptes à rendre).
«Senior Israeli military officers, referring to the Syrian foreign ministry statement Monday, July 23, that Syria would only use chemical weapons against “external aggression,” found in it a direct threat by the Assad regime to turn those weapons against Israel. It was Syria’s rejoinder to Israel’s vow to use force against those chemical weapons to prevent them from reaching Hizballah’s hands in Lebanon. […] Finally, US President Barack Obama said Monday that “Assad will be held accountable if he makes the tragic mistake of using chemical weapons.
»An Israeli officer told DEBKAfile that the Syrian foreign ministry’s statement was tantamount to a declaration that the Assad regime holds all the cards on when and against whom to use its chemical weapons. America, Israel, Jordan and Turkey have no say in the matter. Assad alone will decide if and when to wage chemical warfare against such enemies as Israel and Jordan, although he may be expected to follow Iran in refraining from going after American targets at this time. He has, in other words, given himself carte blanche for resorting to chemical warfare at a time of his choosing by reiterating that his government is subject to external Arab and Western aggression.»
C’est alors qu’éclate un coup de tonnerre, sous la forme de deux déclarations d’officiels du ministère de la défense, – dont le chef d’état-major général de l’IDF, le général Benny Gantz, qu’on a déjà entendu en d’autres occasions (voir le 28 avril 2012). Continuons avec DEBKAFiles qui, cette fois, est aux premières loges, et qui défend son fond de commerce essentiel. (Texte du 24 juillet 2012 qui, depuis que nous l’avons consulté et au moment où nous mettons en ligne, a curieusement disparu de la première page de présentation du site.)
«Amos Gilead, head of the Defense Ministry Political and Security Division, went first with a long radio interview on Tuesday, July 24, followed by Chief of Staff Lt. Gen. Benny Gantz – both administering their own brands of tranquilizer. Gilead said that the Assad regime was in full control of Syria’s unconventional weapons and so, while Israel’s intelligence bodies must be extra alert and prepare for all eventualities in Syria, there is no need to panic.
»Gen. Gantz offered the Knesset Foreign Affairs and Security Committee this abstruse thought: “If you work from one focus, you may find it hard to find the point, but if you act broadly, you may quickly find yourself in an area that is broader than you planned.” Since the topic he was addressing was Syria’s chemical and biological arsenal, he probably meant to say something like this: If the IDF only targets Syria’s unconventional arsenal, its aim might not hit home. But by missing its aim, the Israeli military may find itself dragged very quickly into a comprehensive war with Syria – and perhaps Hizballah and Iran, to boot.
»The chief of staff, like the defense ministry official, therefore broke ranks with the muscle-flexing President Shimon Peres, Prime Minister Binyamin Netanyahu and Defense Minister Ehud Barak, by urging a large measure of restraint against Syria’s admitted possession of chemical weapons. The two Israeli security chiefs answered the Syrian Foreign Ministry’s warning Monday - that Damascus would only use chemical weapons if faced with “external aggression” - by making it clear that Israel is not planning to attack Syria. Therefore, Bashar Assad has no cause to target Israel for any unconventional warfare attacks he may plan…
Les commentaires de DEBKAFiles sur ces interventions sont cinglants, directs, sans ambiguïté. Ils reflètent clairement une bataille interne sans précédent au sein de l’appareil de sécurité nationale, ou, plus précisément sans doute, une “bataille interne” entre l’essentiel de l’appareil israélien de sécurité nationale et la direction politique…
«DEBKAfile’s military sources strongly doubt that Gilead and Gantz will achieve their purpose – either in Damascus or at home. They have only generated the troubling impression of an Israeli leadership divided against itself by broadcasting mixed signals on the highly incendiary issue of the largest chemical arsenal in the world in the hands of one of its most ruthless despots.
»Rather than inspiring confidence and calm in the Israeli street, Gilead and Gantz sowed confusion and alarm – most of all by their assurance that Assad is in “full control” of his unconventional weapons arsenal and it has not yet passed into “negative hands.”. If that is so desirable, why did US President Barack Obama issue a grave warning to the Syrian ruler Monday that he would be held accountable by the world and the United States “if he makes the tragic mistake of using chemical weapons?” […]
»And if Israel has turned to a policy of tolerance for the mass murderer in Damascus and his control of chemical weapons, why did Defense Minister Barak order the Israeli military to prepare for a possible attack on that weapons arsenal? By flatly contradicting the statements of Israel’s prime minister and defense minister, the two security chiefs caused extreme damage to Israel’s credibility without serving any beneficial purpose. How will this be taken in Damascus and Tehran?»
On comprend bien que ce n’est pas tant le cas du chimique syrien qui nous importe ici, que le cas de l’attitude israélienne face au chimique syrien. DEBKAFiles en perd sa logique, tant il balbutie de fureur devant l’intervention de Gilead-Gantz, puisqu’il nous parle du «largest chemical arsenal in the world in the hands of one of its most ruthless despots», alors que ce que craignent Netanyahou-Barak n’a rien à voir avec l’anathème anti-Assad, ni avec l’usage qu’Assad ferait de son chimique, mais avec «…a risk Syria’s chemical weapons and missiles could fall into the hands of military groups [ such as Hizballah or al Qaeda]»… Quand on perd son calme, on n’échappe pas aux fosses d’aisance si confortables des narrative du Système (Assad = Hitler N°6 ou Hitler n°7, on ne sait plus…).
Il n’empêche qu’il y a bel et bien un cas intéressant, du point de vue israélien, et du point de vue intérieur israélien.
• D’une part, la direction politique israélienne proclame qu’il y a grand danger dans le cas du chimique syrien. Et, pour ce cas, dans la logique de la politique obsessionnelle de la sécurité en Israël, on admettra que cette alarme est plus justifiée que les galéjades qu’on égrène depuis des années concernant le nucléaire iranien. On peut évidemment, on doit mettre en cause cette “politique obsessionnelle de la sécurité” d’Israël, mais alors on doit remonter fort loin ; mais une fois admise qu’elle existe comme un fait, il faut admettre que le chimique syrien qui existe, qui est tout de même au milieu d’une situation très agitée, fort proche d’Israël, est bien plus préoccupant que le nucléaire iranien, qui n’existe pas, qui ne sera peut-être jamais fabriqué, etc.
• Plus encore, l’alarme israélienne est appuyée par toute la pompe américaniste, le président BHO lui-même qui s’extirpe quelques minutes de sa course au fric pour sa réélection.
• Là-dessus, deux personnalités israéliennes dont le chef d’état-major lui-même interviennent, disant quasiment que “la menace chimique syrienne, ce n’est pas très sérieux”, qu’Assad est complètement en position de contrôle de la situation (tout juste si on ne nous dit pas que ce Assad n’est pas un mauvais bougre)… Par contre, attention à tous ces bruits alarmistes, à ces plans d’incursion en Syrie, car cela peut déboucher sur une guerre majeure avec la Syrie, entraînant dans la foulée le Hezbollah… et l’Iran ! Il est vrai qu’il s’agit d’une démarche complètement explosive (dont il ne nous semble pas assuré qu’elle n’ait pas été concertée avec les chefs militaires US, eux-mêmes fort peu enthousiastes pour une intervention en Syrie, sous quelque forme que ce soit) ; et une démarche explosive qui s’appuie sur une connaissance nécessairement bien documentée de la situation.
…On a rarement eu l’exemple d’une démarche si complètement contradictoire, une véritable insubordination, dans une situation de tension dramatique, entre des personnalités importantes sinon essentielles (Gantz) de la direction de la sécurité nationale, et la direction politique, et tout cela étalé publiquement. Insistons sur cette circonstance de la “situation dramatique“ actuelle, avec la crise syrienne en train de passer des conditions d’un conflit antiguérilla aux conditions d’une véritable guerre, avec de multiples interférences extérieures, qui exerce une pression terrible sur la frontière israélienne. La crise syrienne, en fait de vérité de la situation, du point de vue israélien, c’est bien autre chose que la fantomatique crise du nucléaire iranien.
Que la direction de la sécurité nationale israélienne ne puisse parvenir à présenter un front uni dans une telle situation, pour une telle circonstance (incursion ou pas en Syrie), c’est une véritable tragédie nationale pour Israël. Que Gantz, notamment, ait jugé nécessaire de faire une telle déclaration, “dans une telle situation et pour une telle circonstance”, montre le mépris et l’hostilité où il tient sa directions politique. (Et sa position de force, également : Gantz n’est évidemment pas seul dans ce sentiment, il a avec lui l’essentiel de la direction de sécurité nationale, – renseignement, police et sécurité du territoire, armée).
Qu’une telle crise soit exposée de cette façon, “dans une telle situation et pour une telle circonstance”, sans que rien ne semble devoir être fait à l’encontre de Gantz pour rétablir le respect de la hiérarchie des pouvoirs, en dit long sur la situation intérieure d’Israël. Dans ce cas, on ne doit pas en faire une question de simple sécurité nationale mais bien une question de stabilité structurelle du pays, avec un pouvoir politique en complète déliquescence et un état pathétique de la situation intérieure générale du pays. Par conséquent, l’écart de Gantz s'accorde dans ce cas avec les deux immolations, avec la sortie du politicien Mofaz, selon une même logique qui touche tout le pays. C’est la substance même d’Israël qui est en train de se dissoudre, – “implosion” ou pas, qu’importe, – et d’abord la substance de l’État lui-même.
Il s’agit d’un cas typique où les structures en plein course d’effondrement du Système sont confrontées aux situations déstructurantes que suscite le Système lui-même, – surpuissance débouchant presque directement en autodestruction, sans même de sas intermédiaires. En effet, les politiques extrémistes conduites par le Système, tous pays confondus et agglomérés dans la masse informe du bloc BAO, que ce soit à l’encontre de l’Iran, de la Syrie, de la Russie, etc., sont en train de renvoyer des ondes de chocs terrifiantes de puissance déstructurante. Le terme de blowback, employés en général pour les conséquences contre-productrices d’actions clandestines de type-CIA, est aujourd’hui bien incapable de rendre compte de la puissance et de l'extrême rapidité du phénomène auquel nous assistons.
Bien entendu, Israël est un cas en pointe, mais ce n’est aussi qu’un cas parmi d’autres, comme on l'a noté plus haut. Le même processus menace bien d’autres pays du bloc BAO, entre les narrative conduisant des politiques insensées, nihilistes et totalement chaotiques, et les réactions que la vérité de la situation suscite, avec les désordres intérieurs qui s’ensuivent dans les directions de ces pays et dans ces pays eux-mêmes. Le lien est désormais formidable, direct, impressionnant de puissance, entre les politiques extérieures de surpuissance prédatrice et les effets d’autodestruction aussitôt manifestés de ces politiques.