Notes sur notre grotesquerie

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Notes sur notre grotesquerie

“Grotesquerie” : «Chose grotesque”… Le bloc BAO est une grotesquerie, notamment et d’une façon active et convaincante, lorsqu’il s’agit de la question de la crise à propos de la religion musulmane, et de la question, qu’on se permettra également de décrire comme étant en état de crise, de nos “valeurs” à propos de la crise à propos de la religion musulmane. Tout cela renvoie, direct et sans escale, à la crise du Système dont le bloc BAO porte l’essentiel du poids. (Et, dans le bloc BAO, pour ce propos, la France essentiellement, qui étincelle des mille feux artificiels de sa bassesse actuelle.)

Ce préambule a tout à voir, – peut-être à l’étonnement de certains, esprits forts ou esprits volages, – avec ce que nous désignons comme la “troisième vague” du “printemps arabe”. Il s’agit des évènements depuis le 11 septembre 2012, simultanément les évènements de Benghazi et la “diffusion” de la production nommée Innocence of Muslims ; et, pour faire bonne mesure de la fameuse “grotesquerie”, l’intervention éclairée de Charlie Hebdo comme commutateur des Lumières françaises.

La “troisième vague”

…Pourquoi nommer cela “troisième vague du printemps” ? La première (vague) a été déclenchée le 19 décembre 2010 en Tunisie, a touché la Tunisie, l’Égypte, la Jordanie, la Libye, la Syrie, Bahrain, l’Arabie, le Yemen, etc., dans des situations de contestations des pouvoirs établis, de diverses façons et avec des fortunes diverses. Certaines de ces situations ont abouti à des actes décisifs, d’autres toujours en cours, d’autres détournés de leurs cours en une manœuvre désormais évidente. C’est ce deuxième type d’évolution qui forme la “deuxième vague”, qui est venue se superposer à la première dans une tentative de récupération “démocratique” du mouvement par le bloc BAO. Le résultat de “la démocratisation par les bombardements”, version post-postmodernistes des “bombardements humanitaires” de Vaclav Havel (Kosovo, 1999), est ce qu’il doit être, – voir les situations libyenne et syrienne.

…Là-dessus se superpose la “troisième vague”, déclenchée par des imbroglios divers où l’on retrouve Innocence of Muslims, les moustaches du pasteur Jones étiqueté “agent du Mossad” ou “correspondant de Gladio” selon les sources, la liquidation catastrophique (pour les USA) de l’ambassadeur des USA en Libye, Charlie Hebdo et Cie. Une fois de plus, et quelle que soit l’impulsion originelle de la chose, l’ampleur du déferlement a surpris par sa force, sa durée et ses effets. Aussitôt, une situation nouvelle s’installe. En un sens général et hors de toutes les considérations tactiques et complotistes, en effets nets pour la situation générale, la “troisième vague” pourrait être vue comme une riposte de la “première vague” à la tentative de récupération de la “deuxième vague”. C’est une interprétation et on la laissera en l’état, le seul véritable intérêt étant de tenter d’identifier et de définir la nouvelle situation ainsi créée.

La rue règne

On a vu, le 21 septembre 2012, l’avertissement US à Israël, en cas d’attaque contre l’Iran. Cet avis intéresse moins le cas spécifique de l’attaque elle-même que ce qui nous intéresse, savoir le cas général de la situation nouvelle instaurée par la “troisième vague”.

«…“Today the Arab leaders do not control their peoples, the street controls the leaders,” said a high-ranking Israeli political official who was privy to the American warnings… […] “An Israeli strike is just what the Iranians need. The entire Arab and Muslim street will take to the streets to demonstrate…” “What happened with the film against Mohammed is just a preview of what will happen in case of an Israeli strike…” […] Egyptian and Jordanian leaders “would not be able to withstand the pressure of the masses and would have to take drastic measures such as the severing of diplomatic ties and annulling the peace agreements, despite the fact that they are personally opposed to a nuclear Iran.” […] [A strike] “would have severe ramifications on ties between Israel and other Muslim countries around the world, which ... would be hard put to remain indifferent.”»

… Cette phrase, évidemment, concerne toutes les polémiques et crises possibles, et pas seulement l’hypothèse archi-connue et archi-dramatique de l’attaque contre l’Iran : “Aujourd’hui, les dirigeants arabes ne contrôlent plus leurs peuples, ce sont les peuples qui contrôlent leurs dirigeants”. Autrement dit, la rue règne, comme aux plus beaux jours de la place Tahrir, sauf que la situation telle qu’elle a évolué depuis, notamment avec la “deuxième vague”, devait effectivement verrouiller une vraie démocratie, – celle où la rue se tait. Ce n’est pas le cas ; si “la rue règne”, c’est dans une occurrence bien différente de la chevauchée désormais légendaire de la place Tahrir.

La rue, ce “nouveau tyran”

La meilleure preuve de cette situation qui est aussi une préoccupation pour les “vrais” démocrates, on la trouvea contrario dans cette citation d’un article du journal Al Hayat, publié à Londres. Elle est extraite d’un article, du 21 septembre, de la commentatrice et principale correspondante diplomatique du journal, Raghida Dergham, – sur le “nouveau tyran qui menace la ‘révolution du changement’”.

«There is a new tyrant in the Arab region, which is going through a troubled transitional phase in the wake of the revolutions of change that have toppled the dictators: It is the unruly mobs that are threatening the course of democracy and imposing dangerous tendencies on the future of the Arabs, and their relations with both West and East.»

Il faut savoir que Al Hayat est une publication appartenant à la maison Saoud, la direction royale et pullulante de l’Arabie saoudite, et que Dergham exprime donc en toute indépendance un avis qui rencontre le sentiment de cette même maison des Saoud. L’idée est simple : la rue est l’ennemie de la démocratie, et d’abord l’ennemie du régime saoudien qui est comme l’on sait exquisément démocratique. (On le voit avec la démission de plus de 50 juges saoudiens, excédés des pressions exercées contre eux pour qu’ils appliquent des peines d’une sévérité excessive contre les manifestants “de la rue saoudienne”, – les juges ayant donc partie liée avec “la tyrannie” réprimée quotidiennement dans les rues saoudiennes.)

Bref, si l’Arabie exècre à ce point la grosse décade de manifestations dans les rues arabes, depuis le 11 septembre, et depuis Innocence of Muslims qui n’a pas l’air d’émouvoir les défenseurs de la foi intransigeante qui pullulent dans les palais de Ryad, c’est que l’irruption de la rue est le grand événement de la “troisième vague” et qu’il change tout, et qu’il perturbe complètement la course de la “deuxième vague” dont l’Arabie est l’un des embruns principaux.

Le “néo-terrorisme”…

Certains prétendent que cette “troisième vague” a été l’occasion de concrétiser de nouvelles alliances, de nouvelles tactiques, au sein de diverses forces irrégulières, dont un al Qaïda de plus en plus ressuscité en divers acronymes très “tendances” (AQIM, AQAP, AQI, etc., pour In Maghreb, in Arabian Peninsula, in Irak, etc.). Il s’agit, selon une analyse de DEBKAFiles que nous examinons par ailleurs ce 24 septembre 2012, d’un changement de nature de ce que l’on a coutume de nommer “le terrorisme”.

Cette analyse nous paraît correspondre en tous points à l’évolution de la situation accompagnée, ponctuée et sans doute accélérée par cette “troisième vague”, dont les embruns dépassent largement le cadre géographique du “printemps arabe”. D’une certaine façon, “le terrorisme”, qui abandonnerait le cadre intégriste de “la terreur”, s’intégrerait dans un climat général qu’il a complètement contribué à créer. Cette évolution conduit à une dissipation rapide des restes du manichéisme originel établi au lendemain de 9/11 (“c’est eux ou nous”, “eux” représentant l’intégrisme aussi bien de la conception que de l’action, intégrisme avec lequel il est officiellement décrété qu’il est impensable de traiter). Les situations se relativisent, entérinant les véritables changements intervenus dans les pays du bloc BAO depuis l’automne 2008, et dans le monde arabe depuis décembre 2010. Le bloc BAO, par son aveuglement et son absence complet de sens principiel, enrôlant sous sa bannière divers al Qaïda quand cela l’arrange, a largement contribué à cette évolution. (Il est vrai que, depuis la narrative “élimination de ben Laden”, Obama a institué la narrative suivante qui est : “vaincu, le terrorisme n’existe plus…”)

Dans ce cadre, le changement de nature de la chose identifié par DEBKAFiles se défend conceptuellement aussi. Le “terrorisme” se fait complètement “guérilla globale”, non pas au sens d’une guérilla installée dans des territoires où elle doit être “comme un poisson dans l’eau” au sein de la population, mais au sens d’une tactique ponctuelle faite d’actions précises effectuées par des commandos, essentiellement au cœur du dispositif ennemi dans des conditions de préparation clandestine. C’est le modèle opérationnel des “forces spéciales” du bloc BAO et du JSOC américaniste, retourné contre ce même bloc BAO.

Morsi au centre du jeu

L’enjeu politique est capital et fait toute l’importance de cette évolution tactique en lui donnant la dimension stratégique. La “troisième vague” contribue surtout à mettre en évidence le problème central de l’Égypte, pays arabe démographiquement le plus important du Moyen-Orient, stratégiquement essentiel, potentiel nouveau front anti-israélien, etc. L’attitude ambiguë de Morsi pendant les mouvements de rue contre l’ambassade US, à propos de Innocence of Muslims, n’a échappé à personne, et surtout pas à la partie américaniste, qui bloque pour l’instant les discussions sur une aide d’urgence (voir à nouveau ce 24 septembre 2012)… Mais nous sommes aujourd’hui dans l’objectivité et la relativité, comme on l’a dit, et en même temps que les USA se durcissent face à Morsi, les Européens l’accueillent avec enthousiasme et, conduits par leur automatisme de “démocratisation”, lui offrent leur aide.

Notre conviction a toujours été, depuis la chute de Moubarak, que l’Égypte serait irrésistiblement entraînée vers la restauration de son indépendance et de sa souveraineté. Les accointances Morsi-USA, selon ce que certains en disent, ne tiennent rien sur un moyen terme qui équivaut, par les temps qui courent si vite de la contraction de l’Histoire, à un court terme raisonnable d’avant la séquence métahistorique que nous vivons. D’une façon ou d’une autre, l’Égypte est promise à se délivrer de la tutelle d’une puissance qui ne cesse d’accélérer elle-même son propre effondrement, et d’accumuler par conséquent les erreurs et les faux-pas. La “troisième vague” va évidemment contribuer à cette évolution, en l’accélérant encore.

L’arme du blasphème

La “troisième vague”, c’est aussi, – c’est d’abord, diraient certains, – le film Innocence of Muslims. Les descriptions diverses (“insultes, “provocations ”, “machinations”, etc.) n’ont pas manqué, non plus que les théories à ce propos. Thierry Meyssan parle justement, d’une façon générale pour cette affaire Innocence of Muslims, d’une “tactique du blasphème” (le 17 septembre 2012, sur Voltairenet.org) ; on retrouve bien sûr cette “tactique” dans le cas des Pussy Riot, dans le cadre de l’“agression douce” contre la Russie.

D’autre part, il est manifeste qu’on ne peut faire de la diffusion du film la cause fondamentale de la “troisième vague”. C’est un facteur de communication, où l’aspect religieux est utilisé au profit de la communication, qui rencontre une situation conjoncturelle de tension extrêmement forte. Il s’agit alors d’une situation générale, politique, psychologique, culturelle, religieuse certes, – au-dessus de tout cela, métahistorique. De ce point de vue, Innocence of Muslims s’inscrit, éventuellement comme détonateur, éventuellement comme manipulateur, et en référence au 11 septembre comme l’est l’attaque de Benghazi, comme un élément parmi d’autres d’une situation générale. Aussi le plus intéressant concernant cet aspect des choses n’est pas soin rôle dans la “troisième vague” mais son “effet boomerang”, de type blowback si l’on veut.

Dans ce cas, la France a la vedette… Elle l’a, d’une façon intéressante dans son aspect le plus caractéristique de la “grotesquerie”. Il s’agit de l’épisode, héroïque pour certains qui ont l’héroïsme qu’ils peuvent, grotesque pour d’autres qui s’en tiennent à la relativité des piètres choses, de Charlie Hebdo et de ses caricatures. La grotesquerie est dérisoire en elle-même, elle est par contre importante et significative pour peser et mesurer une situation objective, sans juger de ses références, dans son évolution relative. Il apparaît alors que si Innocence of Muslims fut conçu comme une “arme” pour telle ou telle machination partie de tel ou tel centre du bloc BAO, cette “arme” se retourne contre nous (dito, bloc BAO), pour mettre en évidence nos propres contradictions. Dans ce cas, la grotesquerie parisienne a un rôle universel de révélateur ; c’est une façon comme une autre, mais originale certes, de restaurer le rôle central de la France comme facteur révélateur de la situation du monde, dans le concert actuellement cacophonique des grands évènements du monde.

La geignarde comédie des “valeurs”

L’affaire “Charlie Hebdo et ses caricatures” est la nième resucée d’une action habituelle au parisianisme et au parti des salonards, rameutant l’humour moralisant de provocation potache et boutonneux qui prétendrait à être du sous-sous-Daumier à la bonne conscience conforme à la liberté anarchiste tenue dans les bornes du conformisme. Comme le fait remarquer Eric Zemmour (Ca se dispute, I-Télé le 22 septembre), ce n’est pas demain la veille qu’on verra dans Charlie Hebdo, suivant une série de caricatures ridiculisant le Prophète, une série de caricatures ridiculisant le culte de l’Holocauste… Il y a donc sacré et sacré, sacré bon Dieu ; cela limite l’audace de la liberté de l’esprit dans le réseau tendance du conformisme et renferme le compliment dans les normes du Système. Charlie Hebdo fait donc partie de la bande.

Pour autant, la grotesquerie n’est pas inutile. Les caricatures suivant Innocence of Muslims ont réactivé l’éternel débat sur “la laïcité en danger”, – “la laïcité comme valeur fondatrice de la République”, dit-on avec une emphase bombastic. Mais cette fois le sempiternel débat de la laïcité n’est pas limité, comme moyen de s’activer tout seul par un moyen-repoussoir, à l’extension à l’autre sempiternel débat hexagonal, sur l’immigration ; il est “en phase”, comme l’on dit, avec les évènements d’un monde en ébullition, et le nom de Charlie Hebdo a fait le tour du monde. Même ce cher M K Bhadrakumar a découvert l’existence de l’honorable Charlie Hebdo, ce 21 septembre 2012  :

«Of course, there is no way we can accept what the French journal has done, The more revolting part of it is the attitude of the French government to the act of blasphemy, seeing it as a law-and-order issue. (It rushed riot police to protect the Charlie Hebdo office!) And, come to think of it, it is this very same government in Paris that is today at the forefront of forcing a regime change in Syria with a view to reclaim its colonial legacy in the Muslim Middle East. That is also supposed to be an enterprise championing “freedom”! …»

Au contraire de l’épisode précédent (les caricatures danoises de 2006, Charlie Hebdo et la solidarité de la vertu-Système), parfaitement conforme et intervenant dans un monde musulman paralysé par la bataille en Irak, cette mise “en phase” se fait effectivement au moment où “le monde est en ébullition”, et le monde musulman précisément, – mais “le monde musulman” par rapport au bloc BAO et à son interventionnisme, et en phase de rejet de la chose. Cela fait que les geignements parisiens sur les “valeurs“ qui s’opposent et s’entrechoquent, – laïcité, interdiction du port du voile islamique, liberté de paroles, respect des convictions diverses, révérence devant l’immigration et les musulmans, etc. – prennent une valeur universelle en s’insérant dans le débat explosif que la “troisième vague” met en évidence. Les caricatures de Charlie Hebdo animent aussi bien les talk shows qu’elles font penser à l’attaque contre l’ambassadeur Stevens, à l’affrontement syrien, à l’attaque-surprise annoncée depuis six ans contre l’Iran. Voilà où se niche la vertu d’universalité de cette grotesque France présente.

France, terre d’accueil de l’infamie

Ainsi, – grotesquerie pour grotesquerie, – la grotesque scène parisienne parvient à “mettre en scène”, effectivement et sans le réaliser, le spectacle des contradictions intérieures de ces “valeurs” qui constituent le faux-nez du Système, et à le faire d’une façon qui met cette partie-là du spectacle en corrélation directe avec les évènements de la “troisième vague” et le bouleversement en cours. Le grotesque devient, dans ce cas, une mesure de la gravité de notre crise de la perception, qui témoigne de la crise profonde de notre psychologie. Ainsi y a-t-il en regard et d’une façon accusatrice, ces élites pérorant au nom de “la laïcité comme valeur fondatrice de la République”, ce gouvernement mobilisant toutes ces forces pour empêcher des manifestations qui devraient figurer la “liberté de parole” pour critiquer les caricatures de Charlie-Hebdo éditées au nom de la liberté de parole, et se retrouvant avec quelques centaines de CRS pour un manifestant (à Marseille, paraît-il), cette opinion furieuse des agitations islamistes de la “troisième vague” ; et, d’autre part, la somme et les effets du martyre que les forces du bloc BAO, US et israéliennes essentiellement, ont fait et font subir depuis l’ouverture de la séquence (9/11) à l’Irak, à l’Afghanistan, à la Palestine, etc., et un peu partout avec les drones-tueurs. L’inégalité furieuse de poids et de souffrance de ces deux types d’événement, si elle ne change pas la perception, exerce une pression terrible sur les psychologies dont l’effet va être d’accélérer le processus de fragmentation et de dissolution de la politique générale du bloc BAO.

Le comble de l’ironie se trouve dans ce qu’il est effectivement donné à la France, au plus bas où elle se trouve aujourd’hui, d’être le véhicule de cet événement. Personne ne s’est aperçu de rien dans les talk-shows du parti des salonards, où ce qui compte est de parler de “la laïcité“ et de “la République”. Mais nous parlons ici des évènements souterrains, progressant au niveau de nos psychologies, les rendant de plus en plus fragiles, de plus en plus ouvertes aux mises en cause extérieures de nos certitudes et de notre aveuglement. Dans cette occurrence, la France a glorieusement assumé la tâche sublime, en étant elle-même, dans le chef de ses élites-Système, une parfaite représentation de notre contre-civilisation, de mettre involontairement en évidence les tares irrépressibles de cette contre-civilisation. A quelque chose l’infamie est bonne…

Le Système en phase d’entropisation

Ainsi en est-il de la “troisième vague” du “printemps arabe”, qui présente la vertu de la mise à nu des choses. La “première vague” représentait le domaine de l’activité déstabilisante, à la fois intérieure et collectives, de ces divers pays de la chaîne crisique commencée le 19 décembre 2010 ; la “deuxième vague” représentait la réaction du bloc BAO refermé sur sa perception, rapidement accomplie avec la Libye, un peu moins facile, évidemment, avec la Syrie. La “troisième vague” est en train de rompre ce cloisonnement, en additionnant des évènements qui rassemblent, confrontent, connectent les acteurs des deux premières vagues jusqu’alors séparés.

Ainsi l’activisme de politique extérieure du bloc BAO au service du Système, déclenché essentiellement pour éloigner de lui-même le poids et la vision de sa propre crise qui est la crise du Système, y ramène avec une brutalité et une vigueur significatives. L’événement provoque une onde de choc d’une telle force qu’il parvient à briser le cordon sanitaire entourant l’élection présidentielle US, où l’on ne parlait pas de politique extérieure par accord tacite, et où l'on est conduit à en parler finalement, y compris à propos de l’Afghanistan elle-même entrée dans la phase terminale de la crise déclenchée par l’intervention des USA et du bloc BAO. Observant le comportement de l’administration Obama qui aimerait tenir les choses jusqu’au 6 novembre, Tom Engelhardt remarque (dans son TomDispatch, le 23 septembre 2012) : «Which is why, from Sudan to Libya, the Obama administration is playing little Dutch boy, trying to plug every hole it can in the Middle Eastern dike and praying that any coming tsunami won’t hit before the election.»