Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
1382L’attentat manqué du vol 253 fait son effet au-delà de tout ce qu’on pouvait attendre. Le Yemen est soudain devenu l’urgence du jour, avec une exploitation à fond par les républicains et assimilés aux USA (une lettre collective à Obama de 5 sénateurs, dont les inévitables McCain et Lieberman) appelant à la mobilisation générale.
Ce 31 décembre 2009, pour fêter le réveillon, le Times de Londres est fidèle à son rôle zélé de sonneur d’alarme dans la grande saga de la guerre contre la terreur. Il nous informe là-dessus – si on peut parler d’être “informé”.
«The global war on terror began a year before September 2001, when a speedboat with militants and half a tonne of explosives rammed an American destroyer anchored in the Yemeni port of Aden. Seventeen US Navy sailors died. Nearly a decade later, Yemen is again the front line in a conflict that President Obama refuses to call a war but one that has changed little since his predecessor rallied the American nation with a security doctrine that he summarised in two words: “Let’s roll.” […]
«Security experts fear that al-Qaeda is trying to turn the lawless country — the homeland of Osama bin Laden’s father — into a base of operations, taking advantage of the security and economic crises that have undermined a weak government.»
@PAYANT Hop, plus question d’Afghanistan, toute l’attention sur le Yemen. Pourtant, la situation en Afghanistan n’est pas idyllique et l’on parle tout de même de l’établissement du Grand Califat anti-occidental– mais quoi, la Grande République n’a pas peur de se charger d’autant de conflits qu’en nécessitera la mythique Grande Guerre contre la Terreur. N’empêche, il y a des problèmes, et ils sont de deux ordres.
• On connaît la psychologie de la chose. Le système US est incapable de se tenir concentré sur plusieurs problèmes. Si toute l’attention est désormais portée au Yemen, la mobilisation en cours pour l’Afghanistan en pâtira énormément, de toutes les façons. Or, la campagne engagée en Afghanistan est cruciale et se présente sous les pires auspices; si on y ajoute l’inattention, et la dégradation de sa priorité, les pires prolongements sont à craindre.
• Les moyens militaires et para-militaires des USA sont de plus en plus limités, comme on ne cesse de le répéter. Ajouter un nouveau fardeau d’un éventuel engagement important (le Yemen) au reste, cela fait beaucoup, de plus en plus. L’appareil militaire américaniste, épuisé, va être soumis à de nouvelles tensions et de nouvelles exigences, alors que son budget explose et menace l’équilibre des acrobaties d’une dette publique colossale.
…Mais que vaut tout cela, à côté du déchainement de l’appareil de communication, articles, analyses, proclamation des républicains qui profitent de l’aubaine pour attaquer Obama sur un autre front (!)? Le système a démarré au quart de tour, et il fonctionne à merveille, dans le sens de créer de toutes pièces une nouvelle narrative où l’on apprend que le sanctuaire d’al Qaïda n’est pas du tout les “trous noirs” à la frontière de l’Afghanistan et du Pakistan – qu’est-ce qu’on nous chante là? – mais le Yemen, bien sûr. L’enchaînement des paranoïas et schizophrénies diverses d’un système où la communication brasse de l’argent, de l’influence, etc., dans la manipulation et la création d’événements, est absolument huilé. Le Yemen est désormais l’objet de toutes nos attentions dans une Grande Guerre contre la Terreur dont on apprend qu’elle existe plus que jamais.
Tout cela est peut-être un coup monté, ou un coup mal monté, ou l’épisode d’un Grand Dessein de l’un ou l’autre, mais le résultat est toujours le même, et c’est bien cela qui nous importe. Le désordre s’accentue et, surtout, la “discorde chez l’ennemi”, avec des républicains mettant Obama en position de défensive et obligé d’en rajouter; la pression sur des moyens de plus en plus réduits d’intervention s’accentue; toute rationalisation d’une politique extérieure déjà en pleine déroute est encore plus impossible et impensable; la perte de contrôle des différentes forces et centres de pouvoir du système s’accentue.
Mais c’est indiscutablement, au premier chef et dans le chef des effets opérationnels, dans la crise de l’Afghanistan que l’affaire yéménite interfère. Les conséquences, si l’alarme sur le Yemen s’accentue (et les républicains ont tout intérêt à le faire), sera de mettre de plus en plus en cause et en danger l’effort actuel qui commence en Afghanistan. A ce point où l’on se trouve en Afghanistan, une conséquence extrêmement dramatique n’est pas à écarter, évidemment pour les forces US et pour les forces de l’OTAN.
Mis en ligne le 31 décembre 2009 à 07H49