Psychologie de “Bomb, bomb, bomb” McCain

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In illo tempore, John McCain se rendit célèbre en interprétant l’air des Beach Boys sur l’air des lampions, avec bien entendu l’Iran pour cible (“Bomb, bomb, bomb Iran”). Il se préparait déjà aux présidentielles, fut effectivement candidat, puis battu par vous-savez-qui (en fait, battu par la crise, comme l'on sait en vérité, car un McCain épaulé d'une Palin sans la crise financière aurait eu bien des charmes pour l'Américain moyen).

John McCain confirme, à l’occasion de la crise iranienne, son caractère fantasque, ce qui conduirait de mauvais esprits à se demander, eût-il été élu le 4 novembre 2008, quelle politique il eût choisi dans cette même crise iranienne. Caractère fantasque, c’est-à-dire également contradictoire parce que, d’un côté, il ne ménage pas ses compliments à son vainqueur, qu’il juge excellent président, de l’autre, à l’occasion de cette même crise iranienne, il est le premier, et l’un des rares, à critiquer vertement Obama pour n’être pas assez dur, pas assez offensif, pas assez menaçant (“Bomb, bomb, bomb Iran”). Ainsi se montre-t-il à cet égard comme l’un des derniers survivants de la phalange neocon, bien qu’il n’en ait jamais été officiellement, – mais on conclurait tout de même qu’il est, psychologiquement, bien plus neocon que beaucoup d’entre eux.

C’est l’occasion, au travers d’une interview par Rachel Maddow sur MSNBC, dont des extraits sont repris par RAW Story le 23 juin 2009, d’observer le portrait de McCain, avec quelques acolytes, que trace David Ewards, rédacteur en chef de The Nation.

« “I want to make sure I understand both sides in this Republican fight,” Maddow said. “What is it that John McCain and Lindsey Graham and all those guys actually want the White House to do?” Hayes responded, “You know, that‘s a really good question. I mean, I think in the long mythology of neoconservativism, there is this notion that, you know, Reagan single-handedly brought down the entire Soviet empire because he said, ‘Tear down this wall,’ and that somehow if you are like really willful and chest-thumping that the world will sort of bend to your will.”

»“So I imagine they want, you know, sterner rhetoric,” Hayes added. “They want some kind of escalation. Ward(ph) hopes that they don‘t want some kind of military action although you never because people have been advocating all sorts of crazy things vis a vis Iran for a long time. So I don‘t know.”

»Hayes believes that “there is a tremendous pathological narcissism on behalf of people like McCain and Graham that everything revolves around the U.S. and revolves around our own kind of preening moral self-satisfaction. And it‘s actually - it‘s really destructive. I mean, if the president were doing what they want him to do, we would see things get worse in Iran, worse for the dissidents and protestors. It‘s very hard to excuse.” […]

»Hayes added, “I think John McCain, in some ways, is the most intense of true believers in terms of elected officials in American life in which every battle is a battle between the righteous U.S. which is a beacon of freedom and the evil forces of oppression, tyranny, wherever they may be and whatever kind of regime they might be occupying, and that everything kind of in this the solar system way, the U.S. is the sun and all foreign policy revolves around us and the freedom that we cast out into the world.”»

Il est somme toute sympathique d’entendre caractériser, par un journaliste et commentateur US, une conception politique selon laquelle “the U.S. is the sun and all foreign policy revolves around us and the freedom that we cast out into the world.” par la remarque qu’il s’agit d’un comportement psychologique marqué d’un “tremendous pathological narcissism”. Est-ce effectivement un caractère de la psychologie de McCain (et des divers neocons et associés)? Cela paraît être une explication satisfaisante, et nous fait imaginer de bien belles occasions gâchées avec sa défaite à l’élection présidentielle.

Cela nous conduit évidemment à mettre une fois de plus l’accent sur l’importance de la psychologie, et à nous demander si le mouvement néoconservateur, bien plus qu’une idéologie qui n'aurait été qu’un maquillage idéologique dont on se serait accordé à le peinturlurer pour rester entre intellectuels, n’est pas d’abord une forme caractéristique de la psychologie américaniste. On dirait qu’il s’agit de la forme exacerbée, ou de la phase terminale de la psychologie américaniste, c’est-à-dire effectivement une pathologie de la psychologie; John McCain en est évidemment, par ses traits propres, un exemplaire étonnant malgré sa non-appartenance formelle au mouvement.

McCain reste, malgré sa défaite, un cas effectivement intéressant parce qu’il a dans ses choix politiques, dans sa psychologies, des aspects très peu conservateurs au sens US du terme. Mais lorsqu’on en vient à la question du bellicisme, des “valeurs” portées par les bombes, essentiellement les valeurs libérales et démocratiques, celles qui justifient avec zèle et enthousiasme les “bombardements humanitaires” (dixit Vaclav Havel en avril 1999 à propos du Kosovo), il semble qu'il ne puisse plus se tenir, qu'il y a quelque chose de plus fort que lui. Non, finalement ce mélange d’humanitarisme si proche de la gauche extrêmement libérale européenne et de bellicisme dévastateur pour le bonheur des gens fait de lui un véritable neocon d’honneur, c’est-à-dire un représentant typique de la psychologie moderniste confrontée aux agaçantes réticences et résistances de la réalité.


Mis en ligne le 24 juin 2009 à 10H02