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1100Quelles que soient les conditions de la chose, et les intentions cachées, et avec Saakachvili il s’agit d’un domaine sans fin, les Russes prennent parce que c’est bon à prendre: “Mischa” Saakachvili affirmant que la Géorgie est désormais bien loin de pouvoir espérer un jour entrer dans l’OTAN et que les Russes ont eu raison de leur point de vue de faire la guerre en août 2008 et d'assurer leur contrôle indirect sur l’Ossétie du Sud. Novosti s’empresse de citer, ce 20 juillet 2009:
«La Géorgie a peu de chances d'intégrer l'OTAN et de reprendre le contrôle de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud dans un avenir proche, a déclaré le président géorgien Mikhaïl Saakachvili dans une interview au Wall Street Journal. “C'est tragique”, a-t-il affirmé, ajoutant que “les événements avaient donné raison aux Russes”.»
Effectivement, le Wall Street Journal du 20 juillet 2009, dans un article qui concerne un discours sur une nécessaire “démocratisation” de la Géorgie que doit faire aujourd’hui Saakachvili, introduit des éléments d’une interview qu’il a faite avec le président géorgien. Le passage rapporté par Novosti est présenté dans le quotidien US. Les termes sont encore plus tranchants que ne le rapporte Novosti (l'espoir que la Géorgie entre dans l’OTAN “almost dead”, c’est plus encore que “peu de chances d’intégrer l’OTAN…dans un avenir proche”, – la traduction s’est montrée bien modeste).
«The president said in the interview that after a “psychological turnaround” he realized his task was to modernize Georgia. He said his plan was to deepen democracy and ensure a peaceful transition of power when he steps down in 2013.
»He also called the hopes of Georgia joining NATO “almost dead.” “It's tragic,” he said. “It means the Russians fought for the right reasons.”
»Before the August war, Mr. Saakashvili spoke confidently of his country's accession to NATO and the European Union, and its imminent reunification with the two breakaway regions – South Ossetia and Abkhazia. Now, the president says achieving all three goals seems unlikely any time soon.»
Bien évidemment, l’opposition géorgienne, qui est en pleine mobilisation et en pleine action contre Saakachvili, critique ces déclarations, essentiellement les promesses de cette “démocratisation” qui semble être devenue l’apostolat de Saakachvili, aux dépens de son antagonisme anti-russe et de son activisme pro-OTAN. Plutôt qu’une “révélation psychologique”, l’opposition considère cela comme une manœuvre de plus d’un homme politique qui en est coutumier, pour sauver sa position actuelle.
«Adversaries remain skeptical of the move. “It's all blah, blah, blah,” said opposition leader Levan Gachechiladze, before he knew the details of the speech. “He has promised things before and there have been no results.”»
D’autre part, il y a l’accusation que cette intervention de Saakachvili est lancée à la veille d’une visite du vice-président US Joe Biden en Géorgie, qu’elle est faite pour répondre aux vœux et pressions des Américains. Saakachvili repousse avec indignation de telles insinuations; il se trouve simplement que c’était “le moment psychologique” pour lui d’amorcer ce tournant complet de politique, point final, – moment opportun suscité par inspiration irrésistible, si l’on veut…
«In the interview, Mr. Saakashvili denied the timing of his speech was linked to Vice President Biden's two-day visit, which starts on Wednesday, saying it was driven by domestic concerns. “It's the right moment,” he said. “The radical opposition is confused.”»
La chose permet d’enchaîner sur des considérations plus générales considérant la crainte, en Europe de l’Est, que l’actuelle politique russe d’Obama visant à améliorer les relations avec Moscou se fasse au prix des “relations privilégiées” des USA avec les pays d’Europe de l’Est. (On a déjà vu cela le 17 juillet 2009, avec la lettre ouverte d’anciens dirigeants des pays d’Europe de l’Est à Obama.)
«Vice President Biden will this week visit Georgia and Ukraine amid rising anxiety in both countries about what Washington's “reset” of relations with Russia means for the Kremlin's pro-Western neighbors. Aides say Mr. Saakashvili is keen to extract commitments from the U.S. in political, military and economic affairs after a period last fall when he felt “abandoned” by Western allies, including Washington.
»“We know what the reset does not mean for Russia's neighbors,” says one aide. “But so far, it has only been defined in negatives. We don't know tangibly and positively what it does mean.” Analysts say former Eastern-bloc countries, from Georgia to Poland, fear the Obama administration will put its goal of improved relations with Russia before their own relationships…»
Saakachvili n’a jamais placé les scrupules concernant la cohérence et la loyauté de son évolution politique, et le respect de ses engagements d’un autre jour par rapport au temps qui passe, parmi ses premières priorités. C’est un politicien-caméléon habile, dont les variations ne découragent pas les ambitions “du jour”. Ses changements d’orientation traduisent en général sa perception des changements politiques généraux auxquels il faut qu’il s’adapte pour protéger sa position, l’“inspiration psychologique” faisant le reste.
Bien entendu, l’annonce de mesures de “démocratisation”, et sans doute aussi sa nouvelle position vis-à-vis de l’OTAN et de la Russie, et la venue de Biden en Géorgie (demain) présentent un rapport de connexion évident, voire un simple rapport de cause à effet, qui mettent en lumière l’extraordinaire capacité de Saakachvili à ne pas être découragé par les plus fortes suggestions et pressions de la réalité pour continuer à faire avancer à ciel ouvert son agenda personnel. Contrairement à ce que nous avions hypothétiquement envisagé à propos de cette visite de Biden en Géorgie, il n’y a pas eu d’annonce spectaculaire à Moscou concernant ce dossier géorgien (ou les autres domaines mentionnés). Mais le changement complet de Saakachvili concernant l’entrée de la Géorgie dans l’OTAN et son appréciation de l’action des Russes en août 2008 apparaissent comme une façon détournée, par Saakachvili interposé et fort utile, d’aller effectivement dans ce sens que nous évoquions, qui ne peut que satisfaire les Russes. Si l’orientation de Saakachvili se confirme, la chronologie et la chorégraphie des événements indiqueraient qu’elle est le fait des amicales et fermes pressions US sur lui, et cela devrait être considéré comme tel par les Russes, comme un acte indirect US important dans un sens favorable aux intérêts russes. Le volet “démocratisation” du tournant de Saakachvili correspond également à des exigences US explicitement exprimées lors de l’annonce du voyage de Biden. La chose devrait être payée de retour par une réaffirmation tonitruante de l'amitié et du soutien des USA à une Géorgie devenue moins turbulente, pour laquelle s'active également Saakachvili (voir l'article du New York Times de ce 21 juillet 2009).
Certains pourraient dire qu’en l’occurrence, Saakachvili va à Canossa, sur injonction des USA qui placent leurs relations avec la Russie comme première priorité. Dans tous les cas, Saakachvili n’est pas homme à renoncer à un séjour à Canossa si ce séjour lui permet d’avoir le soutien US pour conserver sa position à la présidence, face à son opposition démocratique. L'“inspiration psychologique” a du bon.
Mis en ligne le 21 juillet 2009 à 08H16
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