Soros contre Poutine, à en mourir

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Soros contre Poutine, à en mourir

... Non seulement on a “l’Europe qu’on peut” mais on a les philosophes et humanistes qui vont avec. Le vieux gangster- spéculateur faiseur de fric à la bourse des $milliards humanistes, donnant des leçons de “valeurs” civilisationnelles, voilà le prototype du philosophe façon-Système, estampillé XXIème siècle et contre-civilisation du “déchaînement de la Matière”. Ce qui vaut pour Soros vaut pour l’ex-taulard pour escroquerie du peuple russe, Mikhaïl Khodorkovski, faisant sa profession de “foi” à laquelle répond Igor Strelkov (dans le Saker-français, le 23 octobre 2014). Hier, bien qu’il tint insolemment le haut du pavé avec une Thompson dans une main et une batte de base-ball dans l’autre (au moins, il se salissait les mains), Albert “Al” Capone courait le risque d’être épinglé parce qu’il était tout de même ce qu’il était, – et il le fut, épinglé, sans que les ONG humanitaires vinssent à son secours ; aujourd’hui, les gangsters ont en plus la vertu et vous donnent des leçons de morale. Le Progrès ne fait pas dans le détail, et le Système en état de surpuissance non plus ; et nous continuons à penser, sur le mode roboratif, qu’avec de telles méthodes, avec un tel goût affiché de l’inversion ricanante et persiflante, la surpuissance est grosse de l’autodestruction, elle en est même énorme, et sans avortement possible.

Venons-en donc à Soros. Car, bien entendu, la vieille crapule qui ferait considérer Bernard Tapie comme un brave type franc du collier est accueillie avec tous les honneurs dus à sa sainteté par le saint du saint de la presse-Système libérale et humaniste, – New York Review of Books (NYRB) et Guardian. L’article du NYRB, de la plume de Soros himself est un tissu d’affirmations toutes accouchées par la narrative en cours dans le bloc BAO, – Poutine-Hitler, Russie-barbarie et ainsi de suite. Il ne vaut pas la peine d’être détaillé ; il suffit de constater qu’il s’agit du simple défilé des habituelles ritournelles du catéchisme du bloc BAO, depuis l’origine de l’affaire ukrainienne. En effet, le sujet est l’affaire ukrainienne et la prière de saint-Soros concerne la sauvegarde de l’Europe. On se reportera donc à l’article du Guardian (le 23 octobre 2014), où l’on s’est donné la peine d’interroger Soros sur sa dernière livraison, – laquelle serait qualifiée d’eschatologique par inversion, ou de scatologique directement selon l’humeur qu’on a. Au moins, Soros nous donne des bonnes nouvelles sans fioritures, puisqu’il nous annonce que le sort de l’Europe telle qu’on nous l’a faite (modèle-EU) dépend de celui de l’Ukraine, et que, face à l’Ukraine, Poutine est si déterminé que l’Ukraine ne tiendra guère, et l’Europe avec elle...

«“Europe is facing a challenge from Russia to its very existence. Neither the European leaders nor their citizens are fully aware of this challenge or know how best to deal with it,” Soros writes in an article published in the New York Review of Books. “Now Russia is presenting an alternative that poses a fundamental challenge to the values and principles on which the European Union was originally founded. It is based on the use of force that manifests itself in repression at home and aggression abroad, as opposed to the rule of law.”

»Soros told the Guardian: “There is a general dissatisfaction with the EU as a result of the euro crisis, which has perverted the initial impetus for forming a union of like-minded democratic states. The euro crisis was mishandled and lasted a long time, and it turned a voluntary union of equals into something quite different.” Soros said the EU had become a dysfunctional relationship between creditor and debtor nations, resulting in widespread resentment. “Putin has established good relations with those agitating against Europe,” he said. “The failure of Europe as an experiment in supranational government would make Russia a potent threat … The collapse of Ukraine would be a tremendous loss for Nato, the European Union and the United States. A victorious Russia would become much more influential within the EU and pose a potent threat to the Baltic states with large ethnic Russian populations.”

»Soros, founder and chairman of the Open Society network of pro-democracy foundations, predicts that after the elections in Ukraine on Sunday, the Russian president will offer his Ukrainian counterpart, Petro Poroshenko, a gas supply deal on condition he appoint a prime minister acceptable to Putin. If that is refused, Putin “may then revert to the smaller victory that would still be within his reach: he could open by force a land route from Russia to Crimea and Transnistria [a pro-Moscow breakaway statelet in Moldova] before winter”. Soros calls for radically boosted western support of Ukraine with an “immediate cash injection of at least $20bn with a promise of more when needed” to help write off public debt, and help to reform the country’s energy sector to make it less dependent on Russia. By assisting Ukrainian reformers, he argues that the EU would be rediscovering its founding principles. “The European Union would save itself by saving Ukraine,” Soros said.»

Alors, on appréciera finalement, pour résumer le propos général en se dégageant des contraintes pesantes que nous imposent des commentateurs comme Soros, le simple commentaire de Tyler Durden, de ZeroHedge.com le 23 octobre 2014, présentant l’intervention de Soros sous le titre : «George Soros Slams Putin, Warns Of “Existential Threat” From Russia, Demands $20 Billion From IMF In “Russia War Effort”», et commentant ainsi : «If even George Soros is getting concerned and writing Op-Eds, then Putin must be truly winning.»

C’est donc la nouvelle principale que nous donne le pensum de Soros : le fait même de sa publication est une indication sérieuse de la panique qui règne actuellement dans les milieux des dirigeants-Système, devant ce que le Système estime être la situation en Ukraine. Au reste, cette analyse par défaut de Durden est largement confirmée par des déclarations du nouvel ambassadeur de France à Washington, Gérard Araud, qui vient de la représentation française à l’ONU (ambassadeur). Araud est incontestablement une sorte de neocon-à-la-française, rivalisant de hargne et d’agressivité avec sa collègue US Samantha Power à l’encontre de l’ambassadeur russe. Pour autant, Araud donne à Bloomberg.News quelques confidences dites “en son nom personnel” (inhabituel pour un ambassadeur puisqu’il est présenté ès-qualité) qui sont particulièrement éclairantes. Complètement du parti de Kiev contre Moscou, il dresse un bilan effroyablement pessimiste de la situation, et de ce qu’il estime être la victoire totale de Poutine. (Repris par Russia Insider, le 24 octobre 2014.)

«Vladimir Putin has outmaneuvered his opponents and humiliated Ukraine by continuing to back pro-Russian separatists and flouting a cease-fire, making it crucial that sanctions on Russia remain firm, France’s ambassador to the U.S. said. The Russian president “has won because we were not ready to die for Ukraine, while apparently he was,” Ambassador Gerard Araud said yesterday at a Bloomberg Government breakfast in Washington, in remarks he said represented his personal opinion. Echoing the view of other European envoys in Washington, Araud expressed concern that the Ukraine conflict has hit an impasse, leaving Putin the winner by default.

»While many observers have called Putin a geopolitical chess player, he said, the Russian leader is more a “poker player really, putting all the money on the table, saying, ‘Do the same,’ and of course we blink. We don’t do the same.” The economic sanctions against Russia must stay in place to prevent Putin from going further, said Araud, who moved to Washington in September after serving as the French ambassador to the United Nations. “The question is there on the table: When is Putin going to stop?” Araud said. “That’s the reason that we need to keep the sanctions” because, “let’s be frank, it’s more or less the only weapon that we have. We are not going to send our soldiers in Ukraine. It does not make sense to send weapons to the Ukrainians, because the Ukrainians would be defeated real easily, so it will only prolong the war” and lead to a “still bigger Russian victory.”»

»Araud said that while it was natural to expect Putin to be “more open and reasonable” after the cease-fire agreement was reached Sept. 5, the opposite proved true. Ukrainian President Petro Poroshenko was reduced to thanking Putin at joint remarks in Milan. Poroshenko is “kneeling in front of Putin with the cord around his neck and saying, ‘You know, you have won,’” and Putin is still not backing down, Araud said. “We know that Russian weapons are still flowing to Ukraine and, as you know, the separatists are still fighting and incidents — there are multiple incidents on the border,” he said.»

La dernière partie de l’entretien est consacrée à la situation inextricable où se trouve la France avec la question de la livraison des porte-hélicoptères Mistral à la Russie. D’un côté, la France ne peut détruire sa réputation de fournisseur fiable et sérieux d’armements ; d’un autre côté, Poutine étant l’épouvantable monstre que l’on sait, comment lui donner de quoi manifester avec plus de vigueur encore sa monstruosité ... Et Araud de gémir, certainement avec l’approbation de son excellent président-poire : «Nous avons besoin d’idées pour résoudre cet imbroglio, mais pour l’instant personne ne s’est tourné vers nous en disant “nous sommes prêts à vous aider à faire face à cette situation”...»

La belle affaire, pour ces Français fraîchement nés aux grandes idées globalisantes, démocratiques, ultralibérales, néoconservatrices et néo-atlantistes : croient-ils qu’ils vont y trouver entraide, loyauté et solidarité, comme entre scouts ? Pensent-ils que Washington, Lockheed Martin et Boeing vont aider Paris à défendre l’intégrité de son industrie d’armement ? Tous ces gens du “parti des salonards” sont-ils des boy-scouts confiants dans la franche camaraderie du bloc BAO ? Le distingué monsieur Araud nous confirme que, pour l’essentiel, cette affaire du Mistral est plus que jamais un piège terrible où la non-diplomatie française pourrait apparaître pour ce qu’elle est, – dito, le roi est nu, malgré le gros temps à bord du porte-hélicoptères. Effectivement, nous n’avons pas fini de rire à propos de cette affaire.

... Même sincérité naïve concernant la position de Poutine, derrière l’apparence du discours qui se voudrait sans apprêt ni illusion. Quelle que soit la position française, aussi détestable qu’elle soit selon notre jugement, il reste que monsieur Araud nous dit pour notre plus grand agrément et notre satisfaction extrême que le bloc BAO est, comme c’est le cas de le dire, bloqué face à un Poutine qu’il (le bloc) perçoit comme intransigeant, offensif, intraitable, d’une puissance inimaginable. Le plus évident et le plus étonnant de cette sorte d’analyse est que Poutine n’est rien de tout cela, de même qu’il n’est évidemment pas, stricto sensu, la “menace contre l’Europe” que dit Soros. (A moins que Soros ne s’exprime en termes sociétaux, et il y a certes conflit, mais c’est plutôt l’Europe qui est une “menace” contre la Russie traditionnaliste et conservatrice.) Qu’importe, puisqu’ils y croient tous dur comme fer, et ainsi Poutine apparaît-il pour ce qu’il n’est pas, et produit-il l’effet qu’on attend de lui sans qu’il lui soit nécessaire de susciter cet effet ! D’où confirmation du commentaire de Durden : puisque Soros écrit de sa propre plume, c’est qu’il panique, et qu’on panique autour de lui, parce que la narrative sur l’explosion à craindre en Ukraine et avec la Russie est proche de son épilogue.

A force de crier au grand méchant loup, ils ont fini par croire que Poutine est le grand méchant loup sans que Poutine ait particulièrement besoin de se déguiser en grand méchant loup. Le joueur de poker selon Araud, celui qui abat toutes ses cartes sur la table, est en vérité un joueur d’échec ; c’est le bloc BAO, un Araud ou un autre, qui en fait un joueur de poker pour faire tenir la narrative , sans que Poutine n’ait à prendre le moindre risque du joueur de poker ; et cette démarche de faire de lui le joueur de poker qu’il n’est pas contribue à renforcer encore plus la position de Poutine-joueur d’échec ... Aide-toi, le Ciel t’aidera, a-t-on coutume de dire ; avec le bloc BAO, ce n’est même plus nécessaire, – laisse faire le bloc BAO, le Ciel t’aidera... Il suffit de laisser faire le bloc BAO, c’est-à-dire de lui laisser égrener sa narrative affolé, et le Ciel aidera Poutine puisque tout cela fait de lui un géant intraitable, un tireur de six-coups abattant tout son jeu au poker, un envahisseur subreptice (stealthy) que personne ne voit envahir et qui n'envahit rien du tout, un destructeur de vol MH17 que personne ne peut inculper et qui n'abat aucun vol MH17... Comme le constate Araud, le bloc BAO terrifié, avec Poutine, peine de plus en plus “à suivre”, – alors qu'avec Poutine, au contraire, il n’y a rien “à suivre ...

Curieuse situation : le bloc BAO fasciné par les ombres terrifiantes, dont celle d’un Poutine aussi grand qu’un Goliath, qu’il projette sur les parois de sa caverne de Platon, pour convaincre le bon peuple de la réalité des dangers qui nous assaillent. On ne sait ce qu’en pense le bon peuple, mais les concepteurs-réalisateurs-projectionnistes, eux, y croient dur comme fer : dirigeants-Système, devant les ombres de leurs obsessions, au bord de la crise de nerfs.


Mis en ligne le 24 octobre 2014 à 13H46