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864Deux cas officiellement constatés et actés, le même jour, éclairent d’une lumière étrange ou surréaliste, c’est selon, la politique extérieure US. Dans les deux cas, les USA approuvent un fait de politique extérieure et le condamnent quasiment en même temps et dans les termes les plus explicites.
• Dans le fameux cas de l’accord Iran-Brésil-Turquie, les Brésiliens ont publié le 27 mai 2010 la lettre que Barack Obama a envoyé le 20 avril 2010 au président Lula. Cette lettre explique que les USA encouragent la recherche d’un accord avec l’Iran par le Brésil, selon les termes que les USA avaient proposés à l’Iran en octobre dernier. Le président US ajoute qu’il ne croit pas beaucoup à un tel accord. Les termes énoncés par Obama sont pratiquement ceux de l’accord du 16 mai à Téhéran, que les USA ont aussitôt rejeté.
Dans War in Context, Bob Woodward présente cette lettre et commente la circonstance (le 28 mai 2010), selon l’idée que «President Obama is either a liar or he has lost control of his own administration.»… :
«So what did Brazil and Turkey accomplish? An agreement by Iran to do exactly what Obama claimed he was seeking: that Iran would transfer 1200kg of LEU to be held in escrow by Turkey and in return for which, one year later, Iran would receive fuel rods for the TRR.
»The US response? Secretary Clinton claimed there were “discrepancies” in the offer. These included that:
»“There is a recognition on the part of the international community that the agreement that was reached in Tehran a week ago between Iran and Brazil and Turkey only occurred because the Security Council was on the brink of publicly releasing the text of the resolution that we have been negotiating for many weeks. It was a transparent ploy to avoid Security Council action.”
»That is a truly Kafkaesque statement!
»The US and its allies have been mounting diplomatic and economic pressure on Iran to force it to make concessions on the nuclear issue. As soon as Iran makes concessions, the US turns around and says the concessions are a “ploy” to avoid sanctions.»
• Autre point, l’accord final de la conférence sur le traité de non-prolifération, appelant à la constitution d’une “zone dénucléarisée” au Moyen-Orient, avec deux dates (2012 et 2014) pour passer en revue la façon dont aura été appliqué l’accord. D’une part les USA ont signé cet accord, d’autre part ils ont regretté que cet accord ait été signé… C’est en effet à cette situation que revient la chose, présenté le 29 mai 2010 par Jason Ditz, sur Antiwar.com…
«The Obama Administration’s somewhat bipolar position on nuclear disarmament was in full view today, as the administration publicly signed an NPT declaration calling for a nuclear-free Middle East, then publicly condemned the same deal.
»The Final Declaration of the NPT conference, which ended today, calls for an eventual nuclear weapons free zone encompassing the entire Middle East, as well as calling for sped up arms reduction among the current declared nuclear powers the world over.
»But almost immediately after agreeing to the pact, US Undersecretary of State Ellen Tauscher expressed “deep regrets” over the deal, saying it “singled out Israel.”
»Yet how could it be any other way? Israel is simultaneously the only nuclear weapons power in the Middle East and the only nation in the region which has refused to sign the non-proliferation treaty….»
@PAYANT …“Politique bipolaire”, dans le sens des troubles bipolaires qui affectent la psychologie dans les cas de dépression, de maniaco-dépression, etc. Dans les deux cas, on voit les USA approuver/signer un accord pour ensuite rejeter/condamner cet accord. Tout cela, exactement dans les mêmes termes (pour l’accord), et sans la moindre conscience de la contradiction, qui est effectivement plus “kafkaïesque” que machiavélique, plus “bipolaire” dans le sens d’une pathologie psychologique qu’autoritaire et discrétionnaire. En effet, dans les deux cas, et malgré les analyses préventives des divers commentateurs appointés, l’attitude US, si contradictoire, a causé un tort considérable à la diplomatie US.
C’est particulièrement le cas des liens des USA avec la Turquie et le Brésil, et d’autres pays “émergents” dans ce cas, à propos de l'accord de Téhéran. Le résultat net est extrêmement contestable. Il est très probable que l’attitude contradictoire, “bipolaire”, dans le cas de la “zone dénucléarisée” du Moyen-Orient va donner les mêmes résultats. Le soutien US est trop contredit par les “profonds regrets” publiquement (et stupidement) exprimés pour s’attirer la reconnaissance des pays signataires, dont la plupart des pays arabes, qui voient alors l’attitude US comme forcée par les circonstances et sans réelle possibilité constructive sur le terme. D’autre part, Israël ne se contentera pas de ces “profonds regrets” pour effacer la rancœur qu’il éprouve de voir les USA signer un texte qui, d’une façon ou l’autre, va lui poser bien des problèmes.
Ainsi avons-nous effectivement besoin d’une explication plutôt de type psychologique, qui se trouve dans une relation “bipolaire” de deux sentiments irréconciliables. Même si des nuances peuvent être apportées ici et là, on trouve en général l’opposition de deux attitudes : d’une part, le désir de montrer une certaine souplesse, de faire évoluer des relations avec des acteurs jusqu’alors négligés mais dont il apparaît qu’ils vont jouer un rôle important dans un monde nécessairement devenu multipolaire. Dans le même ordre d’idée, il y a la recherche de l’évolution de situations figées depuis des décennies, à cause de l’intransigeance indiscutée des USA avec ou sans tel ou tel de ses alliés clef. Peu ou prou, cette sorte d’attitude ressort de l’acceptation, souvent perceptible chez Obama, d’une évolution des relations internationales où les USA ne tiendraient plus un rôle impérativement autoritaire.
D’un autre côté, il y a le réflexe inhérent aux USA, “nation indispensable”, “nation exceptionnelle”, etc., qu’aucune psychologie américaniste, surtout dans ces milieux et dans ces positions, ne peut complètement écarter, et, même, qui demeure très vivace. Cette psychologie ne peut envisager une seconde que la volonté des USA ne soit pas faite dans les relations internationales. Effectivement, la cohabitation de ces deux psychologies donne des résultats étonnants de contradiction et d’absurdité et, sans aucun doute, va coûter cher aux USA en termes de perception d’une puissance irresponsable.
De toutes les façons, les USA sont essentiellement handicapés par l’influence qui n’a fait que renforcer leur tendance nationale dans la croyance dans les vertus de la force, de la contrainte, etc., cela renvoyant à la politique de puissance conforme au courant répondant à l’idée de l’“idéal de puissance”. A cause de cela, d’une façon générale, les USA sont absolument handicapés dans leur capacité à développer une diplomatie de finesse, apte aux compromis, aux arrangements, etc. A cette situation se mêle des arrangements de corruption et d’alliances qui vont tous dans le sens de la politique de force, comme avec Israël bien entendu. A notre sens, les USA ne parviendront jamais, en tant que tels (en tant que les USA tels qu’ils sont aujourd’hui), à se débarrasser de ces tendances psychologiques. Cela les a empêchés et cela les empêchera de parvenir à une véritable politique de compromis et d’arrangement (et nullement une de ces fausses “politique de compromis” où ils imposent leur volonté derrière une attitude arrangeante d’apparence). On peut douter que les USA ne deviennent jamais un “acteur normal” des relations internationales ce qui, à un moment ou l’autre, lorsque leur puissance aura diminué de façon significative, lorsqu’ils auront essuyé des revers, les conduira à se retrouver dans un isolement significatif sur la scène internationale. La direction d’Obama, qui est un homme possédant ces caractères ambivalents et antagonistes, pourrait bien être celle qui mènerait les USA à une telle situation.
Mis en ligne le 29 mai 2010 à 12H04
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