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28 juillet 2004 — John Kerry a choisi sa stratégie et c’est une stratégie qui accepte la confrontation sur le terrain de son adversaire : la sécurité nationale (et, au-delà, la guerre en Irak). C’est-à-dire que John Kerry sera conduit à surenchérir sur GW Bush sur la politique la plus extrémiste de celui-ci, quelles que soient ses intentions par ailleurs. Kerry a donc tourné le dos à ce qui aurait dû être sa politique naturelle, de s’opposer à cette politique militariste de l’administration GW, comme le demandent 95% des délégués du parti démocrate.
En un sens, le discours que Kerry a prononcé à la base navale de Norfolk est peut-être plus significatif que celui qu’il doit prononcer à la fin de la Convention démocrate de Boston. Ce discours-là s’adressait à tous les Américains, et notamment aux électeurs qui manquent encore à Kerry pour pouvoir compter sur une victoire assurée.
« John Kerry borrowed President George Bush's tactic of using military hardware as a campaign prop yesterday as the Democratic camp sought to promote his credentials as a trustworthy commander-in-chief.
» With the latest polls giving Mr Kerry a slender lead with little more than three months to November's elections, the challenger presented his vision of national security with the guns of the USS Wisconsin as a backdrop. “As president, I will never forget that our security and our strength begins with those brave men and women who wear the uniform as they stand watch somewhere in the world,” Mr Kerry told an audience in Norfolk, Virginia, home to the world's largest navy base. “And we should be grateful for their service.” »
La première question que pose cette évolution de John Kerry est de savoir s’il pouvait faire autrement. Ses liens avec l’establishment, sa complète allégeance au système, les pressions dont il fait l’objet de la part de cet establishment, — sans compter ses éventuelles convictions, — font évidemment que Kerry pouvait difficilement faire autrement. Il lui aurait fallu l’inspiration et l’élan d’un homme politique inhabituel, ce que le système ne semble plus désormais autoriser.
La deuxième question est de savoir si Kerry peut battre GW Bush sur son terrain, notamment en arguant du fait que la politique de Bush n’a pas amélioré la sécurité des Américains après le 11 septembre 2001. Là aussi, même si Kerry ne fait que décrire la réalité, il aura bien du mal à s’imposer sur ce terrain, parce qu’il accepte la logique du type “on ne change pas de Président au milieu d’une guerre ”. A partir du moment où il accepte l’idée qu’il y a une guerre, il donne nécessairement un avantage décisif au Président, à moins que cette guerre soit un désastre visible, palpable, incontestable, ce qui n’est pas évident aux USA mêmes, où le climat de propagande est très intense et dissimule des aspects importants de la réalité.
La question est donc de voir l’effet que cet engagement de plus en plus marqué aura sur l’électorat. Une réaction significative, par exemple, est celle du cinéaste Michael Moore, qu’on voyait certes comme un adversaire de Bush mais aussi, par la force des choses, comme un partisan de Kerry, et qui prend ses distances de Kerry, d’ailleurs après avoir été mis à l’écart à la Convention de Boston.
« Michael Moore's satirical documentary on the Bush administration, Fahrenheit 9/11, may have broken box office records, but it was not enough to win the director an invitation to this week's Democratic convention.
» The feeling is mutual. In an interview with the Guardian, Moore made it clear that he would campaign against President Bush, not necessarily for John Kerry, who, he argued, had to perform better to avoid “blowing” the election.
» “I have not publicly endorsed Kerry,” he said. Neither had he been asked to help the campaign. ”I don't want them to. I haven't reached out to them either. I don't want to. It's not my job. My job is to inform the American people about what this president has done to this country.” »
Kerry est donc dans le dilemme qu’on distingue depuis l’origine. Il est forcé de suivre son adversaire plus que de l’attaquer de front, là où il est faible (sa politique militariste elle-même). Il est forcé d’aller chercher des électeurs (les démocrates pro-guerre) qui lui manquent, mais peut-être au détriment du gros des électeurs anti-guerre du parti démocrate.
Le résultat se lit dans les sondages. Malgré les fautes, les scandales, le désordre de l’administration Bush, non seulement Kerry ne parvient pas à le distancer mais un des derniers sondages montre Bush reprenant le dessus.
« But with more than three months to go before polling day, the pollsters warn that the result is simply too close to call at this stage.
» The closeness of the contest was underlined by a separate nationwide poll published yesterday in the Washington Post, which showed Mr Bush regaining a narrow lead over his challenger, 48% to 46%, as well as gaining ground on Mr Kerry on issues ranging from Iraq and terrorism to the economy and education. »