Le JSF dans la tourmente de la QDR 2005 : un avenir totalement incertain

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Le JSF dans la tourmente de la QDR 2005 : un avenir totalement incertain


19 décembre 2004 — Certains points particuliers des perspectives radicales envisagées par ailleurs pour le Pentagone concernent les Européens. Le cas essentiel, on le devine aisément, concerne le JSF/F-35, ce programme dans lequel plusieurs pays européens sont engagés.

Les deux passages de l’article du Boston Globe qui concernent précisément les avions tactiques de l’USAF, et le JSF par conséquent, sont les suivants :


« The Navy and Air Force, facing their own financial pressures amid burgeoning federal budget deficits, are considering deep weapons cuts. The sea service is talking about cutting its fleet of aircraft carriers by a quarter, from 12 to nine, according to a Navy official who was briefed on internal planning for the review. Meanwhile, the Air Force is grappling with ways to slash its planned purchases of more than 2,500 fighter planes by up to a third, according to two accounts of a preliminary briefing.

(…)

» The Air Force, meanwhile, has recommended cutting back its purchases of the F-35 from 1,100 to 800 over the next six years, Pentagon officials said, and is considering greater cuts in the coming years. »


Le programme JSF a déjà été retardé ; il va l’être plus encore et son coût unitaire va augmenter autant à cause de ces nouveaux délais qu’à cause de la réduction de la commande nationale. Dans ce contexte, l’engagement des pays européens concernés dans le programme JSF va se confirmer comme une erreur stratégique fondamentale.

La précision mentionnée ci-dessus, sur le JSF (« The Air Force, meanwhile, has recommended cutting back its purchases of the F-35 from 1,100 to 800 over the next six years, Pentagon officials said, and is considering greater cuts in the coming years ») reste assez approximative par rapport aux 1.800 JSF que l’USAF voulait primitivement acquérir. Après l’annonce de réductions ces deux dernières années et les nouvelles perspectives qu’ouvrent les révisions en cours qui seront rendues officielles avec la QDR, il semblerait qu’il serait plus logique d’envisager un plafond de 800 JSF pour l’USAF, en tout (et non sur une portion de temps comme l’annonce l’article). Mais même ce chiffre nous apparaît outrancier dans le contexte actuel des capacités budgétaires et des nécessités opérationnelles qui, toutes les deux, militent complètement contre le JSF. Notre hypothèse serait, pour l’USAF, pour une flotte finale de 400-500 unités, tandis qu’une portion des F-16 en service serait modernisée et prolongée. La modernisation des F-16 permettrait par ailleurs, soit d’étaler, soit de retarder l’acquisition des JSF/USAF. Le fait fondamental déterminé par la catastrophe irakienne est qu’évidemment plus aucune priorité au Pentagone ne s’attache au JSF. (On savait depuis longtemps que le programme JSF est manipulé. Mais cette disparition accélérée de son caractère prioritaire, qui va apparaître avec QDR 2005, est une nouveauté fondamentale.)

(Pour ce qui concerne la priorité, on ne dira pas la même chose du F-22, dont certaines versions à grandes capacités de pénétration, comme le FA-22 ou l’éventuel FB-22, sont présentées comme pouvant jouer un rôle dans la guerre contre la terreur. Le F/A-22 se confirme de cette façon comme un concurrent du JSF, notamment pour la programmation et le budget USAF.)

La question du maintien des F-16 par modernisation va désormais jouer un rôle de plus en plus important. L’USAF y est largement préparée. Par exemple, on pouvait lire dans le numéro de septembre 2004 de Air Force Magazine, alors qu’il n’était pas encore question des bouleversements possibles de QDR 2005 :


« The Air Force has launched service life extension programs (SLEPs) that will add stiffeners and structural components to keep the current generation of aircraft in fighting trim until replacement aircraft arrive. The F-16 fleet, for instance, is receiving the Falcon STAR upgrade to strengthen spars and control surfaces. Upgrading the entire fleet will take eight years.

» By tailoring SLEPs, the Air Force can put off the day when the “iron that we bought in the ’80s reaches the end of its service life,” Hoffman said.

» Some present day fighters—multirole F-15Es and small lots of F-16s—were purchased fairly late in the last fighter buying cycle, so they will last well into the future. F-16s bought in the 1990s, for instance, should reach 2025 without too much difficulty. »


D’autres précisions ont été données récemment sur cette question de la modernisation des F-16. Elles confirment la logique qu’on expose ici, de la capacité des F-16, avec des programmes de modernisation sérieux, de rester en service pendant au moins vingt ans encore, et ainsi de repousser d’autant la nécessité d’intégrer de nouveaux avions de combat (le JSF) en nombre significatif.

Dans les extraits que nous donnons ci-dessous d’une note interne réalisée à partir de sources de l’USAF, on voit que le lien est clairement fait avec la fortune de l’opération de modernisation de l’USAF (principalement le développement satisfaisant ou non, et les acquisitions correspondantes, de F-35). Ces remarques sont présentées dans la logique d’une volonté affirmée de l’USAF « to keep its fleet of F-16 multirole fighter aircraft as a potent force to 2020 and perhaps beyond »


« While the focus is on the USAF's efforts to integrate the F/A-22 into its inventory later this decade and procure the Joint Strike Fighter, the service continues to invest heavily in its existing fleet of F-16 fighter aircraft.

» “What is surprising to most folks is the significant amount of investment that the USAF is still making in the F-16,” said Colonel Scott Jansson, director of the F-16 system programme office within the Aeronautical Systems Center at Wright-Patterson Air Force Base, Ohio. “We are probably spending on average $600 million to $700 million a year to keep the fleet modern and survivable.”

(…)

» The air force is adamant that it does not want to buy additional F-16 aircraft. “Right now I have seen no signals that the air force is going to buy any more F-16s,” said Col Jansson, noting the service's commitment to the Joint Strike Fighter as the F-16 replacement. However, he and other air force officials have said the air force retains contingency plans out of due diligence to buy additional F-16s if F-35 plans go awry.

»  “Any prudent planner would be silly not to have, if not a back-up plan, then at least a notion of how to proceed if something does go wrong,” General Hal Hornburg, then commander of the Air Combat Command, told reporters in September. “The secretary of the air force and the chief of staff of the air force and I have agreed that having a back-up plan is a prudent thing to do, but we have not put one dollar against that plan. We just notionally know that if something untoward happens with our modernisation . . . then we are going to have to quickly shift to doing something else.” »


Du côté de l’U.S. Navy et du Corps des Marines, il y aura également des réductions substantielles. En tout, et à condition que le programme survive à ces remous, au lieu des 2.800 JSF américains annoncés au départ, il serait plus raisonnable de tabler sur un programme JSF national (US, tous services confondus) de 800-1.000 exemplaires au plus, d’ici 2020-2025. (Encore ne tient-on pas compte des améliorations et programmes nouveaux affirmés comme supérieurs au JSF, qui seront proposés en concurrence d’ici le développement complet du programme ; on pense par exemple à une version sans pilote/UCAV du JSF.) En raison de toutes ces contraintes, et tout accident de développement mis à part, il faut prévoir que le prix du JSF augmentera considérablement et devra être envisagé largement au-delà des $100 millions l’exemplaire.