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22 juin 2005 — Le blocage de la confirmation de John Bolton au Sénat est toujours en vigueur. Les dernières nouvelles montrent une nouvelle offensive des démocrates qui ont bloqué à nouveau cette confirmation, et les pressions s’accentuent sur l’administration GW Bush pour qu’une décision de l’administration soit prise pour un nomination unilatérale qui est légale pour une durée de 18 mois (« a recess appointment »).
Selon The Washington Post du 21 juin:
« The Senate yesterday refused for a second time to confirm John R. Bolton as U.S. ambassador to the United Nations, prompting his supporters to urge President Bush to bypass Congress and give the controversial nominee a recess appointment, which would last 18 months.
» The vote was a setback for Bush, whose party controls the Senate, and the latest in a string of partisan impasses that also have stymied his efforts to appoint judges and restructure Social Security. Some senators said a recess appointment now appears to be Bolton's only hope, even though it would be politically contentious and would send him to the United Nations under a cloud. That action could come as early as July 2.
» Republicans denounced Democrats as obstructionists after yesterday's vote. But Democrats said Bush deserves the blame for tapping a nominee known for his combative style and criticism of the United Nations and then rejecting lawmakers' requests for documents related to Bolton's tenure at the State Department.
» The Senate voted 54 to 38 to end debate on Bolton's nomination. That was six votes short of the 60 needed to stop filibusters in the 100-member chamber. It suggested that Bolton has lost ground since May 26, when 57 senators voted to end the filibuster before one of them switched for parliamentary reasons. »
» Yesterday, Sen. George V. Voinovich (R-Ohio) joined 37 Democrats in voting against cloture. The three Democrats who voted to end debate May 26 did so again: Mary Landrieu (La.), Ben Nelson (Neb.) and Mark Pryor (Ark.). Eight senators did not vote, including Republicans John Thune (S.D.), Norm Coleman (Minn.) and Conrad Burns (Mont.). »
La situation de John Bolton est l’un des points les plus spectaculaires de l’évolution de la situation à Washington, et, notamment, du blocage de la situation politique avec la nouvelle attitude des démocrates. Cette évolution est d’abord explicable, bien sûr, par l’aggravation constante de la situation en Irak et la réduction significative du soutien du public américain à cette guerre. L’attitude démocrate est d’ailleurs notable au niveau de la question de la guerre elle-même, où les démocrates s’avancent vers une position de plus en plus critique de la politique du gouvernement.
Il se passe à Washington un phénomène somme toute inattendue. La couverture presse officielle (les grands médias) semblait tellement verrouillée en faveur des thèses du gouvernement qu’une évolution de la perception de l’aggravation du conflit, et, partant, d’une radicalisation de la position d’une partie du monde politique semblait impensable. Pour cette raison, il semblait difficile d’attendre autre chose qu’une confirmation sempiternelle de la ligne pro-guerre. Mais les événements sont si violents, les pertes américaines si sensibles (beaucoup plus élevées qu’officiellement annoncé) et les échos venus des réseaux alternatifs (Internet) si puissants, que cette situation du contrôle de la réalité s’est violemment détériorée. Désormais, les événements imposent à nouveau l’évolution politique, un peu comme au Viet-nâm, dans les années 1967-68. Mais l’analogie s’arrête là.
L’affaire Bolton est directement liée à ce phénomène. A mesure que la situation générale s’est dégradée, l’opposition à la nomination Bolton s’est accentuée. Mais on distingue également, avec cette affaire, où conduit l’évolution actuelle : les forces d’oppositions qui s’affirment n’ont rien de décisif à opposer, par pusillanimité, par impréparation autant que, plus simplement et fondamentalement, par absence de projet ; l’aventure irakienne de GW a été d’une telle intensité de propagande et d’affirmation patriotique que, même en s’opposant désormais à cette politique, les démocrates ignorent ce qu’ils peuvent lui substituer. Le retrait pur et simple, qui semblerait une option évidente (et qui l’était pour l’analogie vietnamienne), semble dans ce cas quasiment impossible à envisager, du point de vue politique, et plus encore du point de vue psychologique.
Le cas Bolton ne débouche sur rien de décisif et montre une paralysie progressive, dont la formule du « recess appointment » serait l’illustration constitutionnelle. Bolton ainsi nommé n’aurait aucune légitimité à l’ONU, où il ne représenterait finalement rien d’autre que le parti républicain. Une telle nomination serait un cas unique (à ce poste, et à un poste de cette importance) dans l’histoire des Etats-Unis, et elle introduirait à l’ONU une situation complètement extraordinaire en transférant au niveau de l’organisation internationale la paralysie washingtonienne. Cette nomination illustrerait, aussi bien que la situation actuelle de stagnation, la fragmentation du pouvoir et la paralysie progressive des Etats-Unis bien plus que la montée d’une opposition normale.