Abracadabra : “UAS Road Map” gobera-t-il le JSF?

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Abracadabra : “UAS Road Map” gobera-t-il le JSF?


19 août 2005 — A côté de la signification de “UAS Road Map”, que nous examinons aujourd’hui, il y a les effets de ce nouveau monstre bureaucratique pour les programmes en cours d’avions de combat pilotés américains. Parmi eux, notre favori, l’inaltérable JSF qui doit manger le monde entier tout cru.

Le 15 août, dans Defense News, les journalistes Gopal Ratnam et Michael Fabey ne ratent pas l’affaire. Le titre nous le dit clairement : « UAVs Vs. Manned Aircraft? » Il est particulièrement significatif, — symboliquement comme d’une façon très concrète, — que le jour même où “UAS Road Map” est adopté, le 4 août, le nouveau grand Inquisiteur du Pentagone, Gordon England, récemment nommé par Rumsfeld pour diriger la QDR-2005, ordonne une revue critique des grands programmes d’avions de combat.


« The Pentagon’s newest review of U.S. tactical aircraft programs appears to pit manned systems like the F/A-22 Raptor fighter and the Joint Strike Fighter (JSF) against unmanned systems like the Joint Unmanned Combat Air System (J-UCAS), analysts say.

» Gordon England, the acting U.S. deputy secretary of defense, on Aug. 4 ordered a study of three U.S. combat aircraft programs: the F/A-22, the JSF and the F/A-18E/F Super Hornet.

» The memo orders the firm conducting the study — Whitney, Bradley & Brown of Vienna, Va. — to assume, among others things, that F/A-22, JSF and J-UCAS will perform as advertised on range, payload, endurance, survivability and availability. F/A-22 will become operational next year, while JSF is in development. J-UCAS is a Defense Advanced Research Projects Agency study effort.

» This “implies that J-UCAS is being traded against manned aircraft platforms,” said Loren Thompson of the Lexington Institute think tank, who has seen the memo, which was first reported by Bloomberg News. “It’s interesting that they appear to be trading off capabilities and missions among those three future airframes as if they were all at the same stage of development.” »


Ces diverses remarques complètent les alarmes récentes lancées quant au sort futur des grands programmes d’avions de combat américains, notamment et particulièrement notre JSF/F-35. Elles complètent ces alarmes d’un volet “offensif” propre à satisfaire la logique incurablement optimiste de la bureaucratie de sécurité nationale : le JSF serait réduit, voire pire encore (l’apocalypse est désormais imaginable), non plus seulement au nom des nécessités budgétaires mais parce que l’irrésistible progrès technologique (“UAS Road Map”) rend les avions pilotés de plus en plus inutiles. Cette logique n’est pas nouvelle. En 1997, le chef d’état-major de l’USAF, le général Fogleman, envisageait que le programme JSF soit scindé en deux, avec une deuxième partie où le JSF classique serait remplacé par une version sans pilote de l’avion. Avec “UAS Road Map”, l’évolution est beaucoup plus radicale et les circonstances où elle se fait sont dramatiques, mais on voit qu’elle n’est pas surprenante pour autant.

Nos deux auteurs de Defense News cite ce passage du rapport “UAS Road Map” où il est écrit que « “the United States can develop an unmanned aircraft to accomplish almost any mission imaginable” and [...] in coming years [...] “Instead of asking ‘Can we find a mission for this unmanned aircraft?’ one will ask, ‘Why are we still doing this mission with a human?’” » On comprend que cette question vaut pour le JSF, comme pour les autres avions, — mais pour le JSF surtout, ce monstre gargantuesque auquel se sont accrochés tant d’alliés pleins d’espérance et de pensées habiles autant que serviles, — cette question devenant alors : pourquoi faire cette mission avec un JSF alors qu’un excellent UAS ferait très bien l’affaire? Quelles que soient les réalités, les illusions et les difficultés que recouvrent ces interrogations sur le plan opérationnel (et il y a beaucoup à dire, on s’en doute), l’essentiel pour ce commentaire est qu’elles se répandent dans la bureaucratie de sécurité nationale.

Désormais, le JSF est complètement mis en cause au Pentagone, non plus seulement au nom des nécessités budgétaires, — ce qui est toujours mal vu, par rapport à la logique virtualiste interne et externe (pour le reste du monde béat d’admiration) de l’American Dream, — mais au nom également d’un avenir meilleur, radieux et technologique. Cette incursion de l’optimisme utopique propre à la bureaucratie de sécurité nationale dans la critique qui est en train de corroder le programme JSF à une vitesse vertigineuse a la caractéristique fondamentale de rendre vertueuse cette éventuelle attaque radicale du programme JSF. Tout est bien pour ce qui concerne l’équilibre psychologique de cette bureaucratie. Pour le JSF, le rouge est mis.