Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
519
5 novembre 2005 — Le masque grotesque de cette comédie historique sans exemple dans l’Histoire est en train de tomber. La chute finale est un trou noir sans fond. Le problème est de savoir si, bientôt, il ne faudra pas inventer le “sondage négatif” (“- 23%” d’opinions favorables pour GW aux USA, non?) pour cette fable qui n’a pas de sens, qui nous est racontée par un fou médiocre et qui dit n’importe quoi pour emmerder tout le monde dans un destin et une idéologie qui se font gloire de n’avoir aucun sens. Est-il fou, sont-ils fous? Même pas, — il y a parfois du génie dans le fou, un Artaud, un Van Gogh ou un Ezra Pound n’ont rien à voir avec GW, — une autre planète, tout simplement. Appartenons-nous encore à l’Histoire qui raconte notre civilisation jusqu’à nous?
“Grotesque” est le mot pour désigner l’événement américaniste qui n’a rien, absolument rien de la tragédie qui, d’habitude, laisse au moins un peu de grandeur aux grands vaincus de l’Histoire. Il ne faut même pas en vouloir à GW, personnage insignifiant, assis là où il est pour mieux symboliser la médiocrité d’un temps historique qui est comme un trou noir sans fond. A Buenos Ayres, GW est ridiculisé par la paire Maradona-Chavez. L’avant-centre argentin n’a jamais été aussi bon dribbleur et le “para” vénézuélien exulte ; au moins, le populo de l’Amérique Latine, ces latrines d’arrière-cour de la Grande République, donne une splendide leçon, une leçon en haillons à l’Europe sophistiquée qui accueille les bourreaux de la CIA, — dont les officiers de la CIA ont grand’honte, paraît-il, car on a tout de même son âme et son remords voyez-vous.
Mais laissons là cette sainte et méprisante colère…
Voulez-vous un aperçu de notre civilisation guidée par la Grande République, ce modèle de démocratie et tutti frutti? Voyez ces quelques paragraphes du Guardian de ce matin:
« Nearly six in 10 Americans, 58%, said they had doubts about the president's honesty, a 13% rise in 18 months. Only 32% believed Mr Bush was handling ethical issues well, a significantly worse score than Bill Clinton achieved in his last scandal-besmirched year in office. His overall popularity has plunged to 39%, a new low for the Washington Post/ABC survey.
» Mr Bush is no more popular in Argentina, where a protest by several thousand demonstrators turned ugly. In the coastal city of Mar del Plata, where he is attending a regional summit, protesters set fire to a bank, looted stores and battled riot police.
» Earlier, the tone was struck by the former football star Diego Maradona, who wore a “Stop Bush” T-shirt to an anti-Bush “counter-summit” that drew some 4,000 protesters from around the world and easily eclipsed the official summit in the public's attention. “I'm proud as an Argentine to repudiate the presence of this human trash, George Bush,” said Maradona.
» Maradona's anti-Bush sentiment was replicated across a country driven to a near standstill by tens of thousands of people angry at the Iraq war and the US president's push for a region-wide free trade deal. Hospital and subway workers went on strike in Buenos Aires.
» The latest popularity poll was published after Lewis “Scooter” Libby became the first White House aide for 130 years to be indicted in office. He appeared in court on Thursday to plead not guilty to five charges of lying to investigators. »
A Washington, on vous chuchote que la guerre de GW Bush est maintenant en question. Il paraît que les sénateurs commencent à se poser de sérieuses questions. Il faut dire, — à 35% d’opinions favorables pour GW (et 19% pour Cheney), on comprend leurs sueurs froides. C’est qu’il y a des élections l’année prochaine. Il se pourrait bien que Lewis “Scooter” Libby, transformé en Harley-Davidson, jette sa fidélité aux orties et implique ses patrons pour éviter trente années (cela lui fera 85 ans) dans les prisons les plus cliniquement inhumaines de la planète. Le témoignage de Cheney, peut-être avant son inculpation, vaudra son pesant de cacahuètes. Désormais, des prolongements sensationnels ne sont plus impossibles. Washington vit à 180 à l’heure.
La chose extraordinaire est que nous en avons encore pour plus de trois ans de cette comédie grotesque. Nous allons voir se dissoudre, sous nos yeux ébahis et secrètement ravis, le système le plus cadenassé du monde dont le cadenas l’oblige aujourd’hui lui-même, le système, à boire son poison jusqu’à la lie. Quand GW est élu, il faut le boire. Le coup d’État, le pronunciamentio n’est pas une chose convenable dans nos démocraties huppées, et moins à Washington que nulle part ailleurs. L’homme, GW, est là pour pulvériser la puissance et la pérennité de sa fonction, pour réduire au ridicule et au grotesque un mécanisme qui semblait devoir nous enterrer tous. S’il n’y a pas là une intervention divine, c’est à ne plus croire ; et GW serait effectivement un rouage essentiel de cette machination céleste, envoyé de Dieu pour punir les hommes, pour leur faire subir sa médiocrité qui est une alchimie diabolique (c’est une image), — Dieu appliquant lui-même les recettes du virtualisme… (Tout s’expliquerait alors, précisément les a-parte de GW avec le Seigneur.)
La situation est d’un surréalisme jubilatoire. Le virtualisme est en train de rencontrer un “contre-virtualisme”, qui est peut-être la réalité après tout. Les économistes de Wall Street et de la City en col-cravate, — ou plutôt en col-sans-cravate, comme c’est désormais la consigne, — se cognent la tête contre cette chose extraordinaire qu’est “la perception du bon peuple”, contre le bon sens populaire si l’on veut, et en Amérique même ce qui est un comble… « [Bush] pointed to the growth of the US economy, but the poll suggested he was facing scepticism there too. Despite a 3.8% growth rate over the past three months, nearly two-thirds of respondents believed the economy was performing poorly. » Si les chiffres ne les convainquent même plus qu’ils sont heureux!
Nous aurons au moins eu cela, nous les dissidents: le sentiment du bonheur d’assister à la décadence accélérée d’un système nihiliste par le moteur d’une situation d’un grotesque sans précédent. Constatons une fois de plus et doctement qu’on a la décadence qu’on peut. Sa seule originalité est l’accélération.