Chronique de l’inculpabilité courante

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Pour entretenir la verve et la réflexion de nos lecteurs, nous citons ci-après deux exemples de comportement suggérés par la particularité psychologique américaniste que nous avons baptisée du néologisme d’inculpabilité.

• Du député ukrainien Georgy Kryuchkov, président de la Fondation Europe-Ukraine Libre, dans un article (« Why is Kiev breaking up with Russia? ») qu’il a publié sur le site de Regnum, le 8 juin (la phrase désignant le caractère même d’inculpabilité soulignée par nous en gras) : « While commenting on the report of the Council on Foreign Relations (“Russia’s Wrong Direction: What the US Can and Should Do”), well-known American politician Stephen Cohen says that the report applies dual “cold war” standards. To prove his words he refers to the situation in Ukraine. He says that it is astonishing but they in the US say that Russia has no national interests in Ukraine, while the US has the right to do whatever it wants to make Ukraine join NATO. »

• De l’expert américain en énergie F. William Engdahl, dans un article (« US outflanked in Eurasia energy politics »), sur le site atimes.com en date du 10 juin: « Curiously, Washington has repeatedly accused China of “not playing by the rules”, in terms of its oil politics, declaring that China is guilty of “seeking to control energy at the source”, as though that had not been US energy policy for the past century. »

On notera que les analystes qui rapportent les anomalies de comportement dues à l’inculpabilité (sans identifier la chose précisément) soulignent toujours cette trouvaille d’appréciations dubitatives (“astonishing”, “curiously”) marquant leur incompréhension. Si l’on s’en tient à la seule analyse des faits, les affirmations américanistes sont si impudentes, si extravagantes par rapport à cette réalité, qu’on est décontenancé qu’elles soient ainsi exprimées tant elles sont maladroites dans leurs effets. On devine bien, intuitivement dans ce cas, qu’il ne s’agit pas de propagande, — la ficelle serait bien trop grosse, bien trop impudente qu’elle en serait contre-productive, — et d’ailleurs elle l’est si l’on ne dispose pas de l’explication de l’inculpabilité.

Plus précisément : pourquoi nier absurdement que la Russie ait des intérêts de sécurité nationale en Ukraine? C’est irriter les Russes sans nécessité. Les agents américanistes pourraient faire le même travail de propagande et d’agitation qu’ils font en Ukraine sans que les officiels US aient à avancer de telles sornettes qui les discréditent et mobilisent leurs concurrents et adversaires, — cas de la Russie actuellement. Cela serait bien plus efficace puisque l’Ukraine serait entraînée dans le même processus de déstabilisation sans que la Russie puisse aussi clairement accuser les USA… A moins que ces officiels ne croient vraiment à leurs affirmations. Nous y sommes : c’est l’attitude caractéristique de l’inculpabilité.

Bien sûr, même explication pour la Chine qu’on irrite en l’accusant de faire ce que les Etats-Unis font depuis un siècle. Est-ce bien utile? “A moins que ces officiels…”, etc.


Mis en ligne le 9 juin 2006 à 17H01