L’Est vaut l’Ouest pour l’Allemagne, — mais il y a “le revers de la médaille”

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Il y a un passage remarquable dans le discours de Berlin de la chancelière allemande Merkel, le 25 mars à Berlin: c’est l’équivalence qu’elle établit entre l’alliance transatlantique (Europe-USA) et le “partenariat stratégique” avec la Russie. Cette equivalence est soulignée par les mots “autant” et “complément” (soulignés par nous).

Voici le passage:

«… C’est pourquoi une politique étrangère et de sécurité commune en Europe est indispensable. Elle ne doit cependant pas être isolée, mais se faire aux côtés de partenaires au-delà de l’Europe. Je suis persuadée que la relation étroite et amicale avec les États-Unis d’Amérique et une OTAN forte sont et seront à l’avenir dans l’intérêt fondamental de l’Europe.

»Ce n’est pas à l’opposé de l’approfondissement de la coopération européenne. C’est au contraire le revers de la même médaille.

»Nous avons tout autant besoin d’un partenariat stratégique global avec la Russie. Le partenariat stratégique avec la Russie et l’Alliance transatlantique ne sont pas antagonistes; ils forment un complément nécessaire…»

Cette mise en équivalence des deux relations de l’Europe avec les USA et avec la Russie est très remarquable, représentant finalement une petite révolution passée inaperçue. Jusqu’ici, la relation avec les USA primait toute autre pour l’Europe, comme doivent encore le penser des pays comme le Royaume-Uni. Implicitement, Merkel signifie l’importance de la Russie pour l’Allemagne.

Il n’est pas impossible que ces précisions subtiles mais fortes de langage ait été mises dans le discours à la lumière de la crise actuelle des anti-missiles US, des tensions entre l’Allemagne et la Pologne, des rapports énergétiques entre l’Europe (l’Allemagne) et la Russie.

Cerise sur le gâteau, offerte par la traduction… L’expression «revers de la même médaille» est utilisée pour désigner «la relation étroite et amicale avec les États-Unis d’Amérique et une OTAN forte», dans la traduction française officielle du discours diffusée par la chancellerie. On comprend la démarche des traducteurs, explicable par la première signification du mot “revers” («Côté opposé à celui qui se présente d’abord, qui est considéré comme le principal»); tout de même un peu choqué par le fait que l’alliance US soit perçue comme moins importante pour l’Europe que l’intégration européenne, on en saisit et on en goûte aussitôt tout le sel lorsqu’on lit la définition que donne le Robert du même mot “revers” dans son deuxième sens, précisément utilisé avec “médaille”: «Côté d’une médaille, d’une monnaie, qui est opposé à la face principale, à l’avers ou obvers… “Le Revers de la médaille”: l’aspect déplaisant, désagréable, d’une chose qui paraissait d’abord sous son beau jour.»

Le langage parlant de lui-même, inutile de re-traduire en allemand.


Mis en ligne le 28 mars 2007 à 12H49