Cheney et “son” B-52

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Il semble qu’on puisse employer à la fois les qualificatifs d’“extraordinaire” et d’“exemplaire” pour désigner l’affaire du B-52 chargé de (5 ou 6? Plutôt 6) cruise missiles type ACM (Advanced Cruise Missiles) avec leurs têtes nucléaires. “Extraordinaire”, cela va de soi ; “exemplaire”, comme l’on dirait “normale” malgré l’apparente contradiction avec le qualificatif précédent, parce que cette affaire correspond bien à la situation extraordinaire que nous traversons aujourd’hui. (Pour cette raison, — affaire extraordinaire et exemplaire, — vous comprenez qu’elle ne fait pas la une de nos grands quotidiens de référence ni de nos JT à audience prime time.)

Nous nous intéressons à la thèse de Michael E. Salla (texte mis en ligne par ailleurs sur ce site), ancien professeur à Washington, docteur en philosophie et spécialiste de la résolution des conflits, auteur, fondateur d’un Exopolitics Institute à Hawaiï, “ufologue” et spécialiste des civilisations extraterrestres, non pour affirmer qu’elle est juste mais pour observer que, sans réelle certitude de notre part, — aucune certitude quant à la thèse de Salla mais aucune certitude pour quoi que ce soit d’autre, y compris une version officielle s’il y en a une, — elle nous paraît plausible. Salla est sans aucun doute un personnage controversé, c’est le moins qu’on puisse dire, et sans aucun doute imaginatif, voire exalté. In illo tempore, non suspecto de virtualisme et autres gâteries, il serait discrédité par son curriculum vitae et par nos habitudes de pensée conjugués dans un effort commun. Aujourd’hui, qui peut dire quoi? Nous n’avons plus de références légitimes puisque nos “références légitimes” sont des clowns et des gredins à l’âme pitoyable, chaque jour pitoyablement pris la main dans le sac, chaque jour impitoyablement mis à nu, dont la seule ambition semble être de dissimuler tout ce qui pourrait approcher de la réalité, de mentir, mentir et encore mentir jusqu’à la nausée et sans conscience de rien. Alors, Salla ou un autre… Il reste que, prise au pied de la lettre, sa thèse tient debout, au moins aussi ferme que le vice-président des Etats-Unis ou que ce B-52 qui s’envole pépère avec six cruise missiles et leurs têtes nucléaires, sans que personne ne s’en avise.

La thèse de Salla est intéressante parce qu’elle rend compte, sans rien plaider, comme par nature, de l’hypothèse d’un gouvernement absolument éclaté en divers centres de pouvoir, où plus personne n’exerce de contrôle réel sur l’essentiel ni sur quoi que ce soit d’autre, où des hommes (Cheney par exemple) disposent d’une façon subreptice de tels pouvoirs clandestins mais officiels (!) que leur implication dans la possibilité d’une attaque nucléaire clandestine (!) ne nous clouerait pas une seconde de stupéfaction. Il s’agit d’une superpuissance démocratique où les chefs militaires jouent leurs propres jeux, et heureusement pour nous dans certains cas (la Navy et l’amiral Fallon) ; une superpuissance démocratique où il faudrait s’en remettre à des initiatives illégales d’officiers anonymes pour bloquer des entreprises d’attaque nucléaire clandestine. (La chose est d’autant plus acceptable que l’affaire du B-52 a été divulguée par le site Military Times le 5 septembre, site dépendant des publications de Army Times Publishing Company, qui sont des publications militaires semi-officielles (privées) très proches du personnel militaire, — donc très susceptibles de recueillir ses confidences.) Si l’on comprend bien la thèse de Salla, pourquoi ne pas aller jusqu’à envisager une attaque nucléaire “clandestine” avec un B-52 ainsi armé, qu’on incorporerait sans bien entendu en aviser les chefs militaires de l’opération générale, soit dans une attaque conventionnelle, soit dans un exercice? Aujourd’hui, cette sorte de folie est possible à Washington.

Salla estime que le complot a été éventé et que l’enquête devrait mettre à jour, ou laisser comprendre le rôle de Cheney, — jusqu’à la prochaine démission de celui-ci, “pour raisons de santé” (« It is therefore anticipated that in a very short time, the public will learn that Cheney has resigned for health resigns»). On verra, avec un certain scepticisme, pour ce qui est de cette prévision ; on verra, mais toujours est-il que la thèse générale, pas plus farfelue que le personnage du vice-président, paraît souvent bien plus sérieuse que toutes les analyses, prévisions et appréciations de tout ce qui s’est passé officiellement autour de l’Irak depuis quatre ans, et autour de l’Iran depuis deux ans, où les buts de guerre affichés se réfèrent le plus souvent à l’Armageddon de la Bible et où le conseiller du Président est Dieu Lui-même. Etrange époque.

…Etrange époque où il nous faut nous habituer à la possibilité que la vérité se rassemble à partir de morceaux épars de réalité, dont certains retrouvés parfois sous les plumes les plus inattendues. Tout est aujourd’hui possible, même que le manipulateur ou l’illuminé le plus discrédité nous livre, comme par mégarde, un coin de vérité en échafaudant une théorie qu’on jugerait abracadabrantesque selon le verdict de la raison mais qui ne l’est plus stricto sensu parce que la vérité du spectacle du monde est aujourd’hui abracadabrantesque. Nous ne disons pas que Salla est ce “manipulateur” ou cet “illuminé” en question mais nous ne disons pas non plus qu’il ne le soit pas. Nous ne disons rien, pour le cas : nous écoutons et cherchons à savoir, sinon à comprendre.


Mis en ligne le 8 septembre 2007 à 18H19