Maintenant qu’Hillary est élue, voyons si le bon docteur Paul peut être élu

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Maintenant qu’Hillary est élue, voyons si le bon docteur Paul peut être élu

9 octobre 2007 — Puisque l’establishment a désigné le vainqueur de novembre 2008, cela nous laisse du temps pour voir si, par un hasard malicieux, Ron Paul pourrait ne pas être élu. Malgré les apparences il est vrai que nous parlons d’une démocratie, vous savez la plus grande de toutes.

Plusieurs faits se confirment autour de la candidature de Ron Paul.

• Puisqu’il est si souvent question d’argent, parlons-en. Le fait est que le discret Ron Paul, l’homme-candidat qui ne semble pas exister pour le système du “parti unique”-bipartisan US, obtient des résultats sensationnels, qui se confirment de trimestre en trimestre. Il n’y a aucune raison pour que ce mouvement s’assèche, et toutes les raisons du monde pour qu’il accélère.

• Cet homme, d’un âge respectable et d’opinions impeccablement conservatrices, est absolument le candidat d’Internet et des jeunes gens des campus universitaires. Pour faire bref, — le candidat de la modernité et de la jeunesse? Nous ne sommes pas au bout de nos surprises.

• Cet homme est le seul candidat à exprimer une opinion anti-guerre sans restriction et à proposer le retrait immédiat d’Irak et l’abandon de la politique étrangère interventionniste des USA. La simplicité de cette politique a tout du “roi est nu”.

• Ron Paul propose également un gouvernement “minimal” et un retour à un “centre” fédéral réduit dans sa puissance, dans sa bureaucratie et dans ses attributions. Ce dernier point complète évidemment le précédent. On ne peut combattre les pire excès du monstre sans tenter de changer le monstre, voire de lui couper la tête.

Pour Justin Raimundo, qui consacre sa chronique d’hier à Ron Paul, il y a une “percée” du candidat à la désignation républicaine. Raimundo estime que le moment arrive où l’on va être obligé d’admettre que Ron Paul existe et où l’on va devoir le prendre au sérieux sous peine de graves problèmes. C’est ce que Raimundo nomme «The Ron Paul Breakthrough», qu’il exprime par cette remarque: «The approach the chattering classes have taken to the Ron Paul phenomenon has been classic, rather along the lines of Gandhi's famous aphorism: first they ignore you, then they ridicule you, then they fight you, then you win.»

Raimundo s’explique à propos de l’actuelle phase du parcours de Paul, — ou, plutôt, de l’évolution de l’establishment vis-à-vis de Paul. Selon lui, nous entrerions dans la troisième phase de l’aphorisme

de Gandhi (“D’abord ils vous ignorent, ensuite ils vous ridiculisent, ensuite ils vous combattent, enfin vous gagnez”)…

«Furthermore, the existence of the Internet, far from destroying journalism, as predicted by some die-hard dead-tree'ers, has forced the “mainstream” media to be more responsive and flexible. That's why they're now paying attention to the Paul campaign: Ron is news, big-time political news. He's drawing thousands to his campaign rallies, a boast not many presidential candidates of either party can credibly make. And he's raking in the money. This quarter, he's brought in almost as much as McCain, and he's third – behind Giuliani and Romney – in the cash-on-hand sweepstakes. Money talks – and now they have to take him seriously.

»The establishment has fallen back on their second line of defense: they ridicule him as a “kook,” a ''loon,” and even a “bigot” – in short, they're trotting out the same attack strategy they used to target another rebel against the party establishment, true-blue conservative-slash libertarian Barry Goldwater.

»Back in 1964, when the electorate was still in thrall to the gatekeepers' media machine, this tactic was quite effective. Today, however, this ploy has the effect of underscoring the depth of Paul's challenge to the political status quo, thereby enhancing his appeal. It works rather like the concept of blowback in the foreign policy realm: just as U.S. military intervention invites an equal and opposite reaction from its overseas victims, so the intervention of our political elites against the rising Paulian grassroots insurgency guarantees his base of support will expand.

»Ignore, ridicule, attack – we're about into the third phase, and I expect that will commence shortly. Perhaps as shortly as the next GOP debate, and certainly right after. The neoconservatives have been the target of Paul's scorn on severaloccasions, and he is likely to receive it back in kind before long. Aside from Jonah Goldberg's ill-informed renunciation of Robert A. Taft and a few bouts of snickering at The Corner, National Review has so far kept its trap shut tight about the Texas troublemaker, even going so far as to exclude him from their daily compilation of stories about the GOP primary campaign. I have the feeling, however, that their silence is about to end, and Ron is about to join the ranks of the “unpatriotic conservatives.” After all, the neocons have to somehow stop the erosion of their base at the hands of someone who so clearly understands the role of neoconservatism as a cancer eating away at the heart of the GOP and the conservative movement.

»In their view, Paul is falling for the line of the “Left” that America is fighting a futile war against forces it neither understands nor has any hope of controlling, and yet if this was truly a “leftist” idea one would imagine that the Left would come to Paul's defense – but, no. The same “Ron is nuts” meme being spread by neocon snarkers on the right side of the blogosphere is being echoed by the “center” liberal-left. You see, anyone who opposes the system that makes imperialism possible – the mercantilist, state-capitalist system of corruption that enriches the few at the expense of the many – is “crazy.”

»Maybe he's just crazy enough to think our rulers will let him, or anyone with a major public platform, get away with exposing the full extent of their corruption – and thank God for that.

»The Good Doctor is not alone in prescribing a change – a radical change – in our stance toward the rest of the world. You're hearing it not only on the Washington cocktail party circuit, but around the office water cooler: it's time to start disengaging from the mess our interventionist policymakers have created, starting in the Middle East. In carrying this stance into the arena of GOP presidential politics, Ron is a libertarian-non interventionist gladiator taking on several lions at once. The resulting knockdown drag-out battle, regardless of its outcome, is going to be fun to watch.»

Une aventure éminemment démocratique

Ron Paul les tient par la barbichette: la démocratie, disent-ils, répètent-ils, ânonnent-ils, hurlent-ils comme des hystériques, jusqu’à plus soif… Eh bien, allons-y.

Comme nous sommes évidemment conduits à le dire et à le répéter, Ron Paul n’a pas une seule chance dans le système. Le parti républicain est naturellement contrôlé et orienté pour lui barrer la route. Par conséquent, sa position au sein du parti républicain est suicidaire, ou bien ambiguë, ou bien accidentelle, — ou bien, évidemment, temporaire…

Le fait est qu’en face de lui Ron Paul a de moins en moins les seuls processus et caciques du parti républicain. Il a de plus en plus le système dans sa totalité. L’on sait que le système vient déjà de désigner l’élu(e): Hillary, certes. Cette désignation de facto, qui mesure la panique du système, a ses avantages et ses inconvénients. Les avantages, d’ordre tactique, sont évidents (prise de contrôle du processus, regroupement du système, unanimité contrainte ou pas, etc.). Les inconvénients, d’ordre plus fondamental, vont apparaître de plus en plus. Principalement, il s’agit de la frustration d’une clientèle nombreuse, chez les républicains et chez les démocrates, qui n’aime pas nécessairement Hillary, qui aurait aimé exprimer de façon plus affirmée des exigences, etc. Bref, un regroupement général autour de Hillary semble donner une plus grande sécurité au système mais il agrandit le cercle des mécontents et empile les strates des insatisfaits.

Ces réflexions, ces hyperboles (la “désignation” d’Hillary est une image avec des signes avant-coureurs sérieux), ces théories sur le lendemain, nous conduisent vers l’hypothèse impérative d’une situation politique inédite — situation que le bon sens et la joie de vivre, de leur côté, nous invitent à considérer. Cette situation, c’est bien entendu Ron Paul devenant candidat indépendant après son rejet probable par l’appareil du parti républicain. La question tactique est de savoir quand Ron Paul devrait faire ce choix s’il l’envisageait. (Accessoirement, observons que la chose a d’autant plus de sens qu’une majorité significative, — 53%, — des électeurs US qui se disent “indépendants” est hostile à Hillary Clinton. Bien entendu, une candidature d'indépendant de Paul irait chercher des voix chez les républicains et les démorates, et elle en trouverait.)

Il est évident que Ron Paul est aujourd’hui un signe puissant de la crise du système. Il pourrait aussi en devenir un acteur fondamental. A la vitesse des événements, à la mesure de la position encalminée du système, l’évolution que l’on décrit ci-dessus est désormais loin d’être impossible. On mesure combien tous ces mouvements sont auto-alimentés et se renforcent d’eux-mêmes, — aussi bien l’enfermement du système sur lui-même, son repli en forteresse assiégée; aussi bien la colère populaire et le soutien auto-généré par cette colère d’un Ron Paul devenant porte-parole et outil de cette colère populaire. En termes romantiques, c’est ce qu’on appelle un destin ; sans doute le brave docteur Paul avec ses centaines d’accouchements réussis, ce superbe constitutionnaliste, intègre, d’un calme imperturbable, sans grand charisme ni guère d’allure de people à la mode de nos princes, sans doute n’est-il pas un héros de roman de cape et d’été de notre style postmoderne ; mais il nous semble déjà avoir l’allure d’un personnage maistrien, plutôt dans la tonalité héroïque que contrainte, acceptant éventuellement cette mission grandiose plutôt que la contestant au nom d’un ego qui prend le faux-nez du libre-arbitre. Ron Paul est véritablement manipulé par un courant populaire:

«The organization of the campaign popped up spontaneously on the Internet with these meet-up groups. It's natural that they would donate the money. So in many ways, the campaign has found me as much as I have found them. It's not a top-down organization. It's sort of bottom up. All we have done at the campaign is provide the message, and the message turns out to be popular.» (Ron Paul à ABC.News, le 3 octobre.)

Fera-t-il cela? Adoptera-t-il la tactique du candidat indépendant? Y a-t-il pensé? A-t-il une autre tactique? A-t-il seulement une tactique? Pour l’instant, il reste dans le parti républicain parce qu’il y a avantage. Il profite des processus du parti qui lui permettent de participer à des primaires pouvant se transformer en référendums, qui lui donnent la parole, laquelle est désormais relayée avec succès vers les médias. (Important, cela: bien que partie intégrante du système, les médias gardent des réflexes professionnels, d’autant que Ron Paul, objet d’une tactique de discrédit par indifférence forcée, n’a pas été diabolisé selon la coutume, ni interdit d’antenne. Alors, Paul fait son chemin dans les médias et obtient un succès de plus en plus marquant. Il existe désormais un point où, s’il l’atteint, Ron Paul deviendra une vedette incontournable des médias, anti-système ou pas.) Une élection avec un Ron Paul, à deux ou à trois (avec un républicain type-Giuliani) serait une voiture-piégée à retardement pour le système. Ron Paul ratisserait large dans l’électorat écoeuré d’un système aux abois. Pourrait-il être élu? Question subsidiaire pour l’instant, et peut-être superflue; ce qui importe c’est la déstabilisation du système et la présence de Paul est un joli ferment.

Quoi qu’il en soit l’hypothèse est séduisante par sa superbe logique d’époque. Elle disperse toutes les sornettes sur l’opposition droite-gauche, conservateurs-progressistes. Elle établit la véritable opposition de notre crise de civilisation, — entre le système et la révolte contre le système.

Nous terminions notre texte sur Hillary-déjà-élue par cette remarque: «Somme toute, même si tout est prévu, — et parce que tout est prévu, les 13 mois à venir ne manqueront pas de piquant.» Justin Raimundo termine le sien par cette phrase: . «The resulting knockdown drag-out battle, regardless of its outcome, is going to be fun to watch.» En d’autres mots : tous en scène, — et que la fête commence…