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1616Bien plus que 9/11 et ce qui a suivi 9/11, le domaine historique américaniste le plus intéressant à explorer est la tendance, – structurelle, semble-t-il, – qui se développa au sein de la direction américaniste à partir du début des années 1980 et façonna la structure de cette direction pour lui permettre de se transformer comme elle l’a fait à partir du 11 septembre 2001. Il ne s’agit certainement pas d’un événement à court terme, ni d'un événement à réduire aux jacasseries publicitaires des néo-conservateurs depuis 1992 (Wolfowitz et son plan d’hégémonie mondiale) et 1996 (mise en place du groupe dit New American Century”). La chose vient de beaucoup plus loin et place effectivement le groupe spécifique des néo-conservateurs au rang de comparses ou d’“idiots utiles” c’est selon, — mais comparses et “idiots utiles” habiles en publicité et en affaires, sans aucun doute...
Il semblerait qu’un livre apporte beaucoup de lumière sur cette question – The Road to 9/11: Wealth, Empire, and the Future of America, de Peter Dale Scott. Nous ne l’avons pas encore lu (nous nous promettons de le faire bientôt) mais nous pouvons déjà en avoir une idée générale à partir d’abord d’une critique très laudative mise en ligne le 11 octobre sur OnLine Journal. La thèse que rapporte cette recension est celle de la “deep politics” (“politique profonde”), terme affectionné par Peter Dale Scott. Les racines vont aux années 1960 et la chose prend tout son essor à la fin des 1970 et au début des années 1980. Deux hommes sont au centre de ce phénomène depuis cette dernière époque: Rumsfeld et Cheney, déjà compères dans l’équipe de Gerald Ford (président de 1974 à 1976). Des deux, c’est certainement Rumsfeld qui est le plus intéressant, le plus dynamique dans cette entreprise.
«Writing with a touch of the charm of the poet that he is, Dr. Scott has been walking us through this political-historical shadow land for some time now. The Road to 9/11, which as the title indicates, provides historic origins of the terrorist strikes of September 11, 2001, builds on and extends his prior research into secret intelligence activities as presented in his two past UC Press books; Cocaine Politics: Drugs, Armies, and the CIA in Central America (1993) and Deep Politics and the Death of JFK (1996) (among others) by speaking both about current concerns with the Bush-Cheney administration in relations to the events on 9/11/01 and by going further backwards — scrutinizing secret American governmental activities just after the end of World War II. It vividly concentrates on Richard Nixon’s failed regime and Tricky Dick’s early forays into threatening constitutional democracy as revealed during the Watergate hearings. He then depicts and examines the activities of Nixon’s successor Gerald Ford, concentrating on his (what would later become neocon) team of Donald Rumsfeld and Dick Cheney.
»Scott pays close attention to the Rumsfeld-Cheney collaboration under Ronald Reagan’s regime on what is known as the Continuity of Government (COG) strategy: a parallel planning structure in lieu of nuclear war which includes plans for warrantless surveillance, suspension of habeas corpus, and the arrangements for mass detention; proposals which can also be described as plans for a potential military-civilian coup. By now the narrative of shadow government — what Scott calls “deep politics” (p. 121) — has taken hold and the book begins to read like an airport page-turner; scorching the eyes with tale after tale of intrigue and deception. But the characters are real (Kissinger, Casey, Brzezinski, Carter, Reagan, the Rockefellers, bin Laden, Clinton, et al) and the events — which rotate around big oil, terrorism, drug trade, arms deals, covert financing and secret security configurations are heavily documented in the copious footnotes (which I equally read with jaw-dropping fascination).»
L’attention sur ce livre de Peter Dale Scott nous a conduit à une autre recension du même livre, du site BuzzFlash (sans indication de date, mais sans doute en mai 2007). En voici des extraits:
«Dale raises vital unanswered questions about the emergence of the secret state within a state in the United States, while avoiding the pitfall of descending into adamant conspiracy theories.
»Yet, Dale gets to the heart of the underlying conspiracy at the heart of what is basically the Cheney Administration, a parallel secret government run by those who believe that they must make decisions on behalf of the rabble of democracy, because democracy cannot be trusted and is too cumbersome.
»The challenge with many conspiracy theories is that they try to answer all the questions with “confirmed facts,” when in fact that is a impossible task because the nature of a secret shadow government is to hide the facts. We can speculate about what we don't know, but we are left, for the most part, only seeing the shadow in Plato's cave.
»Peter Scott Dale understands that it is first necessary to understand the historical underpinnings of an unaccountable executive branch, and that its very existence, in violation of our checks and balances, could lead to almost any conspiracy theory being possible, but that the very nature of clandestine activity leaves us begging for answers.
»In short, Dale connects the documented facts and unanswered questions into a damning indictment of a United States where a secretive authoritarian head has lost any connection to its democracy-based body.
»The logical result of this historical trend was the event known as 9/11, and the implications that Rumsfeld and Cheney used it to achieve covert goals that they had been hatching back during their White House years in the '70s.
»Dale pretty much represents the BuzzFlash perspective on 9/11 when he notes: “When asked for my opinon of what happened on 9/11, I customarily answer that I am sure of one thing only: that there has been a significant cover-up of vital issues.”»
Ce qui est dit dans cette dernière critique, tant sur la perspective qu’offre Scott (bien Peter Dale Scott, selon les références du livre) que sur 9/11 nous paraît excellent. Les choses sont remises en place sans qu’il soit nécessaire de se perdre dans les dédales et les délices de l'examen clinique du complot. La “politique profonde”, ce qui est nommé “Continuity of Government” (COG) constitue un phénomène structurel fondamental; 9/11 est un événement conjoncturel. Le premier concerne l’esprit et l’intuition historique parce qu’il concerne la substance du phénomène américaniste dans sa dérive forcée par le National Security State et le complexe militaro-industriel; le second concerne les nerfs et la passion parce qu’il concerne l’accident accélérateur d'un processus déjà à l’œuvre, où beaucoup ont cru voir une révélation. Entre la substance et l'accident, l'intérêt ne se négocie pas, non plus que l'importance à accorder à l'un et à l'autre.
Nous avions déjà publié quelques remarques sur le COG, en présentant en mars 2004 un article de Atlantic Monthly sur le sujet (également qualifié de “culture Armageddon”), particulièrement sur Rumsfeld-Cheney sous Reagan. La carrière et l’activité des deux hommes correspondent parfaitement au surgissement du processus de “privatisation” de l’Amérique à partir du “Manifeste Powell” de septembre 1971, riposte décisive de l’establishment capitaliste à près de 40 ans d’un gouvernement à structure rooseveltienne mis en place à partir de 1933. Ainsi découvre-t-on une continuité, une logique, qui met en cohérence les événements actuels. Il s’agit bien de l’histoire de l’américanisme, système bureaucratique bien plus qu’empire historique, de son essor en tant que complexe militario-industriel jusqu’à son déchaînement incontrôlé d’aujourd’hui.
Mis en ligne le 20 octobre 2007 à 18H46
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