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884En décembre 2007, les Européens (essentiellement les Allemands) du consortium Eurofighter (EADS) annonçaient qu’ils retiraient le Typhoon de la compétition norvégienne pour un nouvel avion de combat. (Cette compétition est désormais réduite au Gripen suédois et au JSF présenté par les USA.) Les commentaires qui accompagnaient ce retrait, y compris venus d’Eurofighter, indiquaient que sa cause était la certitude acquise par Eurofighter que le choix norvégien était déjà fait en faveur du JSF/F-35. Gerard O’Dwyer, de Defense News, rapporte, le 14 janvier, les inquiétudes sinon l’irritation des Américains, qui semblent penser, eux, que la Norvège préfère le Gripen au JSF. Cela est visible, sinon audible, dans une partie du commentaire rapportant une intervention de l’ambassadeur US en Norvège.
«…Benson Whitney, the U.S. ambassador to Norway, told Norway's public broadcaster NRK on Jan. 2 that Norway risked losing its present high level of military collaboration with the United States if the country chose the JAS Gripen over Lockheed Martin’s F-35. Whitney said buying F-35s would best guarantee the high level of military and political collaboration between Norway and the United States.
»“It is, of course, up to the Stortinget [Norway’s parliament], the government and the people of Norway to decide about defense, and relations with the United States,” Whitney said. “Choosing a Swedish fighter may mean less contact between the Norwegian and American military. Hundreds of Norwegian pilots have trained in America, and dozens of Americans have come to Norway to train with Norwegian pilots — we don’t want to lose that contact.”
»Most Norwegian fighter pilots, who fly F-16s, have done their training in the United States.
»“If the future fighter is Swedish, Norwegian pilots will train in Sweden rather than the United States,” Whitney said.
Une autre partie du commentaire présente le cas du Gripen en expliquant ce qui serait sa fortune présente par un contexte plus vaste d’accord entre la Norvège et la Suède. O’Dwyer s’appuie essentiellement sur une source au ministère de la défense norvégien.
«“We are likely to see a landmark agreement between Norway and Sweden in 2008 that involves an unprecedented level of collaboration between the defense forces of each country,” the Norwegian MoD source said. “Interoperability of equipment has been a mainstay of the ongoing talks.”
»The potential cooperation with the Swedish Air Force has U.S. officials worried about the F-35’s chances in the Norwegian competition.
»“There has been a significant uplift in activity by Saab and Sweden to play the Nordic card over recent months,” the source said. “This Nordic card envisages a scenario where two or more Nordic nations, most probably Sweden and Norway, will establish a common fighter unit to police their national airspace or participate in international operations.”
»The source said the potential deal was one reason the Eurofighter group withdrew its fighter bid in late December. (…) “Ironically, the Eurofighter consortium felt that a two-horse race had developed between the F-35 Lightning II and the Gripen and sensed that it was pointless remaining in the process,” the source said. “Eurofighter even suggested that the F-35 Lightning II was being favored by Norway. It seems that the U.S. believes Norway may opt for the Gripen.”»
Il est évident que la Norvège tient une place très particulière dans le contexte exposé ici. D’une façon assez révélatrice d’un point de vue stratégique, ou bien assez logiquement symétrique si l’on se place du point de vue de l’OTAN, la Norvège entretient comme la Grèce d’excellentes relations avec la Russie. Il s’agit sans aucun doute de relations nettement meilleures que celles de l’OTAN et de la norme des pays de l’OTAN. Des sources à l’OTAN affirment que les Norvégiens ont régulièrement des discussions bilatérales avec les Russes, très discrètes et très efficaces, en rapport avec la sécurité de la frontière commune des deux pays. L’autre axe de la politique de sécurité de la Norvège semble bien être une politique nordique active, notamment avec la Suède comme le détaille la source de O’Dwyer. Les sources de l’OTAN que nous citons signalent qu’un accord type Article 5 de l’OTAN aurait été proposé par la Suède à la Norvège. (L’Article 5 garantit un soutien effectif des parties signataires en cas de mise en cause de la sécurité d’une des partie.) Dans ce contexte, l'intérêt norvégien pour le Gripen serait effectivement très logique sinon évident.
L’intervention US (l’ambassadeur Whitney) en faveur du JSF porte la marque habituelle de la politique d’influence US lorsqu’elle se trouve contestée: assez brutale et sans guère de formes. Il est significatif de la perception de leurs intérêts par les USA que cette intervention concerne la vente d’un avion de combat plus que la politique de sécurité de la Norvège. Les Américains montrent qu’ils sont intéressés par la vente de leur quincaillerie, nullement par la sécurité européenne. Ils semblent avoir la position qu’il est vital qu’aucun pays coopérant dans le programme JSF ne choisisse un autre avion que le JSF pour son équipement. A côté de la brutalité de l’intervention, c’est également un signe de la fragilité du programme qui a plus que jamais besoin de tous ses soutiens.
D’autre part, cette affaire, dans le contexte général rapporté ici, montre le déclin de l’influence US consécutif aux échecs de la politique étrangère US et à la perception de la réduction radicale de la puissance américanistes. In illo tempore (celui de l’influence US triomphante), de telles interventions publiques, qui frisent l’ingérence à ciel ouvert dans les affaires intérieures du pays impliqué, n’étaient pas nécessaires dans un pays comme la Norvège parce que l’influence US était suffisamment puissante pour assurer le marché sans autre forme de procès.
Mis en ligne le 15 janvier 2008 à 07H55
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