Décidément, le JSF est dépassé, – pourquoi ne pas lui préférer un successeur?

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Le JSF, le fameux F-35 du Pentagone, est loin, très loin de son entrée en service. Un nouveau problème apparu sur le moteur F135 de Pratt & Whitney (voir Aviation Week & Sopace Technology [AW&ST] sur le site [accès payant] Aviationweek.com du 5 février) rend probable un nouveau délai dans le premier vol du premier F-35B de pré-série/série à décollage vertical, prévu en mai-juin prochain. La première mise en service opérationnelle de l’avion, prévue en 1999-2000 pour 2008-2009, est prévisible dans la situation présente pour 2013-2014 si aucun autre problème technique ou de budgétisation n’apparaît. C’est dire si l’on considère ici l’hypothèse la plus extrême dans l’optimisme et la moins probable dans le réalisme…

Nous évoquons ici le début (développement, entrée en service) de la chaîne d'ores et déjà calamiteuse du JSF. D’autres évoquent la fin de cette chaîne, pour avancer implicitement l’argument que le JSF, – à cause des déboires du début de la chaîne, justement, – est dépassé et qu’il serait préférable d’aller directement à un successeur. Il s’agit d’une offre Boeing pour un avion de “sixième génération” (le JSF étant labellisé “cinquième génération”) qui permettrait de faire l’économie du JSF, dans tous les cas pour l’U.S. Navy.

C’est le même AW&ST du 4 février (accès toujours payant) qui développe la nouvelle…

«Boeing is trying to chip away at Lockheed Martin’s lead in the future fighter stakes by pitching further variants of the F/A-18 Super Hornet, followed with the promise of a leap to what some now dub a sixth-generation combat aircraft.

»The company is continuing to push both the Super Hornet and the F-15 Eagle in the export arena, and may be eroding some potential Lockheed Martin F-35 Joint Strike Fighter markets. In the mid-term, however, Boeing requires a new platform if it wants to sell combat aircraft beyond the final iterations of its current generation.

»The underlying economic message is that in a time of flat defense spending, there’s money to be saved through extending the life of Super Hornets by adding advanced technologies instead of buying some versions of the F-35 (in particular, the U.S. Navy’s F-35C). By postponing fifth-generation fighter purchases, some technology investments could be delayed to around 2024, when Pentagon officials say potential air defense threats will make their next major advance.

»Boeing is touting an even newer version of the Super Hornet that would be paired with an advanced sixth-generation fighter that has a combat radius of more than 1,000 mi., stealth against low-frequency radars, and that would be available about 2024. In particular, Boeing analysts have targeted the C-version designed for conventional aircraft carrier operations, particularly if it slips schedule and gains cost. They hasten to add that they’re not suggesting the U.S. Air Force buy the Super Hornet instead of the F-35A. Fifth-generation fighter characteristics are generally held to be all-aspect stealth and the ability to sustain supersonic speed without the use of afterburner.»

AW&ST présente la nouvelle, pourtant développée dans un article consistant, avec un certain scepticisme («a still-nebulous sixth-generation, multipurpose fighter design»). La revue précise tout de même que Lockheed Martin, qui développe le JSF, travaille lui aussi sur un tel projet («Meanwhile, Lockheed Martin and the companies with which it may partner are not ignoring their own next-generation designs. Advanced programs researchers at Lockheed Martin say they want to build a multirole aircraft that, with a few modifications, can handle the missions of long-range surveillance, sixth-generation fighter and long-range strike.»)

On observera que, dans l’environnement budgétaire actuel, le projet de Boeing a du sens, – l’on dirait même, ou plutôt: du sens politique. L’aspect principal de ce projet est en fait qu’il se décompose en deux séquences, la première étant la prolongation du Boeing Super Hornet modernisé jusqu’à l’arrivée du futur chasseur. (Et l’on serait tenté de poursuivre en avançant l’hypothèse que, des deux séquences, c’est celle du Super Hornet prolongé qui intéresse Boeing pour l'instant. L’idée lui rapporte de l’argent, lui achète du temps en bloquant une partie du programme JSF, et lui ouvre des opportunités pour l’avenir, – dito la deuxième séquence du chasseur de “sixième génération”.)

Les deux mesures se combinent pour apparaître comme une tentative de réduire, sinon éliminer le programme JSF. (L'offre est, en elle-même, parce qu'elle est développée dans ces conditions, une indication des difficultés du programme JSF. Si le JSF se développait sans à-coup, il serait insubmersible et Boeing ne perdrait pas son temps à de telles initiatives.) La combinaison s’adresse essentiellement à la Navy, qui n’aime guère le JSF et qui se trouve très à l’aise avec le Super Hornet. La proposition comblerait les vœux de nombre d’amiraux, qui pourraient ainsi dégager dans les années à venir un peu de budget pour leur flotte. Elle trouverait également sa logique dans une perspective budgétaire, au Pentagone, qui implique à la fois l’incertitude (nouvelle administration en 2009) et les restrictions (diverses impasses budgétaires vont apparaître à partir de 2009-2010, qui vont imposer de fortes pressions contre des programmes actuellement en développement).

C’est une situation inédite dans l’histoire de la programmation aéronautique des grands programmes d’armement. L’évocation sérieuse d’une offre de mettre en chantier un successeur d’une nouvelle génération d’avion de combat ultra-moderne encore en développement et prévu pour une production massive, pour éventuellement le remplacer, est effectivement un cas sans précédent.


Mis en service le 6 février 2008 à 14H12