F-22 versus JSF, suite précisée et envenimée

Bloc-Notes

   Forum

Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.

   Imprimer

 1329

Les auditions se succèdent au Congrès, à Washington, pour la présentation du budget de la défense FY2009. Grandit parallèlement la polémique entre le F-22 et le F-35, dont on a déjà un écho, dans cette rubrique, aujourd’hui même.

La chose se développe toujours autour de Gordon England, adjoint de Robert Gates au Pentagone, qui se trouve de plus en plus installé dans une position de partisan farouche du F-35 (JSF) contre le F-22. (Il est à noter qu’il s’agit curieusement d’une circonstance fortuite qui permet de donner une telle publicité au conflit. England témoigne en remplacement de Robert Gates, qui est blessé. Gates est partisan d’une série supplémentaire de F-22, dont il préfère laisser la décision aux parlementaires. Si lui-même avait témoigné comme prévu, le cas du F-22 contre le F-35 n’aurait certainement pas éclaté si vivement puisque Gates n’aurait pas été en désaccord avec les parlementaires qui veulent une rallonge de F-22.)

La suite des auditions permet d’assister à une intéressante “montée aux extrêmes” entre les partisans des deux programmes, mettant en évidence ce qu’on avait jusqu’ici plus ou moins dissimulé, – à savoir que les deux programmes sont concurrents budgétairement, donc qu’ils sont concurrents tout court dans l’environnement budgétaire actuel.

Le 13 février, Defense News (accès payant) a publié un commentaire sur une audition à la Chambre des Représentants, suivant celle du Sénat la veille (dont nous rendons rapidement compte dans la note déjà signalée). L’audition se fait devant la commission des appropriations pour les forces armées, présidée par le démocrate Murtha et vice-présidée par le démocrate Dicks. Dicks et Murtha sont évidemment sur la même ligne, partisans du F-22.

«The pointed exchange between the panel’s vice chairman, Rep. Norm Dicks, D-Wash., and England was the latest development this week in a string of comments that spotlights a growing schism between the Bush administration’s Pentagon team and key lawmakers about whether the Air Force should buy more F-22 Raptors or F-35 Lightning IIs to replace worn-out F-15s.

»On one side are top Pentagon officials, led by England, who remain soundly opposed to buying more than about 190 F-22s. This group would favor replacing grounded F-15s with F-35s, also known as Joint Strike Fighters, which are expected to have a lower per-plane price tag.

»On the other side are lawmakers like Dicks and Rep. John Murtha, D-Pa., the subcommittee chairman, who are leaning toward buying more Raptors, mainly because its production line already is humming. U.S. defense behemoth Lockheed Martin makes both warplanes.

»The exchange began during a hearing on the White House’s 2009 defense budget plan, when Dicks questioned the administration’s decision to essentially take no definitive action on the F-22 program other than not paying to shutter the production line.

(…)

«With more than 100 of the service’s older F-15s grounded because of structural problems, [the Office of the Secretary of Defense] allowed the Air Force to divert about $400 million initially budgeted for Raptor line-closure costs toward operations and maintenance accounts “to address the F-15 situation,” said England, sitting in at the session for injured Defense Secretary Robert Gates.

»Dicks, however, did not appear satisfied with that explanation. “Shouldn’t you have done one or other,” he asked England, referring to either buying more Raptors or closing the production line.

»“To be blunt, the Air Force has spent $65 billion [on the Raptor program] and you have 183 planes,” England shot back. “Look, at some point, we have to buy” the cheaper fighter, the F-35, he said.

»But after the hearing, Murtha told reporters England’s figure for how much the air service has spent to purchase its 183 Raptors is a bit misleading. That’s because, Murtha said, when major defense platforms are bought in larger quantities, their per-unit costs typically come down significantly. He said the Air Force has told him that if it is allowed to purchase the 381 Raptors it wants, the per-jet price could shrink by as much as “10 or 12 percent.”

»Murtha made it clear, however, that he would only support buying more Raptors if the Air Force “is convincing” in describing to the subcommittee the kinds of threats the additional F-22s would be used to combat.

»“The department believes [the service] has enough” F-22s, Murtha told reporters after the hearing. “The Air Force is trying to prove to the committee — and we’ll have hearings later on — to tell us, ‘These are the threats.’”»

Cette polémique du F-22 versus F-35 prend des allures et des dimensions étonnantes. Les arguments échangés deviennent eux-mêmes très polémiques. Désigner, comme le fait England, le F-35 comme le successeur du F-15, donc l’équivalent modernisé du F-15, n’a guère de sens, ni technologique ni opérationnel. (Le F-35 est conçu pour l’appui tactique, nullement pour la mission de supériorité aérienne.) L'insistance d'England sur un argument aussi contestable mesure l'âpreté de la polémique. D'autre part, il a l'effet de suggérer que l'évaluation officielle du Pentagone est désormais qu'une partie importante des F-15 qui ont été interdits de vol suite aux accidents qui sont survenus à la fin de l'année dernière ne seront pas récupérés en service actif et devront être remplacés rapidement.

`

Contrairement au décompte que propose Defense News, la position d' England ne reflète pas nécessairement la position de la direction civile dans sa totalité (voir Gates) mais elle contribue notablement à radicaliser le débat. Autre curiosité de cette affaire: républicains (dans tous les cas de l’administration Bush) et démocrates se retrouvent à fronts renversés. Le JSF est en général considéré comme un “avion démocrate”, lancé sous Clinton, soutenu par les conceptions globalistes (coopération) des démocrates. Le F-22 est plutôt un “avion républicain”, conçu selon les conceptions d’un renforcement militaire massif, destiné en principe à rester “unilatéraliste” (exportations improbable), et qui fut surtout favorisé par les administrations républicaines. Les positions sont inversées.


Mis en ligne le 14 février à 13H18