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964On a déjà vu combien, à l’intérieur d’un système dont il est certes comptable (ce qui implique des limites à la critique, sans aucun doute), le sénateur républicain Chuck Hagel représente une des personnalités les plus proches de la lucidité critique et de l’honnêteté intellectuelle. Le livre (America: Our Next Chapter) que vient d’écrire Hagel et qui sera en vente le 25 mars nous donne ses réflexions sur l’état de l’Amérique.
Raw Story (Associated Press) nous en fait rapport le 20 mars:
«U.S. Sen. Chuck Hagel writes in a new book that the United States needs independent leadership and possibly another political party, while suggesting the Iraq war might be remembered as one of the five biggest blunders in history.
»“In the current impasse, an independent candidate for the presidency, or a bipartisan unity ticket ... could be appealing to Americans,” Hagel writes in “America: Our Next Chapter,” due in stores Tuesday. The Associated Press obtained an advance copy.»
La dépêche d’AP donne certains détails sur les démarches d’Hagel avant la guerre en Irak. Opposant déterminé à cette guerre depuis son déclenchement, Hagel avait pourtant voté les pouvoirs de guerre au président. Dans son livre, selon le rapport qu’en fait AP, il donne les explications suivantes :
«During visits to the Middle East in December 2002, Hagel said, Israel's top security officials asked, “Do you really understand what you are getting yourselves into?”
»Hagel said Bush personally assured him that he would exhaust diplomatic avenues before committing troops to Iraq. The senator said he voted for the war resolution based on those assurances, but regrets the vote because it's now clear that lawmakers were presented with lies and wishful thinking.»
Ces explications montrent bien que Hagel a eu avant le conflit une position ambiguë. On peut lui reprocher d’avoir voté les pouvoirs de guerre mais on doit également observer qu’il l’a fait sur certaines assurances du président. Ces précisions sont inédites et complètent bien l’idée d’une manipulation générale dans le chef de l’administration Bush pour obtenir le soutien le plus large possible à cette attaque, y compris auprès de parlementaires républicains (cela n'était pas connu). Elles montrent que le président lui-même était partie prenante dans cette manipulation; si la guerre a semblé être essentiellement au départ une entreprise des néo-conservateurs, il apparaît de plus en plus qu’il s’est agi dès l'origine de l’action d’un “parti de la guerre” débordant largement cette seule faction.
D’une certaine façon, ces conditions de départ en plus de ce qui a suivi (l’opposition décidée à la guerre en Irak de Hagel depuis 2003, l’aventure irakienne tournant en catastrophe, les menaces d’attaque de l’Iran) expliquent que Hagel, homme d’attitude modérée, envisage la possibilité de réformes en profondeur du système US pour tenter de sortir de la période actuelle. Il confirme ainsi in fine qu’il existe une tendance au sein de l’establishment, déjà perceptible lorsqu’on évoquait une candidature indépendante de Michael Bloomberg, prête à prôner des mesures très importantes de restructuration du système politique. On ignore évidemment si ces idées peuvent encore être d’application dans la campagne présidentielle actuelle.
Hagel a de toutes les façons un rôle important à jouer dans un mouvement de cette sorte. On le pressentait comme un éventuel vice-président d’une candidature Bloomberg. D’autre part, il y aurait des contacts entre Obama et lui, ce qui impliquerait une autre sorte de rupture puisqu’il est républicain et que Obama est démocrate. Dans le climat actuel, beaucoup d’hypothèses restent possibles. Exemple récent, on commence à envisager celle où, dans le cas où Clinton serait désignée comme candidate par des manœuvres au congrès de désignation du parti démocrate, Obama pourrait être tenté lui-même par une candidature indépendante. Dans ce cas, Hagel pourrait être de la fête.
Mis en ligne le 21 mars 2008 à 09H13