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955Il est vrai que la thèse du protectionnisme pour expliquer l’action du GAO et tout ce qui s’ensuit dans l’affaire du programme KC-45 ne fait pas un pli en Europe. Les milieux atlantistes et pro-US sont les plus acharnés à cet égard, ce que nous observons d’un œil intéressé et assez vif, avec une ombre d’ironie bien dissimulée. Il n’empêche, et nous tenons à notre interprétation, que nous ne croyons pas une seconde que l’intervention du GAO soit partiale et biaisée.
Il semble bien qu’il y ait eu, dans la sélection de EADS/Northrop, une certaine complaisance de l’USAF. La cause en est bien connue: l’USAF avait une peur bleue d’une sélection de Boeing, dans un marché (exclusivement avec Boeing à l’origine) déjà pourri par d’innombrables scandales, cas de corruption, erreurs, etc., et que le sénateur McCain et le Congrès derrière lui avaient pris en ligne de mire. Depuis, certes, la vertu a changé de camp puisque c’est Boeing qui en est paré, – mais nous parlons des conditions de sélection par l’USAF.
Les trouvailles faites par le GAO sont sérieuses, telles qu’exposées plus en détails par Aviation Week & Space Technology le 30 juin (accès payant). Le même article relève que l’USAF a plus ou moins admis qu’il y avait eu de sa part une certaine “intentionnalité” d’écarter de la logique de sa décision au moins un point important qui défavorisait EADS/Northrop Grumman.
Voici les extraits de cet article d’AW&ST qui concernent précisément cet aspect de la polémique.
«The findings and recommendations, released June 25 by the GAO, Congress’s auditing arm, are an expanded version of a three-page summary issued June 18 and they shed light on some of the complicated technical issues that were weighed by the Air Force during the source selection.
»The GAO says that if the Air Force had properly assessed the technical and operational requirements of the 767 and A330 designs, as well as the cost of both proposals, “Boeing would have had a substantial chance of being selected for award.” Furthermore, in one area, the auditors found that the winner’s inability to meet a key maintenance requirement essentially nullifies its win and extra credit was unfairly awarded to Northrop Grumman and not to Boeing.
(…)
»One of the thorniest issues for the service is a requirement to provide a plan to begin an Air Force-run depot maintenance facility for the KC-45A within two years of delivery of the first production aircraft. During the competition, the Air Force raised as a problem Northrop Grumman’s multiple failures to provide documentation to support this requirement. However, the Air Force source selection committee concluded “this was an ‘administrative oversight’ because Northrop Grumman had promised to provide the required services.”
»During a hearing conducted by the GAO as part of the audit, the Air Force “admitted for the first time that Northrop Grumman’s ‘omission’ appeared to be a conscious decision.” This was later bolstered when the company admitted during a rebuttal period that its omission was “intentional,” the GAO audit finds.»
C’est évidemment dans ce contexte qu’il faut interpréter la décision de Robert Gates de confier le dossier du KC-45 et son processus de sélection nouvelle manière à une autorité extérieure de l’USAF (au sous-secrétaire aux acquisitions, à la technologie et à la logistique, John Young). Cette décision est absolument normale, sinon évidente. Dans tous les cas, Gates prend une attention toute particulière à ne pas mettre en cause l’USAF. Les explications de Gates, rapportées par Defense News (9 juillet, accès payant), sont cohérentes et essentiellement de forme. Il est manifeste que, devant la gravité de l’affaire où tout le monde, – l’USAF mais aussi le Pentagone en tant que tel, – est confronté à des risques considérables, il s’est établi une sorte de “paix armée” entre le secrétaire à la défense et l’USAF.
«But Gates and Young denied that GAO's conclusions - coming 1 1/2 years after it canceled the Air Force's November 2006 contract award to Boeing for a combat search-and-rescue helicopter – mean that the Air Force's acquisition process is broken.
» “I have confidence in the acquisitions team,'' Gates said. “I think that Secretary Donley has indicated that there are some areas where there needs to be improvement, but I think we will go forward with that.”
»That confidence extends to Sue Payton, the Air Force assistant secretary in charge of acquisition, Gates said.
»But he added that placing his top acquisitions chief in charge of the selection process “is an appropriate and necessary step to ensure congressional and public confidence that DoD can and will successfully manage to completion a large, complex procurement such as the KC-X. It is essential for the department, working with Congress, to maintain both internal and public confidence in our acquisition process.
» “This is the third time we've gone at this,” Gates said. “And under those circumstances, it seemed to me that we were most likely most quickly to gain the confidence of Congress in the way forward by having the undersecretary oversee this particular contract.”»
Quoi qu’il en soit, cette prise en charge inévitable de la décision par OSD (Office of Secretary of Defense) doit encore plus favoriser la politisation de l’affaire, notamment comme elle a été lancée par les atlantistes européens. Désormais, c’est Robert Gates qui, par l’intermédiaire de Young, est en première ligne. Il est probable qu’il prêtera plus d’attention aux observations du Congrès qu’à la fureur des atlantistes européens.
Mis en ligne le 10 juillet 2008 à 15H24