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981Dans “les chancelleries” occidentales mais également américanistes, il ne fait aucun doute que l’inquiétude devant l’évolution de la situation entre la Géorgie et la Russie ne cesse de grandir. «Il y a une crainte générale qu’un conflit éclate cet été, les Russes sont terriblement sérieux dans cette affaire et ils considèrent qu'on atteint le seuil de l'inacceptable», dit-on et ne cesse-t-on de répéter dans des milieux européens de haut niveau. Du côté US, on n’en est pas moins inquiet de la situation en Géorgie, ce qui est une chose relativement nouvelle.
Les sources européennes en question rappellent la déclaration de l’ambassadrice US à l’OTAN Victoria Nuland, le 10 juin à Novosti (voir notre Bloc-Notes du 12 juin). Elles précisent que si Nuland a dit ce qu’elle a dit, c’était évidemment avec l’approbation tacite du département d’Etat; que ses idées commencent à être partagées à Washington; que ses observations selon lesquelles ni la Géorgie ni l’Ukraine ne sont “prêtes” à entrer dans l’OTAN se traduisent par l’interprétation qu’une telle décision (leur entrée dans l’OTAN) serait une provocation insupportable pour la Russie. Dans la situation présente, il s’agit d’observer que l’affaire géorgienne est devenue pour la Russie une provocation déplacée et qu’il faut désormais songer à tout faire pour désamorcer la bombe.
(L’agence Novosti avait notamment rapporté ceci de sa rencontre avec Nuland: «On the issue of Ukraine and Georgia's membership, she said they were not ready to join NATO yet. Ukraine and Georgia failed to secure membership of an action plan paving the way to accession to the bloc at a NATO summit in spring, but were told the decision would be reviewed in December. “There is not a single NATO member who would say today that Ukraine and Georgia are ready to be NATO members,” she said.»)
Les mêmes sources européennes rapportent que cette évolution à Washington concernant la crise géorgienne est essentiellement le fait du département d’Etat de Condi Rice, que la secrétaire d’Etat aimerait en venir enfin à une phase plus créatrice de son passage au département d’Etat, avant de le quitter, pour ne pas y laisser un legs trop négatif fait de multiples points d’affrontement. Ainsi, disent ces sources, il faut placer l’évolution US vis-à-vis des relations avec la Russie en parallèle avec l’initiative qui vient d’être annoncée de l’envoi à Téhéran du n°3 du département Nicholas Burns. L’appréciation de ces sources européennes est que cette initiative iranienne doit être perçue comme très sérieuse et marquant réellement un tournant diplomatique des USA. Rice ne veut pas laisser à son successeur, sur ce dossier également, une situation bloquée et antagoniste.
Cette appréciation de la démarche de Condi Rice, notamment sur l’Iran, est néanmoins soumise à l’éventuelle pression d’une vision nécessairement optimiste de ces milieux européens cités, favorables à un regain diplomatique US qui permettrait le déblocage de certains dossiers. Il semble assuré que Rice veut une orientation de cette sorte vis-à-vis de l’Iran mais les forces qui lui sont opposées, notamment les restes du vice-président Cheney, conservent une certaine influence agonisante auprès d’un président lui-même dans un processus d’évaporation. Cela suffit pour un semi-blocage par limitation des décisions. Par conséquent, l’initiative iranienne, bien réelle, semblerait devoir rester contrainte dans certaines obligations qui en limitent l’effet. C’est l’idée que présente Gareth Porter, sur antiwar.com aujourd’hui («Seismic Shift or Non-Decision by Bush on Iran?»). En ce qui concerne la question géorgienne dans le cadre des relations avec la Russie, la contrainte du clan Cheney est peut-être moins forte mais il n’y a pas encore eu d’initiative notable de Rice, – laquelle doit être particulièrement surveillée en ce moment. Quoi qu’il en soit, ce climat de confusion américaniste introduit un facteur d’indécision de plus du côté occidental, tandis que les initiatives russes (la proposition Medvedev d’un traité paneuropéen) bouleversent le paysage politique au détriment de l’influence US.
Mis en ligne le 19 juillet 2008 à 09H38