Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
718
15 avril 2003 — L’hebdomadaire Defense News vient de signaler le mécontentement des Norvégiens pour l’état de leur participation dans le programme JSF. La nouvelle est donnée de façon assez abrupte et sans réel ménagement : « Difficulties in competing for high-tech work share could prompt Norway to bail out of the U.S.-led F-35 Joint Strike Fighter (JSF) program, according to Norwegian officials. »
Ce n’est pas la première fois que les Norvégiens s’agitent à propos du programme JSF. Ils l’ont déjà fait en janvier, de manière aussi critique. Des sources proches de l’OTAN nous indiquent que les réactions US à cette première intervention avaient navigué « entre indifférence et agacement, selon les services concernés, au State department ou au Pentagone ».
D’une façon générale, les Américains s’en tiennent aux réalités chiffrées, au niveau de participation des Norvégiens, qu’ils jugent parfaitement correspondant à ce qui est donné aux Norvégiens et à ce qui leur sera probablement donné. Le problème est à ce niveau : les Américains tiennent compte, dans leurs estimations, de ce qui pourrait revenir aux Norvégiens dans le futur, les Norvégiens estiment ce qu’ils ont reçu et qu’ils jugent complètement insuffisant.
Il reste que l’insistance norvégienne est inhabituelle. Elle l’est à un point où elle a une signification de plus que les significations technique, bureaucratique et commerciale qu’on peut également lui donner. Elle l’est à un point où elle a une signification politique. Selon nos estimations, deux aspects politiques sont effectivement impliqués.
• Le départ de “Pete” Aldridge a concrétisé de très fortes inquiétudes à propos de l’état du programme, en posant quasi-officiellement la question de savoir si le DoD, et notamment l’USAF, soutient toujours ce programme. Il va de soi que la Norvège est inquiète de ce développement et sa contestation sur le traitement qui lui est fait, est une façon d’exprimer aussi cette inquiétude.
• D’une façon plus générale, et c’est là une nouveauté extrêmement intéressante, cette attitude de la Norvège exprime aussi (bis) une inquiétude plus générale à l’encontre de la politique expansionniste US (inquiétude nettement exprimée lors d’entretiens privés, notamment entre le gouvernement norvégien et une délégation de la présidence grecque de l’UE, il y a quelques semaines). La Norvège est un pays trop petit et trop isolé, dans tous les cas elle l’estime, pour exprimer de telles réserves de façon directe. Elle prend le biais d’un programme où sa position légale lui donne une possibilité légale d’exprimer des inquiétudes, pour le faire d’une façon appuyée, réaffirmée à deux reprises. Cet incident, qui n’est certainement pas clos, — le retrait norvégien du programme JSF est aujourd’hui une possibilité très sérieuse — signale une nouvelle situation dans le domaine de la coopération et du transfert des armements dans le cadre transatlantique, une situation de “politisation” extrême où les engagements se feraient désormais autant en fonction de positions politiques que de décisions purement techniques. La coopération transatlantique risque de devenir le théâtre privilégié de l’affrontement transatlantique.