Turquie et effondrement de la diplomatie US

Turquie et effondrement de la diplomatie US

6 novembre 2003 — Il apparaît désormais clairement que le déploiement de troupes turques en Irak, en soutien des forces américaines, ne se fera pas. Cet échec est principalement expliqué, dans les rapports publiés ce matin, notamment celui du Guardian, par l’attitude de la diplomatie américaine.

« Turkey is said to be privately "amazed" at the breakdown and at Washington's inept diplomatic handling of the issue. There is also dismay in Ankara at the perceived US failure to make adequate political and logistical preparations in Iraq itself, the source said.»

Cette situation était anticipée depuis plusieurs jours, essentiellement à la lumière de ce comportement américain dont les Turcs ne cessent de dire leur étonnement et leur agacement. D’un peu partout dans le monde viennent des signes similaires qui montrent l’état particulièrement pathétique de la diplomatie américaine aujourd’hui, et, au-delà, la dégradation accélérée de l’image des USA, singulièrement, aujourd’hui dans les élites habituellement pro-US, dans les principaux pays étrangers.

Nous sommes à un tournant, essentiellement dû à la situation en Irak qui met en évidence, derrière l’apparence de force de l’Amérique, les immenses faiblesses de cette puissance. La diplomatie de force de l’Amérique, appuyée sur une parfaite ignorance des autres, et d’ailleurs une complète indifférence à leur égard, provoque de plus en plus de réactions d’hostilité. Il est manifeste que le succès européen avec l’Iran, selon la volonté de l’Iran elle-même, doit être placé dans cette logique.

Après le 11 septembre 2001 et jusqu’à l’attaque contre l’Irak, l’Amérique faisait de plus en plus peur. Les réactions étaient d’alignement, de soumission, de manoeuvre, etc. Les maladresses de la diplomatie US ne portaient pas à conséquence, on les subissait en silence, parce que la puissance US primait tout. En 6 mois depuis l’attaque en irak, avec la dégradation de la situation en Irak, la perception de l’Amérique a complètement basculé. Aujourd’hui, la diplomatie US, maladroite et agissant comme si la toute-puissance américaine existait toujours, irrite et exaspère. Les conséquences ne devraient pas se faire attendre, avec des regroupements et des choix actifs de plus en plus ouvertement anti-américains. La principale bénéficiaire de cette évolution sera l’Europe, perçue comme un “leader” alternatif à l’Amérique. Le choix de l’Inde et de la Chine en faveur de Galileo est un signe indubitable de cette évolution.