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30182 mars 2016 – A Washington, les stars antiSystème poussent comme des champignons par une saison humide, soudainement survenue sans doute à cause du changement climatique dont on ne manquera pas d’investiguer sur l’intéressante question de savoir à quel pourcentage il faut fixer la responsabilité humaine. La dernière en date de ces stars antiSystème est une ravissante jeune femme de 31 ans, d’origine polynésienne (des îles Samoa), citoyenne US à Hawaï, qui a servi comme soldat(e) en Irak en 2003, qui est en train de prendre une stature considérable à la Chambre des représentants où elle est une des représentante d’Hawaï pour une seconde législature, et où elle ne cesse d’affirmer la puissance de ses vues politiques et de la dialectique pour les exprimer.
Tulsi Gabbard était curieusement présentée « more like a hawkish Republican than a potential future Democratic leader » par Amber Phillips, le 15 octobre 2015 dans le Washington Post (grand journalisme professionnel, Amber, avec un tel jugement) alors qu’elle est plutôt du type isolationniste-réaliste, farouchement opposée à la folle politique de regime change et de l’interventionnisme humanitariste, mais applaudissant à des initiatives structurées, avec une “stratégie de sortie”, comme celle de la Russie en Syrie. Bref, un oiseau rare...
Et l’oiseau rare s’est envolée du nid ! Le 15 octobre dernier, on fêtait la désignation de Gabbard à la vice-présidence du DNC (Democratic National Committee), un beau coup pour une parlementaire de son âge (la plus jeune parlementaire du genre-femme au Congrès des États-Unis), devenant ainsi la n°2 dans la structure bureaucratique du parti. Avant-hier, elle a démissionné, parce que sa fonction l’oblige à la neutralité par rapport aux candidats démocrates, alors qu’elle veut absolument soutenir Sanders. L’oiseau rare est aussi, et ainsi volatile d’autant plus rare, hors du contrôle du vieux parti démocrate dont Hillary est l’accorte représentante aux yeux hallucinées dans ces primaires. (« The Democrat that Republicans love and the DNC can’t control » titrait Phillips, mettant sa méconnaissance encore plus en évidence, quant à l’amour que lui porteraient les républicain-Système.)
Le coup d’audace de l’oiseau rate est partout saluée par les antiSystème plutôt de gauche et progressistes qui préféreraient ne pas avoir à finir cette campagne en se trouvant obligés d’applaudir à un éventuel grand parcours de Trump ; du coup, ils se précipitent pour presser Sanders de la choisir comme candidate vice-présidente (voir par exemple CounterPunch et Moon of Alabama). Le Washington’s Blog, lui, préfère voir plus loin en reprenant à son compte un texte de Mike Krieger, via Liberty Blitzkrieg : selon l’interprétation de Krieger, la démission d’une star comme Gabbard n’est rien de moins qu’un signe avant-coureur, et de quelle puissance, de l’implosion du parti démocrate, implosion style-GOP...
« The importance of [Gabbard’s] move cannot be understated. In no uncertain terms, this gesture publicly exposes the weakness of the “Clinton brand.” She clearly isn’t afraid of Hillary or of any repercussions from the Democratic Party elite, a fact that is underscored by the fact she came out with her endorsement after he got pummeled in South Carolina.
» But let’s take a step back and think about this in the even bigger picture. You don’t get to Congress by being a political imbecile. On the surface, this move looks like career suicide, particularly since Hillary is probably about to clinch the nomination. Recall, Rep. Gabbard didn’t merely endorse Sanders after a bruising loss in South Carolina, she stepped down from her official position with the DNC to do so. This isn’t merely a statement, it’s the equivalent of dropping a neutron bomb on the Democratic establishment. So why did she do it?
» While I think she genuinely agrees with Sanders on key issues, the reason she came out so aggressively is because she sees the writing on the wall. She’s playing the long game, and in the long game, Hillary Clinton represents a discredited and failed status quo, while Bernie Sanders represents a push toward the paradigm level change that will define the future. In summary, I believe this marks the beginning of an all out civil war within the Democratic party. A war that won’t be over until someone successfully does to the Democratic Party what Trump did to the GOP. »
Voilà donc un acte de plus de la folie-bouffe qui s’est emparée de Washington. Qu’est-ce que tout cela signifie ? Ou bien, comme on nous l’a confié : “Que se passe-t-il là-bas ?”, selon une source européenne s’adressant à un représentant européen officiel dans la capitale US, et recevant en réponse ces deux seuls mots qui se suffisent à eux-mêmes : “Chaos, period.”
Le Super Tuedsay d’hier ne va faire qu’accentuer cette tendance au chaos qui touche l’establishment au travers de sa panique, parce que les résultats confirment les pires craintes des directions des partis, selon les tendances connues en cette matinée du 2 mars. D’une part, la marche triomphale de Trump se poursuit avec des victoires dans sept États, tandis que le Texas et l’Oklahoma vont à Cruz, et le Minnesota à Rubio, le candidat favori de l’establishment, Rubio. Du côté démocrate, Clinton, toujours grosse d’une inculpation dans l’emailgate, l’emporte dans la majorité des États (sans doute sept, comme Trump), mais plutôt grâce à une organisation née de l’argent, quelques situations de fraude, et aussi une participation assez faible montrant que l’espoir décroit d’une opposition sérieuse de Sanders. Nombre de démocrates ne trouvent plus dans leur parti une représentation de ce courant révolutionnaire qui secoue le pouvoir washingtonien. La perception, dans ce cas, est que la dynamique-Trump risque d’emporter Clinton dans le probable affrontement final comme on peut l’envisager selon les conditions actuelles, – mais bien des choses peuvent encore changer du côté du chaos engendrant des situations extraordinaires, – et même si Trump n’est pas donné vainqueur contre elle dans les sondages nationaux ; la perception dynamique va bientôt influences ces sondages, et d’ailleurs qu’importent les sondages car cette dynamique emporte les convictions en faveur de Trump, comme dans l’avancée d’un phénomène naturel irrésistible.
... Et certes, voici pour le dynamisme républicains, selon Libération ce matin :
« C'est l'un des enseignements majeurs de ce Super Tuesday et il est de nature à inquiéter Hillary Clinton : cette année, l'enthousiasme et la mobilisation sont très clairement du côté républicain. La primaire conservatrice en Virginie, par exemple, a mobilisé plus d'un million d'électeurs, pulvérisant le score de 2008 (490 000 votants) de plus de 110%. Comme le montrent les chiffres du Edison Media Research, cités par le Washington Post, cette nette augmentation de la participation s'observe dans presque tous les scrutins républicains : +63% dans le Tennessee, +57% dans le Vermont, +40% dans l'Alabama. La corrélation est frappante : les Etats où la participation a le plus augmenté sont également les états remportés par Donald Trump. «Les républicains ont une énergie incroyable, contrairement aux démocrates», a taclé Donald Trump lors de son discours de victoire. Les chiffres lui donnent raison : dans le camp démocrate, la participation est en baisse partout par rapport à 2008. Moins 40% dans le Tennessee, moins 32% en Géorgie, 22% dans l'Oklahoma, etc. Il y a deux lectures possibles de ces chiffres, qui ne sont d'ailleurs pas exclusives l'une de l'autre. La première : le duel entre Bernie Sanders et Hillary Clinton ne mobilise pas les électeurs démocrates. La seconde, bien plus inquiétante pour l'ancienne First Lady : Donald Trump séduit au-delà du camp conservateur et attire aux urnes des démocrates et indépendants qui cette année, ont préféré voter pour la primaire républicaine. De très mauvaise augure en vue de l'élection générale de novembre. »
Pourtant, comme nous l’écrivons ci-dessus, “bien des choses peuvent encore changer du côté du chaos engendrant des situations extraordinaires”, parce que de nombreuses manœuvres sont encore possibles : 1) parce que l’opposition républicaine à Trump reste divisée, parce que les deux autres principaux candidats (Cruz et Rubio), dont aucun ne domine complètement l’autre, se battent également entre eux ; 2) à cause de l’extraordinaire complexité du système de cette démocratie exemplaire par rapport aux votes populaires qui peuvent être contredits par divers artifices ; 3) à cause des diverses interventions possibles au niveau des manipulations des fraudes, etc., et également dans l’attribution des délégués. Par conséquent des possibilités existent d’une convention divisée et dans l’impasse, une “broken convention” (cas qu'on peut envisager dans un cas assez possible des résultats : Trump en tête, mais n’ayant pas assez de délégués pour une majorité absolue, avec une coalition contre lui qui n’aurait pourtant aucun pouvoir légal, sinon de possibilité politique, d’offrir une alternative puisque cette coalition serait elle-même divisée hors son opposition commune à Trump) ; au-delà, des possibilités de fractionnisme dans le désordre et d’antagonisme, voire de réactions populaires pour protester contre de telles possibilités.. Et cela, dans un pays privé de direction, car, dans ces événements, Obama tend à quasiment disparaître, aussi inopérant et absent que l’était GW Bush à partir de septembre 2008, avec la grande crise financière qu’il avait complètement laissée à ses ministre concernés pour la régler d’une manière comptable, on sait dans quel sens. (La différence est que cette “absence” d’Obama commence quasiment au début de l’année électorale tandis que celle de GW se manifesta à la fin de l’été.) Encore, l'“absence” stratégique d’Obama due à la prise du pouvoir par le tintamarre des primaires se renforce-t-il du caractère notoirement indécis du président en titre...
L’establishment a peur, d’une peur panique, et le nœud de cette bataille est bien dans cette psychologie qui reflète l’absence complète de la puissante assise de la légitimité qui peut seule assurer la sûreté du pouvoir. La psychologie règle tout, dans cette ère de la communication où les sentiments extrêmes se répandent comme traînée de poudre ; et cette rapidité, à Washington, démontre a posteriori cette fragilité terrible du pouvoir que l’on pouvait déceler dès 2006-2008... Wesley Pruden, commentateur vedette du Washington Times assez franc-tireur pour être écouté avec attention et intérêt, résume cela dans un éditorial du 1er mars titré simplement « Panic on the eve of destruction », comme l’on dirait d’une panique qui amène au sort de l’autodestruction, en en appelant pour l’image révélatrice au plus grand des généraux sudistes après Robert E. Lee :
« Stonewall Jackson disait que le secret de [ce que tout le monde s’accorde à reconnaître comme] son remarquable génie militaire, – les académies militaires d’Occident étudient toujours ses tactiques, politiquement incorrectes ou pas, – était que “Je ne prends jamais conseil de mes peurs”. Les élites républicaines ont finalement [, une fois perçu le danger,] pris conseil seulement de leurs peurs. » (Ce que FDR traduisait, dans son discours d’inauguration de mars1933 en plein trou noir de la Grande Dépression, par “ce dont il faut avoir peur, c’est de la peur elle-même”.)
Même si l’on est évidemment d’accord avec Pruden, on lui objectera aussitôt, sans désir de contredire mais avec la seule simplicité des évidences : de quoi d’autres peuvent-ils “prendre conseil” ? De leur légitimité ? Ils n’en ont plus aucune, ignorant même le mot, et dès lors ils ne peuvent s'en remettre qu’à leurs peurs qui se résument d’ailleurs à une seule, – “la somme de toutes les peurs” : être balayés comme autant de fétus de paille, eux que plus rien ne retient, qui sont légers comme des plumes tant ils sont vides de toute structure, de tout principe, usurpateurs et insultes vivantes au grand principe d’un pouvoir humain comme de toute autorité qu’est la légitimité, c’est-à-dire le droit naturel, quasiment transcendant, d’exercer ce pouvoir et cette autorité.
Le pouvoir washingtonien implose et explose à la fois. Il se contracte de l’intérieur, à court d’arguments et de moyens, tandis qu’il commence à se dissoudre au travers des multiples fragmentations, des soutiens qui vont à Trump tandis qu’une autre partie de l’establishment continue à clamer que rien ne le fera jamais accepter sa candidature. Les neocons sont en complet désarroi et tirent fiévreusement des plans, qui pour rallier l’autre camp et annoncer le soutien à Clinton, qui pour presser pour le lancement soit d’un troisième parti soit d’un candidat indépendant. Les neocons voient leur puissant navire jusqu’alors ivre de conquête se percer de multiples voies d’eau et ils maudissent Trump, l’homme qui accepte les hommages de Poutine et qui, dit-on, ne voudrait pas bombarder la Russie.
Par ailleurs, autant vous le dire tout de suite : Washington vit déjà, sans attendre de connaître tous les résultats du Super Tuesday, à l’heure de l’affrontement suprême, cette affreuse bagarre qui va embraser Washington et qui déjà tonitrue dans tous les discours. Jamais la politique de l’américanisme n’a été soumise à la pression et à la tension d’une telle force, d’une telle puissance et d’une telle haine dans l’affrontement de deux conceptions qui apparaîtront de plus en plus inconciliables, à mesure de la montée aux extrêmes. There will be blood...
Tout cela présagent-ils des lendemains qui chantent, et pour qui sinon pour nous antiSystème, et tout cela nous dit-il précisément de quels lendemains il s’agit ?
On observera que si nous parlons particulièrement de Trump, pour des raisons électorales évidentes, cela ne nous empêche pas de parler d’autres galopins (et “galopines” si l’Académie Française veut bien sacrifier à la postmodernité et à l’égalité des genres) qu’on pourrait étiqueter antiSystème. Car, pour nous, bien entendu, c’est bien là l’essentiel (establishment, Système, antiSystème...). Mais nous ne sommes pas “tout le monde“, y compris dans les antiSystème, tant s’en faut et bien loin de là...
En effet, un nombre fort important de commentateurs, eux, s’interrogent sur les diverses tendances qui caractérisent l’un ou l’autre dissident, ou transfuge du Système, sans qu’on sache s’il faut encore le prendre pour du comptant, si, par exemple, il ne serait pas une sorte de false flag. D’ailleurs, tout cela se fait dans une cacophonie remarquable où l’on va vite à une conclusion faussaire, comme Amber Phillips avec Gabbard, concluant qu’elle serait une darling des faucons républicains parce qu’elle veut affronter Daesh alors qu’elle juge que Poutine fait parfaitement cela parce que son intervention a un but et une stratégie. Allez donc parler à Lindsay Graham ou à McCain d’applaudir Poutine et d’approuver son intervention en Syrie !
Certes tout le monde s’interroge, surtout chez les antiSystème, chez nombre d’entre eux où l’on entretient pieusement le mythe de la toute-puissance (bien entendu maléfique) de l’“Empire” et de ses nombreuses tentacules, de l’extrême habileté et de la non moins grande efficacité de la CIA .... Que représentent-ils, celui-là, celle-ci, pour qui roulent-ils, tous et chacun d’entre eux ? ... Trump est l’homme des militaires, ou bien encore, chez les plus exotiques d’entre tous dont finalement les descriptions fantasmagoriques ne déparent pas vraiment l’ensemble, Trump serait l’homme des francs-maçons qui s’élèvent contre la course folle imposée par les globalistes ; mais d’autres, ou les mêmes, vous expliquent que Cruz, lui aussi, est un peu l’homme des militaires, et ainsi de suite... Il faut convenir que, dans cet immense bordel qu’est devenu Washington, littéralement du jour au lendemain, tout est possible et, dans ce cas et en bonne logique d’insensé, aucune hypothèse n’apparaît vraiment insensée ; par contre, combien d’hypothèses ne font pas saliver la raison et lui donner l’impression pleine d’ivresse de dominer, au moins pour un instant, les événements du monde par la simple magie de les ordonner à l’échelle humaine et de les comprendre selon la logique humaine ?
... Bref, tout est possible dans le champ de l’hypothèse interprétée comme une certitude par celui qui l’émet dans cet immense désordre où rien n’est assuré et où rien, par conséquent, ne viendra vous contrecarrer du démenti de quoi que ce soit. Par conséquent, l’on s’offre le luxe de prétendre, sinon de vouloir tout savoir en sachant qu’on est assuré du bonheur tranquille de ne se heurter nulle par à quelque démenti que ce soit ; c’est l’évidence, parce que ceux qui pourraient vous opposer tel ou tel démenti par simple respect des consignes, ne savent plus quelles sont les consignes puisque le désordre règne dans les consignes elles-mêmes. Si vous faites aujourd’hui un tour des grands organismes de sécurité nationale, y compris comme représentants de grandes institutions officielles non-US, vous trouverez les habituels bureaucrates de bon rang de la même boutique (NSC et département d’État) pour vous assurer que l’on va effectivement imposer une no-fly-zone en Syrie, cessez-le-feu ou pas cessez-le-feu, Russes ou pas Russes, c’est sûr et certain sinon déjà décidé, – sauf que, eh bien oui, précisent comme en passant les mêmes “bureaucrates de bon rang”, ni le président ni le secrétaire d’État ne veulent en entendre parler. Il est vrai que les choses sont dites exactement en ces termes et selon cette logique abracadabrantesque, – ainsi, voyez où en sont les consignes, le désordre, les complots et les manipulations.
Mais non, l’on veut savoir ; l’on veut connaître précisément quel sera notre destin après cette formidable déflagration en train de se faire ; l’on veut absolument être assuré et l’incompréhensible, de l’insaisissable, de ce qui devrait être apprécié pour plus de sûreté comme l’inconnaissable...
Selon PhG: « Comprend-on que cette déflagration est en train de tout changer et que tout sera différent lorsqu’on arrivera à son terme ; que peut-être, et même sans doute, une autre explosion suivra, ou même aura enchaîné directement, comme il se fait dans la fameuse réaction en chaîne, le processus de l’explosion nucléaire ; et l’image a bien des vertus car effectivement nous sommes sur le terrain de l’option nucléaire qui est en train de se développer à Washington, dans la structure du pouvoir washingtonien et de l’establishment, au cœur du cœur du Système... Comment voudrait-on savoir et connaître ce qui se passera dans une situation dont on ne connaît rien aujourd’hui sinon quelques éléments épars, qui se formera de ces éléments et d’autres que nous ne connaissons pas, selon un rangement que nous ignorons bien entendu ? Quelle prétention est-ce là sinon le produit de la vanité de la raison, bien souvent raison-subvertie, qui prétend encore diriger les affaires du monde alors qu’elle est balayée par les événements qui dominent présentement le sort du monde ?
» Son seul rôle possible, à la raison, est de tenter de rendre compte, éventuellement d’interpréter le sens de l’explosion en cours et d’en tirer les détails qui importent pour un projet d’appréhension des choses beaucoup plus vaste quoique plus simple (ou bien plus simple parce que plus vaste) ... C’est-à-dire que, plus que jamais car c’est dans de tels moments que ce caractère montre toute sa vertu, doit régner l’inconnaissance qui écarte toutes les recherches prétendant à la connaissance de points précis et obscurcissant ainsi l’ensemble. »
Il y a d’abord la reconnaissance simple et évidente que nous n’avons rien vu venir, que nous ne comprenons pas vraiment pourquoi tout cela éclate à ce moment, et que tous les acteurs eux-mêmes sont dans cette situation. Toutes les explications que nous lisons, même lorsqu’elles ont un réel intérêt parcellaire en précisant tel point ou tel point, ne peuvent aucunement nous satisfaire quant au sens et à l’effet probable général de la chose. Dans nombre de cas, plus ou pire encore, ces explications, outre de ne pas se faire comprendre pour l’essentiel, ont pour effet d’obscurcir ce qui pouvait être encore éclairé du spectacle général qui est le sort du Système. Elles accentuent encore le désordre profond qui prolifère, dans cette sorte de situation, sous les apparence d’ordre que voudrait imposer telle ou telle interprétation impérative. En d’autres mots, même si nous nous en satisfaisons pour le cadre réduit qui est décrit, nous n’y comprenons rien par rapport au tableau général qui est celui qui devrait nous intéresser en priorité.
L’inconnaissance alors s’impose... L’inconnaissance est une position de sagesse, de retenue de l’émotion trop vite excitée, et surtout une position d’ouverture pour saisir ce qui est essentiel et se dessinera de soi-même. L’inconnaissance fait que nous ne nous saisissons volontairement que de peu de choses dans le foisonnement de détails supposés avérés et d’orientations suggérées, et ne tenons pas à en saisir beaucoup plus, concentrés sur la possibilité de trouver dans ce “peu de choses” ce qui concerne le sort du Système, – et c’est pourquoi notre attention va à cette sorte de choses. Ce que nous voulons, et que nous permet l’inconnaissance, c’est libérer la perception pour une tâche plus essentielle, qui est d’observer et de suivre ce qui semble être le plus indicatif du sort général du Système, de ses fondements tectoniques en pleine tremblements, pour pouvoir mieux les identifier comme tels et les saisir lorsqu’ils se montrent en pleine lumière...
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