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2687Le discours qu’a fait le secrétaire d’État Mike Pompeo le 21 mai à l’Heritage Foundation, ainsi que l’attitude qu’il a montrée lors d’une intervention interne devant des cadres de son département quelques jours plus tôt indiquent que l’actuelle administration Trump, et d’une façon générale tout l’establishment de Washington D.C., arrivent à un point d’exaspération arrogante et de fureur guerrière pour tenter de réaffirmer une hégémonie mondiale qui s’est très fortement érodée ces deux dernières années, et poursuivant dans cette voie. (Mais, bien entendu, cet establishment refusant et niant cette érosion et donc envisageant tout ce qui est nécessaire pour que cette perception universelle chez les autres soit décisivement liquidée.)
Il ne s’agit plus ni d’une attitude partisane, ni d’une manœuvre stratégique en coordination avec tel ou tel ou instrumentalisée par tel ou tel (lire Israël éventuellement) contre tel ou tel (l’Iran, la Syrie, la Corée du nord, etc.), bien que tous ces éléments soient présents. Il s’agit d’une affirmation messianique et d’essence quasi-religieuse, fortement idéologisée, qui ne concerne que les USA par rapport à eux-mêmes, quasiment hors du monde ; une attitude concernant le suprémacisme historique et pseudo-métahistorique des USA sur le reste du monde, qui ne peut être mis en doute ni contestée par quiconque ; une attitude concernant à la fois leur droit et leur devoir d’essence quasi-divine de fixer une fois pour toutes ce suprémacisme en termes d’hégémonie mondiale.
Cela se traduit par ce que Pompeo affirme être une “agressivité justifiée par la justesse de la connaissance” (“aggressiveness born of righteous knowledge”) expliquant le volonté des USA de soumettre par la coercition (jusqu’à la force militaire s’il le faut, cela va de soi avec un joyeux entrain) les parties récalcitrantes devant cette hégémonie d’inspiration divine... Par “parties”, nous entendons cela va de soi l’Iran, la Corée du Nord, la Syrie pour les crises les plus pressantes ; bien sûr la Russie et la Chine pour la concurrence inacceptable de souveraineté et de puissance ; bien sûr aussi les allié du bloc-BAO qui entraveraient cet effort, notamment les Européens qui doivent accepter avec joie et entrain leur rôle de “vassaux privilégiés dans la pratique de la vassalité”.
Il faut se convaincre absolument que “cet effort” a, aux yeux du personnel américaniste de Washington D.C. devenu “D.C.-la-folle” plus que jamais, corrompu et d’une capacité intellectuelle marquée par l’aveuglement et la brutalité mais habitée par une vision hypomaniaque de sa vertu et de sa puissance, toute l’onction suprahumaine (divine) nécessaire pour le justifier et, bien entendu, garantir son succès. C’est ce que l’auteur John Wight, dont nous publions le texte ci-dessous, nomme fort justement comme “l’empire entrant dans sa phase de folie furieuse” (“the empire enters its mad dog days”)
Jim Jatras, ancien fonctionnaire du département d’État définit bien l’attitude de Pompeo et de l’establishment de Washington dans cette occurrence et selon la perception que nous en développons. Un extrait d’une interview de lui publiée le 17 mai 2018, suivant la communication que Pompeo avait faite au personnel du département d’État, est bien illustratif de la chose.
RT : « Pompeo a parlé de la “justesse essentielle” de l'Amérique dans les affaires mondiales. Que veut-il dire par là ? »
James Jatras : « Je ne pense pas que ce soit unique à M. Pompeo. Vous avez une attitude à travers la classe politique ici à Washington qui semble presque un double de la vision de l'Union Soviétique : “Nous sommes l'avant-garde de toute l'humanité progressiste; nous sommes la paix, le progrès et le socialisme”. Disons que, dans notre cas, c'est “la paix, le progrès et les droits de l'homme”. Nous avons raison et tout le monde doit prendre exemple sur nous. Je pense que ce genre d'arrogance est malheureusement assez standardisée à Washington. »
RT : « Quand un diplomate parle d’une “agressivité justifiée par la justesse de la connaissance”, cela envoie-t-il potentiellement un signal inquiétant au reste du monde ? »
Jim Jatras : « Bien sûr, c'est le cas. Cela va au-delà du simple patriotisme, de l'amour du pays et même du sentiment que nos valeurs nous sont chères. Cela semble répondre à une sorte de situation qui nous place au-dessus de tout et de tous, sur le mont Olympe si vous voulez, une position à partir de laquelle nous sommes fondés d’être juges de tous les autres, du reste du monde. Malheureusement, c’est une attitude très familière qui n’existe pas seulement avec cette administration, qui existe je dirais au moins depuis 1991, lorsque la guerre froide a pris fin, qui s’est poursuivie au long des administrations Bill Clinton, GW Bush et Barack Obama. »
Nous considérons dans ce cas que Pompeo n’est pas un cas personnel, mais qu’il correspond parfaitement à cette situation d’un empire totalement pourri et en cours d’effondrement qui proclame sa vertu suprême et divine, si besoin est, – et le besoin s’en fait terriblement sentir, — à l’aide de la force militaire. Avec son allure de capo de la Cosa Nostra, Pompeo est idéal dans l’emploi, comme l’est, dans un genre différent, John Bolton, marqué par un déchaînement idéologisé froid, furieux et absolument résolu de se tenir à l’extrême de l’extrême pour l’accomplissement de la doctrine du Mont Olympe. Au-dessus, Trump, l’hypomaniaque-narcissique (ce qui ne signifie pas démence), préside parfaitement et légitimement à une agitation qui rencontre tous les vœux de cette petite communauté de gredins qui caractérise “D.C.-la-folle”.
Comme dans tout “empire” (pseudo-empire) en cours d’effondrement, la haine interne entre tous ses composants du pouvoir se poursuit parallèlement, plus forte que jamais, mais l’hypomanie de cet adoubement divin présent intensément dès l’origine (1776-1788 selon l’idée de Melchior Grimm que « Le XVIIIème siècle a surpassé tous les autres dans les éloges qu’il s’est prodiguées à lui-même », pas 1991) est aujourd’hui en pleine éclosion, sinon en pleine explosion comme un feu d’artifice ; ainsi donne-t-on au simulacre une illumination d’influence suffisante pour permettre de poursuivre l’aveuglement qui importe pour repousser toute manifestation incongrue de la vérité de l’effondrement du susdit pseudo-empire.
Il est évident que le danger n’a jamais été aussi grand d’incidents, sinon de manœuvres délibérées débouchant sur des situations extrêmement dramatiques, avec le spectre d’un conflit aux dimensions les plus grandes. D’autre part, le pseudo et le simulacre restent pseudo et simulacre tout ensemble : quelle que soit l’intensité de la tragédie, elle n’en reste pas moins tragédie-bouffe.
La puissance US peut prétendre se déchaîner, il n’est pas assuré qu’elle ne manifeste pas en même temps quelques “couacs” cosmiques comme on l’a déjà vu faire, tandis que la haine interne à “D.C.-la-folle” et la paralysie générale de l’usine à gaz au travers de sa bureaucratie, de sa dette, de son technologisme en bout de course et ainsi de suite, peuvent apporter leur contribution aux avatars de l’aventure dans laquelle les USA sont en train de se précipiter (avec nous sur le porte-bagages). MAGA certes, – Make America Great Again, – mais aussi MAFA (“Mafia” pour les amis) si l’on veut, – Make America FlopAgain... Avec eux tels qu’ils sont, dans la situation où ils se trouvent, dans la bulle-simulacre qu’ils ont bâti plus arrogante que les plus hautes des Twin-Towers ou de la Trump-Tower, avec eux vraiment tout est possible, y compris le pire pour eux-mêmes, – rengaine du jeune Abraham : « ... En tant que nation d’hommes libres, nous devons éternellement survivre, ou mourir en nous suicidant. »
Ci-dessous, le texte de John Wight du 22 mai 2018 : « Iran in the crosshairs as the empire enters its mad dog days. »John Wight est un journaliste qui collabore à de nombreuses publications, the Independent, Morning Star, Huffington Post, Counterpunch, London Progressive Journalet Foreign Policy Journal. Commentteur régulier sur RT et sur BBC Radio.
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Mike Pompeo’s bellicose rhetoric against Tehran leaves no doubt that Washington has embraced the status of international renegade.
Pompeo’s speech, delivered in his capacity as secretary of state, evinced a blatant disregard for the integrity of international treaties and respect for international law. It also ensures that the last vestiges of credibility enjoyed by the US has now been shredded in the eyes of a world grown weary – weary of a Trump administration which, in its caprice and continual threats, is more redolent of a New York mafia crime family than a respectable and responsible government.
With Donald Trump’s withdrawal from the Joint Comprehensive Plan of Action(JCPOA) – better known as the Iran nuclear deal – his administration has embarked on the path of conflict with Iran in conjunction with regional allies Israel and Saudi Arabia. Together they comprise an axis of aggression that imperils the stability of the region, with potentially grave consequences for the rest of the world given the succour such a regional conflict would give to extremism and global terrorism.
It also sets a dangerous precedent when it comes to arriving at a peaceful resolution to the on-going crisis in Ukraine and ensuring a successful outcome to the inchoate process of peace and reconciliation on the Korean Peninsula.
Thus the dire consequences of the untrammelled power of what is an imperial hegemon in Washington have never been more manifest, with its drive to dominate and dictate on pain of war reflective of an empire desperate to arrest a decline, entering its mad dog days in the process.
Let us be clear: the Trump administration’s decision to withdraw from the JCPOA has nothing to do with Iran’s compliance, which has been impeccable, and everything to do with Washington’s hegemonic agenda towards the region – a hegemonic agenda which precedes Trump.
In the way of this agenda are Iran, Syria and Hezbollah – along with Russia – which, if not on a formal basis certainly on a de facto basis, comprise an axis of anti-hegemony that needs to be broken. It is for this and no other reason that Trump, Netanyahu, and bin Salman are intent on forcing the issue with Iran, regardless of the likely catastrophic results.
They have lost in Syria, where the drive to topple the Assad government has been thwarted thanks in no small part to Russia, Iran, and Hezbollah – standing with the Syrian people and Syrian Arab Army – and in response they are intent on settling accounts.
Another casualty of Trump’s demarche against Iran is the transatlantic alliance between Washington and its various European allies, considered by its proponents to be the unbreakable and irreplaceable fulcrum of democracy in our time.
The insouciance with which the Trump administration has been willing to disregard the stance of France, Germany and the UK on the Iran deal is revelatory; proof-positive that rather than any kind of alliance between friends and partners, the true nature of the America’s relationship to Europe and the EU is akin to the one that existed between Rome and its various satellites and client states during the halcyon days of another empire – which made the mistake of believing its power and existence was eternal.
This particular aspect of the crisis, involving the prospect of US sanctions being levelled not only against Iran but also British, French and German companies operating in Iran, is reflective of the extent to which neocon nostrums are in the driving seat of US foreign policy, with any lingering façade of propriety dropped in favor of raw imperialism.
Now more than ever the wheels have come off Europe’s slavish attachment to the supposed virtues of unipolarity, with the likes of Emmanuel Macron – the very embodiment of a confected liberal centrist, a leader for whom the word ‘opportunism’ was invented – left dangling like the proverbial flunkey after being kicked to the kerb by his lord and master.
The grievous reality of Europe’s hideous lack of independence from Washington – independence of the type that once minded Charles De Gaulle to declaim, “Yes, it is Europe, from the Atlantic to the Urals, it is Europe, it is the whole of Europe, that will decide the fate of the world” – has been laid bare. It presents Europe with a test. Does it wilt in the face of the Trump administration’s imperial arrogance and bellicosity? Or does it awaken and emerge, finally, from beneath Washington’s feet to play a positive and progressive role in world affairs?
Here it is hard to imagine leaders of the questionable calibre of Theresa May and Emmanuel Macron existing anywhere else other than beneath the feet of Washington, with Macron’s earlier boast of wielding influence over Trump when it comes to Syria now returning to haunt him. The reality is that French President Emmanuel Macron carries about as much weight in Washington as a fly’s wing.
Crisis is opportunity, they tell us, and this particular crisis presents the opportunity for a new alignment in Europe, forged on the understanding that the destabilizing factor in Europe is not and has never been Russia; that it is and has always been the United States. Economically, culturally, and politically, Europe’s identity has been progressively subsumed into a US identity, with its regressive and shallow paean to the cult of the individual, unfettered capitalism, and might is right.
Therefore the choice Europe faces is clear. It can either remain tethered to the mast of the sinking ship of unipolarity, or it can join Russia, China and the rest of the world in shaping a multipolar alternative, rooted not in the caprice of a president in Washington but instead in the principles set out in the UN Charter – specifically respect for national sovereignty and international law.
Returning to Iran, which now finds itself firmly in the crosshairs of regime change for no other reason that it refuses to bow to the writ of Washington, there is no longer any hiding place when it comes to taking sides. If those countries threatened by this eruption of US aggression do not hang together they will hang separately.
Hegemony demands its response in the shape of anti-hegemony. The future of generations as yet unborn depends on nothing less.
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