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260717 octobre 2012 – L’économiste russe Valentin Katasonov donne, sur le site Strategic-Culture.org, ce 15 octobre 2012, une interprétation d’une intervention de la directrice du FMI, Christine Lagarde, lors de la rencontre annuelle du FMI et de la Banque Mondiale, les 12 et 13 octobre à Tokyo. Cette rencontre annuelle est d’habitude technique et terminée par un communiqué lénifiant, plutôt encourageant et optimiste. Cette édition de la chose déroge doublement à la règle. Le communiqué final est loin d’être optimiste et il s’y dit des choses qui ont une véritable dimension politique, dans tous les cas selon Katasonov que nous allons suivre en l’occurrence.
Il fut constaté par les diverses éminences, et par Lagarde en premier, que la situation est extrêmement tendue et sérieuse, entre les tribulations de l’euro et la situation européenne ainsi créée, et les tribulations washingtoniens, où l’élection présidentielle devrait être immédiatement suivie de la chute sans fin du budget du haut de la falaise de la dette (loi dite de “séquestration”). Cela pour l’immédiat. Pour après, c’est encore pire.
«…Secondly, serious concerns simply had to arise in connection with a certain cryptic passage in a contribution to the debate made by IMF Managing Director Christine Lagarde. “Without growth, the future of the global economy is in jeopardy, and perhaps the greatest roadblock will be the huge legacy of public debt, which now averages 110% in advanced economies, pretty much wartime levels”, said Lagarde. One is tempted to read the above as a warning that the epoch of peace is about to end and the world currently finds itself on the brink of a major war…»
Katasonov est visiblement bouleversé par cette analogie de la dette en cours avec le “niveau de la dette en temps de guerre”. C’est là-dessus qu’il fonde son commentaire et le développe. Il balaie une première hypothèse innocente pour expliquer cette référence, pour aller à l’essentiel selon lui. La présentation de son interprétation laisse entendre que des appréciations et des confidences dans ce sens ont filtré durant la réunion, en marge et en commentaire de l’intervention de Christine Lagarde. Cette interprétation est effectivement qu’en évoquant l’analogie du “niveau de la dette en temps de guerre”, on peut tout aussi bien entendre qu’il y a une suggestion que nous allons effectivement vers un “temps de guerre”, – c’est-à-dire d’un conflit majeur, de ce qu’on nomme une “guerre mondiale”. Katasonov indique qu’il s’agit là d’une sorte de suggestion, de “conseil”, éventuellement de “complot” de la part de nos maîtres-à-tous, les banksters de Wall Street, que Lagarde aurait répercuté à titre, si l’on veut, d’“information” («the world financial elite charged Lagarde with the mission of notifying the initiated of a slide into an epoch of a global war»). Ce faisant, Katasonov retrouve une dialectique connue et commune, très courante chez les marxistes auxquels lui-même paraît sensible ; cette dialectique qui va des Rothschild aux “Deux Cents Familles” et aux “marchands de canons”, – mais quoi, on admettra qu’en l’occurrence l’adage est fort bienvenu, – “on ne prête qu’aux riches”, certes… (Les soulignés en gras dans la citation ci-dessous sont de l’auteur.)
«…According to a credible alternative hypothesis, however, crucial information could have been leaked at the Tokyo meeting, the reality being that the world financial elite charged Lagarde with the mission of notifying the initiated of a slide into an epoch of a global war. Moreover, Lagarde could deliberately paint an overly grim picture of the world economy to reinforce the trend, considering that it is unclear where exactly she borrowed the 110% public debt estimate. As of the end of 2011, the index as reflected by the IMF own statistics measured 100% in the US and 87.2% in the EU, and the projections currently point to 104% and 90% by the end of 2012. No doubt, the figures are abnormally high, but they do fall short of the alarmist 110% forecast cited by Lagarde. Given the above, the disquieting second hypothesis appears to be more realistic. […]
»The banking that retains some level of efficiency in today's settings is limited to a compact group of financial heavyweights like Goldman Sachs, Citibank, J.P. Morgan, Barclays, Deutsche Bank etc, which enjoy the privilege of close partnership with the US Federal Reserve. Those post exceptional revenues, but they are attributable to investments – to the acquisition of assets across the world – rather than to lending. The availability of the assets worth buying depends on privatization being continuously relaunched in various countries, and the agenda behind globalization must be to place the world's entire natural and man-made wealth – natural resources, land, enterprises, and infrastructures – under the financial elite's control.
»Right now the investment companies linked to the US Federal Reserve are being confronted with a problem. The US policy of quantitative easings may echo with higher than ever appetites, but the dismantling of welfare statehood meets with strong popular opposition in many of the world's countries. The financial elite clearly intended to bulldoze the welfare systems in Greece, Spain, and elsewhere, but the resistance of the populations proved hard to break. It becomes obvious in this light why the financial world is interested in a war of truly global proportions. Thus the banks generating revenues by lending hope to revive demand for loans in all of the countries drawn into the conflict to be ignited, and the investors expect to nab the assets remaining in the hands of nation-states that still hold out.
»Soviet-era textbooks interpreted contemporary capitalism as a state-monopoly brand of the formation which grew out of the merger between states and monopolies. The XXI century is marked with the onset of the military-banking capitalism coupling the world's biggest banks to military might. What the military-banking capitalism needs to stay afloat is a permanent world war.»
Il y a plusieurs idées importantes dans l’analyse de Katasonov. La première est la prépondérance qu’il accorde au monde de la finance, jusqu’à considérer que ce monde-là peut, à lui seul, prétendre à la maîtrise du monde et à ses richesses. Par “monde de la finance”, l’on entend évidemment les “cœurs nucléaires” de la chose, avec Wall Street et la City, et tout ce qui est associé autour, y compris leur emprise sur les establishment politiques, leur position au sein du corporate power, etc. Il y a aussi une situation importante, qui est de l’ordre de l’influence symbolique, dans la mesure où ce “monde de la finance” représente le fondement et le cœur de l’idéologie dominante, exclusive du Système, – aussi bien exprimée par le néolibéralisme, la globalisation, le rejet absolu de toute régulation qui s’apparente à une philosophie totalitaire de la déstructuration et de la dissolution, et un rejet absolu du “principe du Principe”. De ce point de vue théorique, cette appréciation est acceptable, – mais elle a ses limites, on le verra, et il faudrait plutôt la tenir, justement, pour théorique.
La deuxième idée est de type conjoncturel et représente une hypothèse, sinon une information importante. Elle est contenue dans cette remarque sur “la résistance des populations” («The financial elite clearly intended to bulldoze the welfare systems in Greece, Spain, and elsewhere, but the resistance of the populations proved hard to break») ; elle implique qu’après quatre années depuis la crise de l’automne 2008, le “monde de la finance” semble conclure que la résistance des populations est devenue un obstacle qu’il semble impossible à réduire dans des conditions “normales“ et avec des moyens courants de répression. D’un certain point de vue, que l’on pourrait juger réaliste, cette remarque est étonnante, dans la mesure où il pourrait sembler au contraire que cette résistance pourrait être bien plus forte et plus décisive qu’elle n’est. On peut conclure que si vraiment le monde financier fait cette analyse pessimiste (pour lui) sur “la résistance des populations”, c’est alors qu’il se trouve dans un état psychologique de grande fatigue, causée par une crainte excessive et une évaluation alarmiste de la situation, dans tous les cas de sa propre situation et de son propre pouvoir. Par ailleurs, il est loisible, et même nécessaire pour mieux en juger, de retourner la remarque et de se référer à la puissance du système de la communication, comme nous le faisons par exemple le 16 octobre 2012, pour considérer qu’il est justifié de manifester de telle craintes selon la seule références des rumeurs et hypothèses concernant des manifestations de colère populaire éventuelles et à venir.
Au reste, c’est à l’hypothèse développée par Katasonov que nous faisions allusion, dans ce même texte, dans sa conclusion, cela nous conduisant au troisième point que nous voulons mentionner par rapport au texte de Katasonov. C'est et un point qui renforce particulièrement, voire décisivement, son hypothèse. Nous citons les deux paragraphes de conclusion…
«Bien sûr, on dira que c’est le grand archétype de “la fuite en avant” (éloigner des crises intra-Système en suscitant des crises hors-Système). Mais le fait est que la concurrence entre les deux types de crise ne cesse de grandir, et la convergence de s’accélérer, ce qui fait de la “fuite en avant” une sorte de grand écart de plus en plus insupportable. A cet égard, le système de la communication est impitoyable : c’est lui qui favorise irrésistiblement cette accélération et empêche les crises hors-Système de remplir leur rôle, et les conduit rapidement à se faire absorber par les crises intra-Système, ou à devenir elles-mêmes en partie des crises intra-Système.
»Aujourd’hui, l’on en est à la recherche de mesures désespérées, des mesures les plus extrêmes pour tenter d’éloigner le spectre de la crise intra-Système, allant jusqu’à envisager le déclenchement des conflits de la plus haute intensité (type-Guerre mondiale) comme mesure de crise hors-Système. Il s’agit de tentatives désespérées, au de celles que l’on envisage lorsque l’on est le dos au mur. La cause en est que la diversité et la perception des crises-intra, réalisées (quelques-unes) ou potentielles (beaucoup), sont tellement puissantes qu’elles dressent, en précipitant la psychologie dans l’humeur tragique de la perspective catastrophique, un obstacle tendant à devenir infranchissable à la machination de tels projets. Le Système est sur le point de se trouver à court de munitions pour lancer ses dernières tentatives de déflection de la perception de sa propre crise, voire à cours de volonté pour utiliser ces dernières munitions. Grosse, grosse fatigue du Système...»
D’une certaine façon, avec cette citation de notre Analyse de ce même 16 octobre 2012, nous déterminons notre position par rapport à l’hypothèse de Katasonov, qui est d’en accepter nettement la possibilité malgré l’apparente irrationalité de la démarche. C’est bien en nous référant à une psychologie exacerbée, en état de crise constante, bien plus qu’à des faits avérés que nous affirmons cette position. Il faut en effet considérer qu’à côté des incroyables efforts faits pour le sauver, et le couvrir de milliers de $milliards à partir d’une opération massive de faux monnayage qui supplante toutes les initiatives du crime organisée de l’Histoire, le système financier continue à constater avec terreur que rien ne parvient à remettre en état de marche normal le fonctionnement du Système, tandis que s’exprime comme on le voit, au moins d’une façon massive au niveau de la communication, la colère de populations exploitées comme des masses populaires soumises à un esclavage économique de type stalinien. (De ce point de vue, si l’on peut justement dire, comme le fait Martin Sieff, le 15 octobre 2012 dans The American Conservative, que la politique extérieure des USA [du Système] est de type trotskiste, la politique économique intérieure est de type stalinien, le corporate power et ses divers appendices remplaçant le Parti, sa nomenklatura et sa bureaucratie.)
Nous acceptons l’hypothèse sur les bases que nous avons signalées, d’une façon générale parce que nous jugeons que l’état général des psychologies est extrêmement tendue et dans un état de pathologie sérieuse, notamment, pour notre propos, du côté des 1% dénoncés par le mouvement Occupy ou du “monde de la finance” si l’on veut. Ce point nous semble important, en nous écartant un peu de la façon dont Katasonov présente son hypothèse. Katasonov l’évoque comme un projet plutôt construit, à partir d’analyses faites par des esprits froids, servis par des psychologies maîtrisées. Nous conservons aussi bien la “construction” que “les analyses” de la part des concepteurs de tels projets, mais divergeons complètement sur l’état de leur psychologie. De même que nous présentions le Nobel donné à l’UE comme une conséquence de la terrorisation des psychologies des dirigeants, de même ce type de projet de déclenchement d’une “guerre mondiale” pour camoufler le reste et assurer une domination renvoie au même état de terrorisation, à ce que nous désignons dans notre texte cité comme «[des] mesures désespérées, des mesures les plus extrêmes pour tenter d’éloigner le spectre de la crise intra-Système…».
Le constat de Katasonov est valable, quoi qu’il en soit des projets des uns et des autres, quoi qu’il en soit des messages subliminaux ou pas de madame Lagarde : «The XXI century is marked with the onset of the military-banking capitalism coupling the world's biggest banks to military might. What the military-banking capitalism needs to stay afloat is a permanent world war.» Tout juste pourrait-on élargir le concept de banking, et passer au military-corporate capitalism, mais cela n’a guère d’importance finalement ; ce que recouvrent ces mots finit par perdre une substance précise du point de vue de l’état d’esprit, du point de vue de la psychologie, pour renvoyer à l’élite dirigeante en général. Nous sommes dans le domaine du catégoriel par rapport au Système, et l’ensemble military-banking ou military-corporate est nécessairement un ensemble-Système qui procède désormais hors de toute nuance, sous le coup de ce que nous nommons la terrorisation de la psychologie, ressortant d’un réflexe de panique devant le sort du Système tel que les membres de ces ensembles l’appréhendent. Eux aussi sont touchés par le phénomène d’accélération de l’Histoire qui se fait par l’intermédiaire du système de la communication substituant à la réalité des évènements catastrophiques, la prévision de ces évènements catastrophiques. (Et plus ces prévisions sont diffusées hors-normes, hors des canaux officiels, plus elles sont prises en compte, parce que plus rien de substantiel ne leur est opposé par les canaux officiels.)
La seule chose qui unit ces divers éléments est effectivement la terrorisation de leurs psychologies, qui ne dépend en rien de leur puissance. Les banksters sont terrorisés (paniqués), bien qu’ils nagent dans le papier-monnaie imprimé par “l’oncle Ben”, dit “Ben l’hélicoptère” pour sa propension à distribuer ses Quantitative Easing successifs. Ils ne tiennent plus compte de leur situation présente (opulente) mais des prévisions catastrophiques du système de la communication. D’une certaine façon, les militaires sont dans une situation similaire, et eux avec des références désespérantes encore plus “solides” que les banksters, dont le Pentagone est aujourd’hui farci. (On comprend qu’un cas comme celui du JSF finit effectivement par alimenter cette terrorisation par tout ce qu’il représente en matière d’impasse, de blocage incompréhensibles, etc. On a vu que le Pentagone est en train de réaliser la profondeur insondable de la crise.) Là aussi, l’énorme manne budgétaire que reçoit le Pentagone n’a plus aucun effet rassurant, mais éventuellement le contraire. Les militaires et la bureaucratie de la défense sont certes en train de réaliser que l’apport massif d’argent n’a servi qu’à verrouiller les impasses et produit aujourd’hui des effets affreusement pervers, dans le sens de l'entropisation et de l'effondrement. Il y a là un phénomène tout simplement effrayant, qui vaut bien une terrorisation des psychologies (même en-dehors des “agressions conjoncturelles” supplémentaires comme pourrait l’être une réduction du budget par séquestration, si la chose se fait).
C’est dans ce vaste contexte qu’il faut placer l’hypothèse d’une “guerre mondiale permanente” qu’évoque Katasonov. La manufacture d’un tel projet est très possible, très concevable, peut-être même très sérieusement élaboré, mais il faut comprendre que l’on arrive aussi à cet égard à des impasses et à des blocages catastrophiques. (On ne manquera pas de noter que le qualificatif de “catastrophique” est chargé dans ce cas d’une très lourde nuance d’ironie extrêmement noire.) L’“impasse catastrophique”, c’est simplement la question de savoir si une telle “fuite en avant” est encore possible, – si une “guerre mondiale”, qui implique par définition de réels et vastes engagements militaires, les puissances majeures du bloc BAO et des puissances comme la Chine et la Russie, est encore possible. La question se décompose dans le fait de se demander si les divers processus et acteurs du Système, en admettant que tous ceux qui sont concernés agissent de concert, sont encore capables d’exercer un contrôle suffisant sur le Système, pour parvenir à la situation d’une guerre mondiale. Nous irions même jusqu’à avancer l’hypothèse, ou le “concept” dans ce cas tant cette démarche implique un changement général d’appréciation des processus d’organisation d’une décision, que l’idée même de “guerre mondiale” est devenue insaisissable et incontrôlable dans sa signification même, sans parler des mesures concrètes que cette idée implique.
On doit rappeler ici l’hypothèse d’une attaque de l’Iran avec une invasion terrestre, qui est un projet encore éloigné en volume et importance de ce que pourrait être une “guerre mondiale”. Cette option est considérée comme la plus sûre pour contrôler totalement le programme nucléaire iranien, imposer un changement de régime et contrôler le pays, et “sécuriser” la région selon les appréciations théoriques des stratèges du bloc BAO. Elle a été étudiée en 2007 par des universitaires travaillant pour le Pentagone, notamment avec le National War College, et a conduit à la conclusion qu’il faudrait une force d'un million à 1,2 millions de combattants US, impliquant une masse telle avec le soutien logistique qu’une mobilisation massive serait nécessaire, sans doute avec un retour à la conscription, et des hypothèses de délais minimums selon les objectifs et les conditions (parfaites, normales, etc.) de 12-18 mois à deux-trois années de préparation logistique aux USA au-delà du niveau actuel, avant d’envisager seulement les préparatifs logistiques de l’invasion elle-même. Dans le climat actuel, la perception des instabilités civiles intérieures notamment dans les pays du bloc BAO, l’activisme du système de la communication et l’incontrôlabilité des situations opérationnelles en cours, dans la région et ailleurs, la chose (cette option de l'invasion terrestre de l'Iran) est non seulement impossible mais tout simplement impensable, comme d'un autre temps et d'un autre monde ; c’est-à-dire qu’elle serait rejetée du simple processus de planification avant même d’être étudiée. L’on retrouve évidemment le même cas dans toute planification d’une opération de cette envergure. Les conditions courantes des situations civiles et civiques, – c’est-à-dire l’état courant de la crise d’effondrement du Système, – interdisent d’une façon générale les grandes planifications de type mobilisation qui sont nécessaires au concept de “guerre mondiale”.
La seule alternative sérieuse pour une vraie “guerre mondiale” devient une attaque nucléaire, qui est bien entendu théoriquement possible mais qui recèle un tel degré d’incontrôlabilité qu’elle se rapproche décisivement de l’idée du suicide collectif, qui ferait également qu’elle serait refusée par la planification bureaucratique nécessaire à toute préparation d’un conflit de cette sorte, et provoquerait sans doute un refus s’apparentant à un coup d’État interne “défensif” (refus d’obéissance) de la hiérarchie militaire, – ce qui briserait décisivement le front du military-banking capitalism ou du military-corporate capitalism imaginé par Katasonov. Même une attaque nucléaire “par surprise”, par saisie d’une arme nucléaire par un groupe du bloc BAO voulant initier par force une “guerre mondiale”, devrait aboutir à la prise en main du processus par les militaires pour éviter l’extension des frappes. Il est très probable que des ententes sur la non-utilisation du nucléaire, comme dernier refuge avant un désordre suicidaire total, pourraient intervenir avec les puissances nucléaires (essentiellement la Russie et la Chine, dans ce cas). Lorsque nous envisagions (le 18 mai 2012) le discours de Medvedev et son avertissement concernant l’utilisation du nucléaire à partir d’une situation de crise locale, d’une part nous envisagions la chose sur le plan théorique sans nous intéresser aux modalités d’application qu’il faudrait pour rendre un tel cas possible («Le discours de Medvedev situe bien la hauteur catastrophique des enjeux. La catastrophe nucléaire est effectivement, dans tous les cas dans la théorie de cette trajectoire de chute, comme une sorte d’aboutissement tragiquement logique d’une telle transmutation de la politique internationale en une dynamique incontrôlable et incompréhensible») ; d’autre part, nous croyons que le désordre et le chaos se sont, depuis mai 2012, accélérés d’une façon telle que nous sommes d’autant plus justifiés du raisonnement général exposé ici. De même, si l’on constate, selon notre point de vue, une dégradation complète du pouvoir dissuasif du nucléaire par rapport à la guerre froide (voir le 27 août 2012), cela ne signifie nullement la possibilité accru de son emploi ; cela signifie un accroissement exponentiel du désordre et du chaos, avec les actes réduits aux faits du système de la communication, ce qui rend encore plus évidents les blocages des bureaucraties et autres processus pour une décision d’emploi du nucléaire.
… C’est-à-dire que l’idée même d’une “guerre mondiale” se situe sur le même plan que celle de l’emploi du nucléaire : paralysée par le désordre et le chaos que suscite la crise d’effondrement du Système. Cela n’interdit rien du point de vue accidentel et inattendu (utilisation du nucléaire par un “coup” quelconque) mais cela contredit d’une façon que nous jugeons décisive tous les processus et mécanismes du Système pour initier une véritable “guerre mondiale” comme celle qu’envisage Katasonov. Nous sommes convaincus que, dans le désordre actuel, de telles hypothèses, de tels projets comme celui qu’évoque Katasonov, germent dans tant d’esprits, si possible de sapiens perturbés, et qu'ils sont envisagés par les mêmes sapiens aux psychologies maniaco-dépressives et terrorisées en plus de leur situations fortunées, et plutôt dix fois qu’une. Mais ces tentatives d'élaboration se heurtent de plus en plus décisivement au désordre général du Système, caractérisé par l’“impuissance de sa puissance” et la paralysie de tous ses processus d’action.
On comprend aisément que nous estimions trouver, dans cette hypothèse d’une “guerre mondiale sans fin”, le modèle ultime d’affrontement entre une crise hors-Système faite pour étouffer les crise intra-Système, comme nous l’avancions dans notre texte du 16 octobre 2012. Nous confirmons ce que nous y suggérions, savoir que ce modèle ultime devrait confirmer la défaite définitive des tentatives de crises hors-Système, c’est-à-dire la tentative de “fuite en avant”, et “guerre mondiale sans fin” dans ce cas. La catastrophe de l’effondrement du Système est aujourd’hui beaucoup trop avancée, beaucoup trop rapide, pour permettre que se développe une catastrophe de déflection hors-Système, permettant de tenter de sauver les restes catastrophiques du Système. Nous observerons également, cette fois plutôt pour satisfaire notre humeur, que des deux catastrophes, celle de l’effondrement du Système est beaucoup plus intéressante, instructive, roborative et ainsi de suite. Elle triomphera sans peine parce qu’elle est évidemment favorisée par le Ciel.
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