GW tombe dans les bras de Katrina

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GW tombe dans les bras de Katrina

7 septembre 2005 — GW monte sur le pont. C’est-à-dire qu’il prend des décisions, distribue les ordres et les consignes. Cheney va aller sur le front, à New Orleans, pour remettre de l’ordre. GW avertit qu’il compte bien que lui, Cheney, écartera, de sa poigne puissante, « any bureaucratic obstacles that may be preventing us from achieving our goals ». Quant à GW himself, Sherlock Holmes postmoderne avec sa grosse loupe pour trouver les traces de l'ouragan et sans la pipe (fumer est mauvais pour la santé et interdit par les bonnes moeurs), il mènera en personne l’enquête sur Katrina.

The Guardian et Julian Borger nous expliquent cela :

« President Bush, facing a political crisis over the government's handling of relief efforts in the wake of Hurricane Katrina, announced yesterday that he would lead his own investigation of what went wrong.

» Mr Bush also declared that he was sending Vice-president Dick Cheney to the ravaged Gulf coast region to assess recovery operations, and remove “any bureaucratic obstacles that may be preventing us from achieving our goals”.

» The announcements, made after a cabinet meeting in the White House, reflected anxiety that the humanitarian crisis remained grave and that the political threat to the Bush presidency's legacy and second-term agenda was growing, as more details emerged of the failure of Washington's immediate response to the disaster.

» “What I intend to do is to lead an investigation to find out what went right and what went wrong,” Mr Bush said. “We want to make sure that we can respond properly if there's a WMD attack or another major storm.” »

Lorsque nous disons que “GW tombe dans les bras de Katrina”, nous voulons dire qu’il est tombé dans le piège tendu par Katrina, et, derrière l’ouragan, “Mother Nature” et ses caprices. Son intervention est l’officialisation de la politisation de l’événement du désastre naturel. GW accepte les règles du jeu imposées par ses adversaires, les dissidents, les anti-bushistes et autres divers antiwar. Il va même désormais en rajouter par couches, selon la méthode habituelle de cette administration. L’ouragan à venir, la menace de l’ouragan, va devenir le futur Ennemi n°1 des Etats-Unis. Un mot, avec le rapprochement qu’il suggère, nous éclaire sur cela (dit par GW, en présentant son projet d'enquête sherlockholmesque sur Katrina): « We want to make sure that we can respond properly if there's a WMD attack or another major storm.” » En d’autres mots, ce mot signifie que l’ouragan est mis sur le même pied et dans la même catégorie qu’une attaque avec une arme de destruction massive, et qu'il remplace cette dernière dans la politique obsessionnelle des américanistes. Katrina devient à peu près aussi redoutable que le fut Ben Laden en d'autres temps bien lointains (Ben Laden, qui c'est celui-là?). La CIA et le FBI vont devoir infiltrer les réseaux qui préparent les ouragans.

Toute l’affaire (Katrina et le reste) entre désormais dans la catégorie “politique”, voire “idéologie”. L’administration et les républicains fidèles, qui fustigeaient la “politisation” de Katrina (derrière les accusations de vaste incompétence de l’administration) par l’opposition et les divers libéraux gauchistes, sont désormais les premiers à l’admettre. Plus encore, ils reconnaissent les erreurs et les manquements, c’est-à-dire l’incompétence, puisque Cheney va à New Orleans pour démêler les imbroglios bureaucratiques. C’est donc que ces imbroglios existent, donc qu’on reconnaît leurs effets néfastes (même si, par extraordinaire, il n’y en avait pas eu !), c’est donc qu’il y a une responsabilité humaine dans les dégâts causés par Katrina. Peu nous importe la réalité de la chose : puisque le gouvernement reconnaît cette chose, tout le monde est d’accord et c’est comme si cela était vrai. Katrina est désormais verrouillé. L’ouragan devient instantanément un événement politique majeur qui va désormais être la préoccupation majeure de l’administration : exit l’Irak et les introuvables armes de destruction massive (ADM), voici Katrina et l’ouragan de destruction massive (ODM).

La machinerie de la communication et du virtualisme tourne à plein. On va désormais manger du Katrina à toutes les sauces. La réorientation de la “politique” américaine est opérée, dans un sens amusant et, somme toute, extrêmement intéressant. On va maintenant parler des problèmes intérieurs, sociaux, culturels, des divisions internes du pays, etc., comme on a parlé de l’Irak et de la guerre contre la terreur pendant quatre ans : avec outrance, déraison, dans le mode surréaliste ou de la bande dessinée, à coups de mensonges et d’anathèmes religieux. Belle opération : en dix jours, la réorientation de la puissance américaine s’est faite sans coup férir. Drôle de puissance, qui va désormais fouiller dans les entrelacs nauséabonds de ses travers, ses vices et ses impuissances diverses.