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284910 mai 2016 – Pour une très rare fois, je dis quelques mots sur la situation française ; situation crisique, évidemment, et situation du domaine intellectuelle. Je ne suis pas un gros lecteur des choses de la vie politique et culturelle française, ne serait-ce qu’à cause des extrêmes-basses eaux où elle croupit. Disons que je me tiens au courant, et picore de-ci de-là ; notamment avec, sur la chaîne Histoire, l’émission Historiquement Show : pas de polémique style-talk-show, pas de BHL mais un bon suivi de l’actualité, histoire et histoire des idées... Et voilà qu’une petite musique a sonné à mes oreilles.
Pour faire court, cette impression de crise profonde arrivant à son point de basculement, fin d’un règne intellectuel qui a débouché sur les pires productions sociétales de la postmodernité, et dégradé le caractère français vers les culs de basse-fosse. (La grande intelligence française mise au service de la canaille de salon, pire production de l’asservissement au Système.) Ce commentaire de Jean-Pierre Le Goff, à propos de son livre Malaise dans la démocratie : « On est à la fin de ce cycle historique... On voit très bien que les fractures sont là, qu’on ne peut plus continuer sur cette espèce d’hégémonisme de ce que j’ai appelé le gauchisme culturel qui est battu en brèche.. On ne voit pas forcément sur quoi tout cela va déboucher... » Dans cette émission si classique, qui paraît si apaisée et donc s’inscrirait selon le sens commun dans l’architecture du Système, le second invité, Jean-François Colosimo, présent dans l’émission sur Le Goff, a eu cette remarque venue comme naturellement : « Il y a Paul Yonnet, qui paiera quasiment de sa vie, il faut le dire, le fait d’avoir été le premier à dénoncer l’imposture de “SOS Racisme” puisqu’il subira l’ostracisme de la gauche, le premier dans les années 1990. Il paye pour avoir dit la vérité... » A la question de savoir s’il existe en France une “police de la pensée”, tout le monde acquiesça. Tout cela est si inhabituel dans le fait de venir si naturellement, sans calcul ni arrière-pensée politique, qu’il s’agirait du signe d’une évolution significative des psychologies
Un autre aspect du bouleversement en cours, c’est la “révision mémorielle” en cours de la guerre d’Algérie. (Pour ça, voir l’Historiquement Show 238 du 15 avril, particulièrement Stéphane Courtois parlant du livre de Jean Birnbaum, Un silence religieux, la gauche face au djihadisme.) C’est un bouleversement qui intéresse ma propre mémoire, et j’y reviendrai un jour ou l’autre. Pour la situation intellectuelle française, c’est également, même si d’une autre façon, un bouleversement parce que la guerre d’Algérie dans le récit officiel actuel (la narrative, pour le coup) est la poutre-maîtresse de la dynamique intellectuelle en cours de la susdite-intelligence française.
Ma conviction est qu’est en jeu un bouleversement qui peut changer une situation dont les racines remontent très-loin, si loin, – songez à la Révolution, à l’affaire Dreyfus, – mais qui fleurissait toujours avec autant de couleur. Si la chose commence à se faner, les conséquences seront mesurées en tonnes de certitudes qui s’effondrent. Je l’avoue, pour un instant dans tous les cas, mon humeur est printanière.