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220026 novembre 2015 – Avant l’on disait qu’“un malheur n’arrive jamais seul”, aujourd’hui l’on pourrait dire, d’ailleurs d’une manière assez proche, qu’“un événement n’arrive jamais seul”, surtout lorsqu’il a la brutalité, la brièveté et la netteté de l’interception et de la destruction d’un avion de combat dans un environnement politique d’une telle intensité. Bien sûr, je parle de la destruction du Su-24 russe par les Turcs, le 24 novembre. Ce 24 novembre donc, j’ai pris le relais pour donner quelques commentaires sur le premier événement au nom du site parce que, semblait-il, nos rubriques habituelles n’avaient pas du tout l’intention de s’en charger. (Ce que j’ai fait remarquer de cette façon, – à chacun ses responsabilités : « Je n’ai fait, pour cette occasion rapide, que servir de bouche-trou pour suppléer aux autres rubriques à l’occasion des évènements du jour... »).
Aujourd’hui, deux jours plus tard, on ne se trouve pas plus avancé, je dirais même qu’on a reculé tant la profusion extraordinaire d’informations en sens divers et souvent contraires, d’analyses, de synthèses, de réflexions, se heurtent et s’entrechoquent. Toutes les orientations sont explorées, par des plumes aussi assurées les unes que les autres. D’un côté, on affirme que l’OTAN est à fond derrière “le Calife à la place du Calife”, et c’est un coup pré-arrangé pour préparer bien mieux encore, une sorte de no-fly-zone en Syrie, à-la-Erdogan quoi. D’un autre côté, on vous affirme que les ambassadeurs (des pays-membres de la susdite organisation) ont drôlement rechigné durant la réunion du 24 et qu’ils commencent à montrer quelque irritation devant les pétulantes incartades du Calife dans sa bulle. (Tout de même, pour mettre un peu de lumière sur tout ça, j’ajoute une éclatante cerise sur le gâteau : il y a eu panne d’électricité sur le réseau interne de l'OTAN cet après-midi du 24 et la réunion de 17H00 s’est tenue dans une sorte de pénombre complice, permettant à certains de bailler pendant que le Turc expliquait l’affaire. Avec un temps de saison l'atmosphère était sinistre d'ennui et d'impuissance et, comme dit l’autre qui est au courant, “ils auraient aussi bien pu faire cette réunion avec des bougies”.) A côté de cela, imaginez le nombre de théories et d’analyses assurées qui ont jailli et déferlé de tous les côtés pour vous annoncer la marche vers la Troisième ou la Quatrième, voire la Cinquième Spéciale Dernière (je parle de “la” Guerre Mondiale que nous attendons tous) ; encore, ce n’est qu’un seul aspect des spéculations.. Et dire que, dedans, il se cache des choses vraies !
Ainsi peut-on dire qu’il y a un “deuxième évènement”, qui est une sorte de réplique sismique de communication du premier. Alors qu’on aurait pu prétendre, in illo tempore non suspecto où je vécus naguère, pouvoir faire un rapport acceptable de l’événement (du premier), l’irruption, non l’explosion du second, – “l’évènement de communication sur la destruction du Su-24”, – conduit à retenir, voire à rengainer sa plume, en espérant peut-être un peu vainement que la formidable poussière soulevée par le second après le premier, le “bruit de fond assourdissant” de la communication, retombe à son tour, un jour. Certains diront : cela ne change rien, le premier fait brut, la destruction du Su-24, reste un fait brut. Cela n’est nullement assuré : la destruction du Su-24 avant-hier, à la lumière de ce qu’on a écrit sur la destruction du Su-24 entre avant-hier et aujourd’hui, fait que le premier évènement s’est modifié. Cela conduit à dire qu’on ne peut pas vraiment dire ce que signifie la destruction du Su-24 par les Turcs, parce que l’extension et la puissance diluvienne de communication qui ont suivi ont tout transformé. Même s’il y a eu complot, préparation, planification, – ou le contraire après tout, même s’il n’y a rien eu sinon l’occasion d’abattre l’avion russe, – ce qui s’est passé le 24 novembre reste tel que cela s’est fait et cet événement-là ne peut plus rien nous apprendre et ne peut plus être envisagé qu’à la lumière de la tempête de communication qui a suivi. En un sens, l’affaire de la destruction du Su-24 ne pourra être envisagée et comprise que dans ce cadre pressant de communication qui s’est emparé d’elle ; hors, ce “cadre pressant” est d’abord et avant tout, cascade diluvienne et affreusement contradictoire, c’est-à-dire désordre total. Qui réussira jamais à remettre de l’ordre dans capharnaüm assourdissant ?
Pour l’instant, je suis donc obligé de constater, en reprenant un des tics du site avec ses expressions toutes faites ou plutôt fabriquées par lui-même, qu’aucune vérité-de-situation à propos de la destruction du Su-24 ne nous est encore apparue. (Ah, tout de même, en guise de chute réconfortante à ce rapide constat d’inconnaissance, j’attire l’attention de mes quelques lecteurs bienveillants sur les déclarations absolument impayables du général tchèque qui préside pompeusement le Comité Militaire de la susdite OTAN, celles que le site a citées dirais-je pour faire drôle : l’OTAN qui se juge encerclé par la base russe de Lattaquié en Syrie et le général qui dit “il faut régler l’affaire”, et que l’idéal pour ça, eh bien ce serait de la détruire, la base... Mais bon, le monde n’est pas parfait, et l’idéal n’est pas de ce monde. Dommage, et le général Pavel écrasa une larme avant de poursuivre...)
Ainsi le désordre règne-t-il.
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