Israël vs Soros : qui est le déconstructeur ?

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Israël vs Soros : qui est le déconstructeur ?

Il y a à nouveau un très sérieux accrochage entre Israël et Soros, cette fois de la manière la plus officielle puisqu’il s’agit d’une communication du ministère israélien des affaires étrangères rectifiant un communiqué de l’ambassadeur d’Israël en Hongrie. Ce dernier (l’ambassadeur) avait condamné une campagne officielle du gouvernement hongrois contre Soros justifiée par l’action du milliardaire-activiste qui soutient la politique de migration en UE, que refuse la Hongrie.

Des affiches dans ce sens ont été placardées sur la voie publique, sous le titre “Ne laissons pas le dernier mot à Soros”. Là-dessus, des graffitis ont souvent été apposés sur ces affiches, de caractère antisémite (notamment “Juif puant”). C’est alors qu’intervient l’ambassadeur israélien à Budapest selon les formules consacrées, notamment selon l’affirmation que ces inscriptions rappellent des événements “de triste mémoire” et alimentent “des sentiments de haine et de peur”. (La Hongrie a eu une place importante dans l’holocauste des juifs, avec plus de 500.000 juifs hongrois déportés dans les camps.) Enfin, dernier épisode, l’intervention du ministère israélien des affaires étrangères qui redresse sans équivoque et d’une façon archi-officielle (porte-parole Emmanuel Nahshon)  l’intervention de l’ambassadeur : cette intervention de l’ambassadeur « n’est en aucune façon un acte visant à délégitimer la critique [du gouvernement hongrois] contre George Soros, qui ne cesse de miner le gouvernement démocratiquement élu d’Israël [...] Les  organisations financées par Soros diffament l’État juif et cherche à lui dénier le droit de se défendre. »

ZeroHedge.com, qui rapporte la nouvelle, poursuit en développant une analyse de l’attitude du gouvernement israélien autant que ses rapports avec la Hongrie, qui est le pestiféré favori de l’UE, au sein de l’UE.

« Israel's U-turn is confusing because it is normally quick to denounce anti-Semitism or threats to Jewish communities anywhere in the world. While it made that point in the statement, it chose to focus on the threat it believes Soros poses to Israeli democracy. The foreign ministry's unusual decision to issue a statement clarifying comments by one of its ambassadors comes days before Netanyahu, who also serves as Israel's foreign minister, is scheduled to visit Orban.

» According to Reuters, among the organizations Soros funds is Human Rights Watch, which is frequently critical of Israel's occupation of the West Bank and its policies toward the Palestinians. And, like Hungary, Israel has passed legislation that seeks to limit the influence of non-governmental organizations that receive a large portion of their funding from abroad. In this case from Soros and his Open Society initiative.

» Just as strange as Israel's attack on Soros, is Netanyahu's surprisingly close relationship to Hungary's prime minister. As Reuters writes, Israel and Hungary were briefly at odds last month after Orban praised Hungary's World War Two leader Miklos Horthy, calling him an “exceptional statesman”. Horthy – an ally of Adolf Hitler who approved anti-Jewish legislation in the 1920s and 1930s – cooperated with the Germans in deporting Hungarian Jews during the Holocaust. While Israel initially expressed alarm over Orban's remarks, it then quickly accepted the Hungarian government's explanation that Orban had zero tolerance for anti-Semitism and was not suggesting everything Horthy did was positive. 

» The strong ties between Netanyahu and Orban have raised eyebrows all the way at the European Union, where Orban is regarded as an “illiberal maverick” and populist whose party has curtailed press freedom and stymied EU efforts to tackle the migrant crisis. Ultimately, however, the explanation for Israel's seemingly bizarre behavior may be simple: money and influence. Hungary has held discussions with Israel about purchasing high tech security fences to keep migrants out, estimated by some to cost in the hundreds of millions of dollars, while Israel has sought better ties with countries that it hopes will take its side in any EU discussions where Israel is criticized. » 

On observera d’abord que ce n’est certainement pas la première fois qu’un relève un antagonisme entre Soros et Israël, malgré que Soros soit juif et que le fait ait souvent alimenté les théories antisémites diverses. Le 16 août 2016, Bloomberg.News notait qu’un antagonisme très vif opposait Soros et le lobby juif à Washington D.C., essentiellement sur des bases apparemment idéologiques (Soros se voulant “de gauche“ et le lobby état en général perçu comme “de droite”, des étiquettes grotesques en la circonstance, dans l’un et l’autre cas, – une fois de plus discréditant les notions de “gauche“ et de “droite”). Quelques jours plus tard, le 22 août 2016, le Jerusalem Post attaquait Soros, cette fois selon l’argument que toutes ses activités tendaient à “semer le chaos” dans le monde, et surtout à l’intérieur de la “civilisation” du bloc-BAO. L’article se terminait par ce paragraphe :

« The peoples of the West need to recognize the common foundations of all Soros’s actions. They need to realize as well that the only response to these premeditated campaigns of subversion is for the people of the West to stand up for their national rights and their individual right to security. They must stand with the national institutions that guarantee that security, in accordance with the rule of the law, and uphold and defend their national values and traditions. »

Par contre, c’est certainement la toute première fois d’une façon aussi officielle sinon solennelle que le gouvernement israélien met en cause Soros, s’inscrivant ainsi comme l’un des très rares gouvernements (avec la Hongrie, justement) à officiellement avoir mis en cause les activités subversives et de déconstruction du milliardaire-activiste. Bien entendu, le fait frappant est que Soros est juif et qu’il apparaît dans ses biographies officielles et en général dans le chef de la presseSystème et de ses “journalistes” comme une victime de l’événement de l’Holocauste. A cet égard, on ne s’attarde pas trop, dans ces biographies, sur les conditions exactes de cette situation moralement si louée dans la pensée-Système ; c’est dommage parce qu’elles sont extrêmement ambiguës, sinon perverses et complètement inverties. A cet égard, nous écrivions le 27 janvier 2017, utilisant des éléments d’un autre texte repris dans le même article (“George Soros Declares War on President Trump”, article de “Harper”, sur le site Sic Semper Tyrannis [SST], le site du colonel Lang, qui restitue le verbatim de l’émission de télévision citée, de décembre 1998 sur CBS.News).

« Pour renforcer le texte de Sedov en s’attachant à la personnalité de Soros, nous reprenons également un texte qui donne diverses précisions intéressantes sur lui en même temps qu’il aliment la même hypothèse (“George Soros Declares War on President Trump”). Tout ce matériel est en général plus ou moins connu, mais il est bon de pouvoir en disposer à nouveau, surtout avec des détails intéressants et parfois inédits. On y trouve par exemple le détail de l’interview de Soros qui s'avère être de décembre 1998, dans l’émission 60 Minutes de la CBS, qui a depuis été le plus souvent possible escamotée. Soros y détaille son activité en Hongrie en 1944, alors qu’il était adolescent, et qu’il se mit au service des forces fascistes et des occupants allemands du pays, pour participer à la récupération des biens Juifs hongrois déportés par les Allemands vers les camps d’extermination. Juif lui-même, et ne manquant jamais de brandir l’anathème de l’Holocauste, Soros commente son rôle avec une extrême désinvolture, du type “il fallait bien que quelqu’un fasse ce travail, alors pourquoi pas moi plutôt qu’un autre”... Ce personnage étrangement proche de ce qu’on imagine être un caractère diabolique sinon le Diable himself, a cette remarque qu’il juge “amusante”, de comparer le rôle de récupérateur des biens juifs (dont certains durent sans doute lui permettre de lancer sa fortune) à celui de trader-spéculateur : “Mais je n’avais en aucune façon l’idée que je n’aurais pas dû être là, parce qu’en fait ... d’un point de vue assez amusant, c’est comme sur les marchés spéculatifs ... l’idée que si je n’avais pas été là, bien sûr je n’aurais pas fait ces choses mais quelqu’un d’autre les aurait... enfin, de toutes les façons, elles auraient été faites...” »

On voit que le personnage de Soros, – que nous aurions purement et simplement tendance à considérer comme diabolique, – dépasse largement les querelles habituelles et en général complotistes qui entourent des personnalités juives de cet acabit, et permet de mieux appréhender l’antagonisme à première vue surprenant entre Israël et lui. Nous pensons qu’il faut comprendre cet antagonisme du point de vue du “déconstructeur” (ou “déconstruction-dissolution-entropisation”). Pour nous, Soros n’est pas un personnage classique des habituelles rengaines de l’antisémitisme et du complot qui va avec, mais bien un personnage-clef de la tendance postmoderne de la déconstruction, ou bien pour nous de la dynamique déstructuration-dissolution-entropisation ; c’est-à-dire un personnage-clef de la tendance de la destruction du monde par l’attaque de tout ce qui est principiel ; ce pourquoi, bien entendu, il nous apparaît également comme purement et simplement diabolique, dans le sens le plus large de ce mot, y compris de type-métaphysique ou plutôt anti-métaphysique, et bien entendu du type-théologique si l’on veut se référer au phénomène religieux

Dans ce cas, Israël se présente comme une structure reposant sur des principes, et cette structure qui en appelle à la légitimité et à la souveraineté considère Soros comme un pur ennemi, un destructeur de soi-même. Bien sûr, on peut observer ironiquement qu’Israël joue bien souvent un rôle déstructurant lui-même, mais il s’agit là des avatars qui font se déplacer les acteurs du rôle de soutien du Système au rôle de l’antiSystème selon la position occupée et la bataille qui est conduite. Dans le cas qui nous occupe, Israël s’oppose à Soros-le-déconstructeur qu’il identifie justement comme un ennemi juré de tout ce qui est structurel, principiel et légitimant.

Ainsi sommes-nous très peu partisans de l’explication que suggère ZeroHedge.com (“influence et argent”) pour présenter les très bonnes relations d’Israël avec une Hongrie quasiment fasciste que la vulgate-Système de type-UE percevrait plutôt comme une ennemie d’un Israël présenté dans ce cas comme un reliquat vertueux de l’Holocauste. (A moins que l’on s’attache à l’objet même de cette raison, puisque l’évocation de “l’influence [et de] l’argent” concerne un contrat important pour que la Hongrie obtienne l’aide d’Israël pour l’édification d’un mur permettant de contrecarrer l’entrée d’immigrants illégaux en Hongrie.) Il devrait être de notoriété publique que l’une des contradictions d’Israël, en face de son rôle déconstructeur du Moyen-Orient, c’est son avenir en tant que société homogène et structurée face aux diverses pressions extrémistes et fondamentalistes (aussi bien ceux des juifs les plus orthodoxes que ceux des islamistes). Cette position rapproche ce pays de certains autres qui luttent également d’une façon ouverte contre les pressions perçues comme déstructurantes et déconstructrices que lui impose le Système, ce qui est le cas de la Hongrie sur cette question de l’immigration que voudrait lui imposer Bruxelles. Dans ce cas, on arrive donc à une situation où l’UE et Soros sont des alliés objectifs dans la tâche de la déconstruction, tandis que la Hongrie de Orban et l’Israël de Netanyahou sont des alliés contre cette poussée. C’est un sujet dont parleront certainement Orban et Netanyahou durant la très prochaine visite du Premier ministre israéliens en Hongrie.

 

Mis en ligne le 11 juillet 2017 à 10H58